Les producteurs de biens industriels interviennent dans la controverse pour différentes raisons. Tout d’abord, ce sont les premiers accusés par la presse et par les associations écologistes d’être responsables d’obsolescence programmée. Ils interviennent également en prenant position dans les médias, notamment sous la forme de syndicats, mettant en évidence l’absence de preuve d’obsolescence programmée et également par le biais d’initiatives pour remédier au mouvement de surconsommation et au manque de réparabilité des objets.
Les premiers accusés
Les fabricants de biens industriels sont les premiers visés par l’idée d’obsolescence programmée. Ils seraient les grands responsables de ce phénomène et mettraient tout en œuvre pour que le consommateur soit amené à renouveler rapidement son produit. En effet, les écologistes, les économistes et la presse déversent un flot d’accusations sur les chefs d’entreprises, qui mettraient en œuvre des techniques marketings afin que la fin de vie des produits intervienne plus rapidement que prévu.
Serge Latouche, dans son livre Bon pour la casse : les déraisons de l’obsolescence programmée affirme par exemple que :
« attendre que les produits soient usés pour en acheter des neufs serait un processus beaucoup trop lent pour les besoins de l’industrie américaine ».
Les différentes accusations proférées reposeraient ainsi sur le fait que l’obsolescence programmée serait une nécessité pour permettre aux entreprises de faire des profits, compte tenu de la concurrence.
De même, l’association environnementale Les Amis de la Terre affirme que le consommateur subit les conséquences de telles pratiques dont les entreprises sont les initiatrices. D’ailleurs, dans le projet de loi de Jean-Vincent Placé visant à lutter contre l’obsolescence programmée, ce sont les producteurs qui sont explicitement visés par les sanctions présentes dans le projet de loi.
Néanmoins, nous nous devons de nuancer ces accusations. Même si les médias projettent les producteurs sur le devant de la scène au sujet de l’obsolescence programmée, ce ne sont pas les seuls dont la part de responsabilité est mise en cause.
Par quel biais interviennent-ils dans la controverse ?
Même si les producteurs de biens industriels sont accusés dans leur ensemble de pratiquer l’obsolescence programmée, ils n’interviennent pas tous de façon individuelle dans la controverse. Les industriels qui se sont prononcés publiquement sur le sujet l’ont fait par l’intermédiaire de syndicats. Nous avons rencontré deux syndicats clés, recouvrant une large surface des produits suspectés d’obsolescence programmée : le GIFAM et le SIMAVELEC. Les deux syndicats ont une position relativement similaire sur le sujet.
Le GIFAM est le Groupement interprofessionnel des Fabricants d’Appareils d’équipement Ménagers. Il regroupe une grande partie des chefs d’entreprises de produits électroménager en France. Il est présidé par Gérard Salommez, président du groupe SEB France. Ce dernier est intervenu à plusieurs reprises dans la presse, au nom du GIFAM et de ses adhérant, afin de donner leur position au sujet de l’obsolescence programmée.
D’autre part, le SIMAVELEC correspond au Syndicat des Industries de Matériels Audiovisuels Electroniques. Il représente donc les producteurs de produits de consommations numériques. Le président est Alain Millet.
Ces syndicats interviennent dans la controverse en se prononçant dans la presse, en réalisant différentes études sur la durée de vie de celle-ci et en cherchant des solutions quant à la réparabilité des produits.
L’obsolescence programmée : un mythe ?
Dans un article paru le 2 mai 2013 sur le site internet du journal Le Monde, « La Fabrique de la Panne », écrit par Rafaële Rivais, il était retracé les positions des différents acteurs dans la controverse. A ce sujet, il était affirmé dans l’article que le GIFAM niait l’existence de l’obsolescence programmée en s’appuyant sur le fait que la durée de vie des produits n’avait pas diminué.De même, dans le magasine Neo Domo, Gérard Salommez affirmait en 2013 qu’
« il n’y a pas d’obsolescence programmée dans l’électroménager ».
Il y affirmait d’ailleurs que l’idée d’obsolescence programmée pouvait venir d’un sentiment de nostalgie ou bien de la crise économique. Une des raisons pour lesquelles, selon eux, l’obsolescence programmée n’existe pas dans l’électroménager vient du fait que l’électroménager concerne des produits à cycles courts, la durabilité est une valeur importante. Gérard Salommez affirme d’ailleurs que :
« nous sommes dans la consommation de biens durables, installés dans la cuisine ou la salle de bain, qui répondent à des besoins de base. Nous savons que plus des deux tiers des consommateurs souhaitent conserver leur réfrigérateur ou leur lave-linge plus de 10 ans, 25% aimeraient même les garder toute la vie ! Nous sommes loin du ‘tout jetables’ ! ».
Pour le GIFAM, l’idée d’obsolescence programmée serait avant tout un problème médiatique, car comme tout scandale transformé en problème sociétal, il fait de l’audimat.
De même pour le SIMAVELEC, le délégué général Bernard Herger affirme que l’obsolescence programmée n’existe pas pour les produits numériques français, pour une raison simple : la concurrence. Ce dernier explique que les concurrents sont les premiers acquéreurs d’un produit, ils ouvrent le produit pour l’étudier. Ils seraient donc les premiers à remarquer et à dénoncer chez leurs concurrents une faille introduite sciemment pour nuire à la durée de vie de l’objet.
Il explique également la raison de la propagation de l’idée d’obsolescence programmée : chaque jour, environs 100 téléviseurs tombent en panne, donc le jour de fin de garantie, 100 tombent en panne également. Les victimes d’une telle panne optent pour la théorie d’un complot.
Un travail permanent avec les consommateurs
Les syndicats de producteurs de biens industriels réalisent un travail auprès des consommateurs par deux biais : d’une part agir sur les habitudes de consommation afin d’optimiser la durée de vie du produit, d’autre part se pencher sur les requêtes des consommateurs et leurs demandes quant à la durée de vie d’un produit.
Par l’intermédiaire du TNS SOFRES, le GIFAM fait régulièrement le point avec les consommateurs sur la durée de vie des produits Cela passe également par des interrogations quant à leurs souhaits pour ces durées de vie. L’étude conclut que la durée souhaitée se rapproche significativement de la durée constaté (cela soulève néanmoins les interrogations quant à la mesure de la durée de vie d’un appareil).
Ensuite, le GIFAM cherche également à promouvoir un mode d’utilisation des produits électroménagers permettant d’optimiser leur durée de vie. Ils ont lancé, à ce titre, une campagne d’information de l’utilisateur. Le syndicat est, par exemple, à l’origine d’un site internet www.choixresponsable.com pour guider le consommateur. Il est non seulement question de l’utilisation de l’appareil, mais également de sa réparation et de son recyclage. Le GIFAM met également à disposition des plaquettes intitulées : « Prenez soin de vos appareils électroménagers vous prolongerez leur vie !».
Initiatives pour augmenter la durée de vie des appareils
Pour agir sur la durée de vie des produits, les syndicats axent principalement leurs recherches sur la réparabilité des produits plutôt que sur l’amélioration de la durée de vie. En effet, dans la mesure où les habitudes évoluent, les appareils sont utilisés différemment et même si la durée de vie ne semble pas augmenter significativement, le produit est moins cher et bien plus utilisé que dans le passé.