Les partisans du paquet neutre affirment qu’il s’agit d’une politique de lutte contre le tabagisme efficace. Son efficacité repose sur plusieurs mécanismes :
- Les messages et images faisant la promotion des produits liés au tabac peuvent banaliser l’usage du tabac, inciter les plus jeunes à commencer, et dissuader les fumeurs d’arrêter.
- Le paquet est un élément important du marketing, et ceci est d’autant plus vrai aujourd’hui, les formes traditionnelles de publicité pour le tabac étant très réglementées.
- Le paquet neutre a été montré comme moins attirant pour les jeunes qui commençaient à fumer.
- De nombreux fumeurs sont trompés par le design des paquets qui suggèrent que certains paquets contiennent des cigarettes moins dangereuses que d’autres.
- Le design du paquet peut distraire de l’avertissement sanitaire graphique.
- L’inclusion du nom de la marque et d’autres artifices de design dans le paquet sont associés de manière très étroite au niveau d’attractivité.
Le camp en faveur du paquet neutre défend que ces points sont soutenus par une littérature scientifique rigoureuse. En effet, le sujet est largement traité dans la littérature spécialisée. Une étude d’octobre 2013[1] synthétise en particulier l’ensemble des études qui ont été effectuées antérieurement à cette date (aucune des études ne traite donc de l’Australie après son introduction du paquet neutre, cette introduction étant postérieure à la publication de cette synthèse). Le but de ce travail est d’évaluer la capacité du paquet neutre à remplir les objectifs que la Convention Cadre de Lutte contre le Tabac de l’OMS (Framework Convention on Tobacco Control ou FCTC) a indiqué comme étant dans les bénéfices potentiels du paquet neutre, à savoir :
- Réduire le plaisir sur la consommation
- Rendre les avertissements sanitaires plus visibles
- Contrer les effets marketings du paquet qui pourraient tromper le consommateur sur le danger du produit
L’étude reprend un total de 25 études quantitatives sur la perception et la réponse du consommateur face au paquet neutre, en ce concentrant en particulier sur les 3 points principaux mentionnés précédemment. Etant donné qu’à la date où cette étude a été effectuée, aucun pays n’avait encore appliqué le paquet neutre, ces résultats sont uniquement basés sur des études expérimentales, des sondages et des observations. Cependant, ces recherches établissent un consensus sur une diminution du plaisir procuré par le tabac lors de l’utilisation du paquet neutre. Sur les deux autres points, les résultats étaient plus contrastés, mais laissaient cependant dans la majorité des cas un avantage au paquet neutre.
Le cas australien
L’exemple de l’Australie est souvent employé pour appuyer l’argument de l’efficacité du paquet neutre :
Des fumeurs australiens interrogés après son adoption en 2012 disent être plus motivés à arrêter de fumer, qu’ils ont plus souvent essayé d’arrêter et plus souvent écrasé une cigarette commencée. Ils ont également davantage appelé la ligne téléphonique d’aide à l’arrêt (augmentation de 78% après la mise en place du paquet neutre). Karine Gallopel Morvan, professeure à l’EHESP (Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique), et membre du CNCT (Comité National Contre le Tabac).
Après son introduction en Australie, de nombreuses recherches ont été effectuées sur les retombées du paquet neutre et sont venues alimenter la littérature scientifique. En ce qui concerne la visibilité du paquet, on peut par exemple mentionner une étude issue de Tobacco Control[2].
Cette étude s’est attachée à évaluer la visibilité du paquet dans les lieux publics. Entre janvier et avril 2012 (avant l’introduction du paquet neutre), 2013 (début du paquet neutre) et 2014 (1 an après son introduction), les paquets de cigarettes et les consommateurs de tabac présents dans des terrasses de cafés et de restaurants ont été comptés. Le type du paquet (neutre, marketé, ou inconnu) était relevé, ainsi que son orientation (face visible ou non).
L’étude démontre une réduction persistante de la visibilité des produits liés au tabac en public, en particulier en présence d’enfants entre le début de l’implémentation du paquet neutre, et un an plus tard. Cet effet devrait effacer les normes sociales liées au tabac, tout en affaiblissant son influence et réduire le nombre de nouveaux fumeurs, conclu l’article.
L’éditorial[3] de Simon Chapman publié le 2 mars 2015, favorable au paquet neutre, fait un bilan sur l’expérience du paquet neutre en Australie et en établit les bénéfices. L’auteur insiste en particulier sur le fait qu’il s’agit d’une mesure sur le long terme, qui, même si elle peut ne pas avoir des effets immédiats, ne peut qu’en avoir sur le long terme. Grâce aux précédentes lois portant sur la suppression de la publicité pour le tabac, les australiens de moins de 23 ans n’ont jamais vu une publicité pour le tabac. De manière similaire, le paquet neutre a pour objectif de donner aux générations à venir un paquet les avertissant sur les dangers du tabac plutôt qu’un paquet attrayant. On peut ainsi imaginer que dans 18 ans, aucun mineur n’aura rencontré de paquet aux couleurs d’une marque.
Il conclut par une analogie entre l’Australie et le Canada, qui par sa mise en place des avertissements sanitaires sous forme d’image sur les paquets a été le précurseur d’une mesure aujourd’hui reproduite dans 63 pays.
En conclusion, le camp défendant le paquet neutre, en s’appuyant sur les différentes études menées à ce jour par la scène scientifique, affirme que les objectifs qui lui sont associés sont réalistes.
Lire la suite : Des conclusions remises en question