Loin d’être une donnée évidente, qui s’impose naturellement, le prix d’un joueur de football est le résultat d’une production collective lié à la façon dont le marché du football est structuré et régulé. La valeur marchande d’un joueur, le prix qui lui est attaché, existe à l’issue d’une mise en forme complexe donnant lieu à la confrontation d’instruments juridiques), d’infrastructures (des clubs, des centres de formations), d’intermédiaires variés (agents de joueur, entraîneurs, etc.), de jeux de notoriété, de disputes, de tractations et de négociations. Dans ces interactions, l’historique du marché des transferts, le niveau purement « footballistique » du joueur, le championnat dans lequel il joue, son état de santé, son âge, sa forme actuelle, mais surtout, la « demande » des clubs, et la « volonté » ou non du club d’origine de le céder sont autant de « variables » à chaque fois mises en jeu.
L’affaire Thauvin, évènement qui a animé le mercato estival de l’année 2013, illustre tout à fait les rouages d’un transfert. Ce joueur de Bastia (de 2011 à 2013) qui fût acheté par Lille au mercato d’hiver 2013 pour un montant de 5 millions d’euros, tout en étant « prêté » à Bastia pour le restant de la saison. Dès l’été, il appartient donc à Lille, mais l’Olympique de Marseille se montre aussi prêt à « tout » pour le faire venir.
Au tout début de l’été 2013, l’OM, vice-champion de France malgré des coupes de budget importantes à l’été précédent, décide d’investir en masse dans de jeunes joueurs français, tentant de prendre exemple sur le Borussia Dortmund alors finaliste de la plus grande compétition européenne : la ligue des champions.
Son but est donc de faire venir à moindre frais les plus grands espoirs du championnat, de les faire progresser et d’ainsi tenter de rivaliser avec les néo-riches que sont le Paris Saint-Germain et l’AS Monaco. Dans cette optique, le club du sud de la France achète Giannelli Imbula, désigné meilleur joueur de Ligue 2, à « l’En Avant Guingamp », Benjamin Mendy au Havre ou Mario Lemina à Lorient. Alors que Lille est en proie à de sérieuses difficultés financières (comme nous pourrons le voir dans la deuxième partie) après une saison décevante ponctuée par une décevante sixième place (qui le prive de 15 millions d’euros, montant minimum alloué aux participants de la Ligue des champions), Marseille cible deux de ses joueurs au profil différent. Dimitri Payet d’abord, un joueur de Ligue 1 confirmé, et international, dont Lille souhaite se séparer en raison de son salaire trop élevé, et Florian Thauvin donc, jeune espoir bastiais acheté six mois auparavant pour une somme de 5 millions d’euros et un salaire mensuel avoisinant les quarante-cinq mille euros. Si le transfert de Dimitri Payet se déroule sans encombre (il ira à Marseille en échange de 10 millions d’euros), celui de Florian Thauvin est beaucoup plus délicat. En effet, Michel Seydoux, président du LOSC, souhaite absolument garder un joueur qui représente à son sens l’avenir du club, et pose son veto quant à un éventuel transfert du jeune joueur. Mais l’affaire ne s’arrête pas là : désireux de rejoindre le club qu’il qualifie comme étant celui de son coeur, Thauvin décide de faire le forcing et sèche les entraînements du club lillois. Un premier conflit entre le club et son joueur prend alors place.