Nous sommes, dans notre environnement, exposés à de nombreux perturbateurs endocriniens. Chacune de ces molécules peut indépendamment avoir des effets néfastes sur notre organisme. Les effets délétères de ces différentes molécules à faible dose peuvent également s’additionner ; compliquant une nouvelle fois l’étude de ces substances. En effet, les perturbateurs endocriniens peuvent interagir entre eux et perturber l’organisme sans que chacun, pris isolément, ait un effet. Ils peuvent également interagir sans même agir par de mêmes mécanismes. On parle « d’effet cocktail ».
En 2015, des chercheurs de l’INSERM et du CNRS de Montpellier ont publié les résultats d’une de leurs études sur l’effet cocktail (Delfosse V. et al., 2015). L’étude, qui a testé les interactions entre 40 molécules issues de pesticides, médicaments et polluant environnementaux sur un seul récepteur, a révélé in vitro une action coordonnée de deux molécules, sur la stimulation de l’activité transcriptionnelle du récepteur PXR, capable d’adapter l’organisme aux flux de substances étrangères à celui-ci : le TNC et l’EE2.
Le TNC est un composant d’un pesticide organochloré persistant et l’EE2 est l’œstrogène de synthèse le plus utilisé au monde. Ces deux molécules parviennent à de très faibles doses à se lier au récepteur PXR et à ainsi stimuler la production de protéines de détoxification cellulaire pouvant éliminer toute sorte de molécules de façon anarchique. L’effet de la combinaison de ces deux molécules est dix à cinquante fois plus important que l’effet de ces molécules étudiées séparément. On a donc ici constaté plus qu’une simple additivité de l’action de ces perturbateurs endocriniens.
Encore peu d’études portent aujourd’hui sur les effets de possibles interactions entre perturbateurs endocriniens. Cela s’explique notamment par la grande quantité de substances dont l’action combinée sur les différents récepteurs de notre système hormonal pourrait avoir des effets imprévisibles sur notre organisme.
Cependant, les résultats de cette étude démontrent, pour de nombreux chercheurs et journalistes, qu’une régulation molécule par molécule ne prenant pas en compte ces possibles interactions entre molécules n’est plus pertinente.
Sources :
- Delfosse, V., Denbele, B., Huet, T., Grimaldi, M., Boulahtouf, A. … Gerbal-Chaloin, S. (2015) Synergistic activation oh human pregnane X receptor by binary cocktails of pharmaceutical and environmental compounds. Nature communications, 6. Doi : 1038/ncomms9089
- Delfosse, V., Balaguer, P., Bourguet, W. (2016) L’association fait le poison. Nouveau regard sur l’effet cocktail des xénobiotiques et les interactions médicamenteuses. Med Sci, 32(04), 326-328. Doi : 1051/medsci/20163204005
- Laperche, D. (2012) Effets cocktails : les engagements de la Commission Européenne. Actu environnement.com. Repéré à https://www.actu-environnement.com/ae/news/Effets-cocktails-substances-chimiques-engagements-Commission-europeenne-15818.php4
- INSERM (2011) Reproduction et environnement. Repéré à http://www.ipubli.inserm.fr/bitstream/handle/10608/222/expcol_2011_reproduction_Vc.pdf?sequence=1447