Un acteur majeur de la controverse est l’Etat Français, qui est instaurateur de la monnaie ainsi que majeure institution de contrôle et de régulation. Ces deux opérations se reflètent dans l’activité de deux institutions : le Trésor Français et la Banque de France. Quand histoire et actualité se mêlent …
Le Trésor Français : Une institution qui possède 50% des réserves de change de chacun des pays de la zone, qui ont l’obligation de déposer ces réserves
« Question : Le Trésor Français conserve-t-il 50 % des réserves ?
Olivier Vallée : Il ne conserve pas 50 % de la monnaie. Il centralise les réserves en devise et encore tout cela est en grande partie fictif. Ça n’a rien à voir avec la monnaie circulante. Une banque centrale c’est un petit peu comme une banque commerciale et donc un petit peu comme une entreprise. En haut du bilan, il y a ce qu’on appelle les avoirs extérieurs nets, toutes les réserves en devise que la Côte d’Ivoire aurait reçues au 31 décembre par exemple. La devise serait principalement le dollar là-bas (vente du cacao, du café dans cette devise). Sur un milliard de dollars disons 60% doivent être conservés au Trésor français de façon purement comptable. C’est une centralisation qui vaut ce qu’elle vaut. Beaucoup d’entreprises ne rapatrient jamais leur devise, elles laissent leur argent à Londres ou à New York plutôt que de le laisser à Abidjan ou à Paris. Cette règle est fictive et ne présente aujourd’hui plus aucun avantage sérieux pour le Trésor français. Si la Côte d’Ivoire a des recettes de 1 milliard de dollars, son passif (ce qu’elle doit au reste du monde) serait peut-être de 2 milliards de dollars donc les avoirs extérieurs nets sont sans doute négatifs.”
entretien du 4/05/18 [E]
La Banque de France : une autre institution majeure, mais pas sur le même plan
« Question : Quel pouvoir concret a ou n’a pas la Banque de France sur les institutions monétaires en Afrique ?
Olivier Vallée : Il se trouve que la Banque de France ne joue quasiment aucun rôle, déjà qu’elle en jouait peu avant. En fait l’acteur central du système est le Trésor Français. La Banque de France a en réalité un rôle de secrétaire. Elle fait un rapport tiré des rapports des deux sous-ensembles régionaux. Ils font des statistiques, les envoient à Paris. Les rapports mettent beaucoup de temps à sortir car la banque de France fait la balance des paiements consolidés, la modographie puis ce fameux rapport. Les opérations de régulation monétaires sont réalisées par le Trésor Français et non la Banque de France. C’est le Trésor qui a emprunté pour EDF, pour les centrales nucléaires, et qui nous a endetté. La Banque de France est un secrétaire général, un peu passif.
Par contre ce qui serait intéressant si vous rencontrez la Banque de France, c’est qu’ils sont souvent en première ligne sur les analyses, sur les changements etc. Le Trésor en public est de moins en moins actif mais je verrai. Il y a une ligne générale du fameux non problème qui fait que le Trésor ne s’engage pas sur le dossier et laisse des gens comme Strauss-Kahn le faire.
Une question que vous pourriez poser c’est est-ce que le franc CFA n’est pas surévalué, quand on voit que l’euro est déjà jugé assez élevé par rapport au dollar ou au yuan.”
entretien du 4/05/18 [E]
Bibliographie :
[E] Entretien réalisé en 2018 par les élèves de l’Ecole des Mines de Paris. http://controverses-minesparistech.fr/groupe7/wordpress/entretiens/