Parentalité et identité : “l’enfant à trois parents”

Une controverse bioéthique liée au remplacement mitochondrial concerne la parentalité de la donneuse de mitochondries ainsi que l’identité d’un enfant issu des ADN de trois personnes. Un tel débat met en exergue la question philosophique de l’identité et de la parentalité.

Qu’est ce qui constitue l’identité d’une personne ?

Être parent est-il synonyme d’être donneur de gènes ou d’être un acteur fondamental dans le développement de l’enfant ?

 


“Suis-je l’enfant de trois parents ?”

Certains spécialistes conseillent aux parents qui ont des enfants avec cette méthode d’être honnêtes quant à leurs origines, afin de les protéger du stress de développer les mêmes maladies que leur mère.

Cependant, d’autres pensent que l’enfant mis au courant pourra développer des troubles psychologiques s’il sait qu’il possède un troisième donneur génétique ; il ne trouvera son identité que s’il parvient à retrouver le troisième donneur – ce qui sera logiquement impossible puisque les donations de mitochondries se feront de manière anonyme. Comme le dit le philosophe John B. Appleby dans son article “The ethical challenges of the clinical introduction of mitochondrial replacement techniques” :

“One worry is that children might have a troubled relationship with their parents or struggle to develop their identity, as a result of knowing they share a mitochondrial genome with a donor. [But] currently no empirical evidence exists about the psychosocial wellbeing of MRT-conceived children, which makes it difficult to determine if any of the above risks will materialise.”

Il n’existe donc aucune preuve du développement certain de ces troubles psychologiques. En prenant en compte le développement psychologique des enfants nés suite à une donation d’ovocyte, il semblerait que le développement de troubles psychologiques ne soient pas si fréquent que cela.

De toute manière le remplacement mitochondrial est-il comparable au don d’ovocyte en terme de parentalité du donneur ? La donneuse d’ovocyte fournit 50% du génome de l’enfant tandis que la donneuse de mitochondries n’en fournit que 0.1%.

Ainsi le philosophe Pierre Le Coz pense que la question des problèmes psychologiques liés à la parentalité est un “faux problème” compte tenu de l’infime proportion du génome fourni par la donneuse.

Il semble donc que l‘expression de “bébé à trois parents” puisse être remis en question concernant le remplacement mitochondrial.


“Suis-je le descendant de mes ancêtres ?”

Une autre altération de l’identité de l’enfant réside dans le fait que le remplacement mitochondrial entraîne un changement de généalogie.

En effet les mitochondries sont très souvent utilisées par les scientifiques pour reconstruire des arbres généalogiques et pour retrouver des ancêtres lointains de sexe féminin – pour les lignées masculines on utilise le chromosome Y. C’est notamment comme cela que les scientifiques ont réussi à remonter jusqu’à Lucy. Ainsi après changement des mitochondries, l’enfant n’appartiendra donc plus, scientifiquement parlant, à sa famille.

Source : https://www.igenea.com/fr/adn-mitocondrial