L’étude de l’OMS
Le 15 juin 2012, la revue scientifique The Lancet publie un rapport du Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) sur les gaz d’échappement diesel. Ce rapport s’appuie sur les études menées auparavant sur les effets du diesel sur la santé, et conclut que les gaz d’échappement diesel causent le cancer du poumon chez l’Homme. En particulier, ce sont les particules fines émises par les moteurs diesel qui seraient le plus cancérigènes, car elles logent des substances toxiques au plus profond des poumons.
Le rapport du CIRC s’appuie sur de nombreuses études expérimentales et épidémiologiques. Les études expérimentales s’attachent à soumettre des animaux et des cellules humaines aux particules fines, et les études épidémiologiques exploitent des statistiques sur des populations exposées aux gaz d’échappement diesel. Pour la communauté scientifique, ce rapport fait foi, d’autant plus qu’il s’appuie sur une trentaine d’années de recherche sur les gaz d’échappement diesel. Il sert ainsi d’officialisation, ou de conclusion à la recherche sur les effets des gaz d’échappement diesel sur la santé. Comme l’a précisé l’épidémiologiste et experte en pneumologie Isabella Annesi-Maesano, les statistiques exploitées dans le rapport du CIRC ont été manipulées précautionneusement, en tenant compte des cas particuliers, notamment du fait qu’une partie des sujets de l’étude étaient fumeurs.
Plusieurs reproches sont toutefois adressés à cette étude. Pour que les études épidémiologiques soient conclusives, il a fallu attendre au moins une quinzaine d’années après l’épisode d’exposition, pour qu’un éventuel cancer ait pu se déclarer chez les sujets de l’étude. Ainsi, les gaz d’échappement diesel auxquels ont été exposés les sujets mentionnés dans les études d’épidémiologie ont été émis de 1967 à 1997. De plus, les conditions étaient parfois très particulières, et très différentes des conditions atmosphériques en ville : notamment lorsque les études d’épidémiologie concernent des mineurs, qui peuvent être exposés à d’autres types de particules fines, comme par exemple de la poussière de silicose. Enfin, les carburants diesel utilisés différaient de ceux utilisés aujourd’hui. Pour toutes ces raisons, des acteurs de la controverse comme PSA estiment que les conclusions du CIRC ne s’appliquent pas aux moteurs diesel actuels.
Certains auteurs comme Roger O. McClellan vont plus loin et demandent que, dans les futures études du CIRC, les NTDE (les gaz d’échappement diesel nouvelle technologie) soient étudiés séparément des TDE (les gaz d’échappement diesel traditionnels, avant 1988), afin de rendre justice aux efforts de recherche faits pour améliorer la qualité de ces gaz d’échappement. McClellan suggère qu’étant donné l’état de la connaissance sur le diesel, les NTDE devraient être classés dans « Group 3, not classifiable as to human carcinogenicity. ». Autrement dit, nous ne savons pas encore si les gaz d’échappement diesel émis par les voitures fabriquées après 1988 sont ou non cancérigènes, par manque de données sur le sujet. Il est à noter que les auteurs déclarent dans la partie « Conflict of interest statement » avoir longtemps été les associés d’entreprises privées développant des technologies de diesel ultra-propre, avoir fait partie de plusieurs comités et associations en rapport avec le diesel, et être employés par des constructeurs majeurs de moteurs diesel.
Bien que débattue, l’étude du CIRC a amené des organes politiques comme l’Union Européenne, à adopter des mesures visant à protéger la santé. C’est dans ce contexte qu’a été définie la norme Euro 5.