La perception du risque

Les craintes d'explosion dans le grand public sont-elles un frein à l'adoption du véhicule à hydrogène ?

Introduction

Toute innovation suscite au début de la réticence de la part des industriels, de la population, des pouvoirs publics… Comme disait Marissa Mayer, ex PDG de Yahoo, « Si vous passez outre ce sentiment de peur, ce sentiment de prise de risque, des choses vraiment surprenantes peuvent arriver ». Depuis le XIXe siècle, la filière hydrogène a souffert d’événements qui ont nui à son image. Par la suite, les stéréotypes concernant la filière sont restés vifs.

Quels évènements historiques ont conduit à une mauvaise image pour la filière hydrogène ?

L’incendie du Hindenburg

Hindenburg Crash - 6 mai 1937
Sam Shere. Hindenburg Crash : The End of AirShip Travel. [600x528]. Copyright. [Consulté le 01/06/2019]

Une crainte réside chez une partie de la population, traumatisée par le crash de Hindenburg survenu en 1937 [Presse 4]. L’hydrogène est associé à l’explosion qui a eu lieu. L’image ainsi associée est très négative et évoque le feu, l’explosion et le danger.

Cela est d’autant plus vrai qu’au sein de la mobilité, les véhicules hydrogène doivent garantir un niveau de sécurité et de fiabilité total puisque des vies humaines sont concernées. La controverse existe au sein de la population française qui divisée sur le sujet.

L’hydrogène utilisé comme combustible dans une voiture : le gâchis de la molécule miracle

Dans les années 1980, deux formes d’utilisation existent : la principale utilisation est dédiée aux engrais, le second secteur est celui des raffineries qui utilisent l’hydrogène pour briser les chaînes carbonées et obtenir ainsi le pétrole voulu. Par conséquent, l’hydrogène est une denrée très précieuse pour l’industrie pétrochimique. La première voiture à hydrogène utilisait l’hydrogène comme simple combustible. Ainsi, les industriels du pétrole voient d’un très mauvais œil le fait de gaspiller l’hydrogène, perçu comme brûlé. De fait, l’usage de l’hydrogène au sein de la mobilité est très mal perçu par l’industrie pétrochimique qui de plus, la perçoit comme une concurrence qui ferait augmenter les prix, déjà élevés.

Craint-on aujourd’hui de rouler en voiture à hydrogène ?

Une technologie fiable ? En tout cas, des années de Recherche & Développement…

Depuis le début du XXIe siècle, les industriels ont accéléré le processus de R&D pour pouvoir répondre aux exigences de la voiture à hydrogène. Le lecteur pourra se reporter à la page "Production" afin de mieux comprendre le fonctionnement de la voiture. En 2001, la filiale d’Air Liquide qui produit les PAC (Pile à Combustible) est créée. Les constructeurs automobiles comme Renault et Peugeot lancent aussi des études de R&D. L’un des dangers de la molécule d’hydrogène est sa taille. En effet, il s’agit de la plus petite molécule du tableau des éléments de Mendeleïev. En conséquence, il est difficile techniquement de la stocker puisqu’elle a tendance à s’échapper facilement du contenant dans laquelle elle est stockée. A l’air libre, la molécule devient dangereuse car elle est inflammable. Cependant, nos contacts dans les entreprises nous assurent que le danger est techniquement surmonté et qu’il n’y a rien à craindre sur une possible fuite de la molécule. Les PAC sont aujourd’hui commercialisées depuis plus de vingt ans par, par exemple, Hydrogenics que nous avons contacté, qui est présent en Allemagne, au Canada, aux Etats-Unis… De fait, d’après nos recherches et nos contacts, l’hydrogène n’est plus source d’inquiétude sur le point technique : Les contraintes sont surmontées depuis des années, la technologie semble maîtrisée.

Une inquiétude est-elle toujours présente dans la société française actuelle ?

Comme toute apparition nouvelle, les gens ont tout d’abord un mouvement de recul qui se comprend par une peur de l’inconnu. Du temps et une relation de confiance sont nécessaires pour que cette innovation soit acceptée. Afin de sonder la réaction des gens, plusieurs dizaines d’années après les premières apparitions de l’hydrogène dans l’industrie ou dans la mobilité, nous avons réalisé un sondage auprès d’une centaine de personnes âgées entre 18 et 73 ans, pour la moitié étudiants et pour l’autre moitié d’origines diverses. Celles-ci ont répondu à des questions à propos de leur perception du risque lié à la voiture à hydrogène, à propos également de l’intérêt du déploiement de la filière, enfin s’ils trouvent que le développement est suffisamment rapide. Pour chaque réponse, des justifications étaient attendues afin de bien comprendre leur avis.

A la question « La technologie vous paraît-elle sûre » nous avons obtenu les réponses suivantes :

Ce résultat nous montre qu’une majorité de personnes ont une confiance moyenne à très forte dans le rôle de l’hydrogène au sein de la mobilité. Les sondés qui ont répondu entre 6 et 10 sont majoritairement étudiants et expliquent qu’à la suite d’échos qu’ils ont eu de la filière, ou par de la littérature, ils sont persuadés de la sécurité et de la fiabilité de l’hydrogène. Ils voient pour la plupart d’un bon œil le développement de la filière mais regrettent qu’elles ne soient pas encore très développées en France. Le lecteur pourra se référer à la partie "Politiques publiques" afin de mieux comprendre le rôle des pouvoirs publics.

Cependant, une dizaine de personnes sont opposées au développement de la filière par véritable peur des risques d’explosion. Face à ces peurs, des études objectives sur les risques liés à l’hydrogène ont été menées afin de faire la lumière sur les risques réels et d’en limiter l’occurrence. Le ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et Aménagement du territoire propose une analyse objective de l’accidentologie de l’hydrogène [Rapport 2]. L’ADEME (l’Agence De l’Environnement Et de la Maîtrise de l’Energie) a fourni également une analyse des risques liés à l’hydrogène en 2015 [Rapport 4]. Ces études exposent les accidents qui sont survenus, ainsi que les propriétés intrinsèques de l’hydrogène qui peuvent en faire un danger selon les utilisations. Ces études ont un but de prévention des risques et s’adressent en conséquence davantage aux industriels qui manipulent l’hydrogène ou des substances qui y seraient liées. Néanmoins, ces analyses de risques sont très peu apparues dans la presse. Le public touché par ces analyses est de fait très peu étendu. Cela peut être regrettable puisque à titre d’exemple, notre sondage mettait en évidence un manque de communication des acteurs en faveur de l’hydrogène, laissant ainsi présents des doutes sur la sûreté de l’hydrogène dans l’esprit de la population.

Conclusion

La filière hydrogène a souffert d’une image ternie pendant des dizaines d’années à cause notamment d’événements historiques qui ont marqué les esprits. La filière connaît un regain d’intérêt qui pousse la recherche et le développement à assurer une solution techniquement fiable. Néanmoins, malgré une image qui s’améliore, le sondage nous a montré que la peur du danger de l’explosion persiste. Du temps et une forte communication de la part des acteurs sont les solutions vers lesquelles il semble réaliste de se tourner. Pour en savoir plus, se référer à la page "Acteurs".