Le panafricanisme

Le panafricanisme est un vaste mouvement politique qui promeut l’indépendance des pays africains et le rattachement de la diaspora à ses origines. Certains activistes liés au panafricanisme comme Kemi Seba critiquent violemment l’utilisation du franc CFA comme un vestige d’un colonialisme dépassé.

Ce qu’on en dit …

« Le panafricanisme est plus un outil de gouvernance politique à la disposition des chefs d’État africains pour mobiliser les populations. C’est plus un panafricanisme d’intérêt que lié à la réalité concrète des populations africaines. » 

Lucien Pambou, Jeune Afrique, 26/06/2017 [1]

Professeur de sciences économiques et politiques, rédacteur associé de la revue Géopolitique africaine

« Le panafricanisme est par essence un mouvement d’idées et d’émotions. C’est une vision sociale et politique, une philosophie et un mouvement qui cherchent à unifier les Africains d’Afrique et les membres de la diaspora africaine en une communauté africaine globale, et qui appelle à l’unité politique de l’Afrique. »

Philippe Ouedraogo, « Le panafricanisme : histoire, mythes et projets politiques »

Eclésiastique Burkinabé

 

 

Ses Origines

Né au début du XXe siècle dans les milieux intellectuels afro-américains et antillais dans un contexte de lutte idéologique contre la discrimination raciale et la colonisation, le panafricanisme visait à unir les Africains et les descendants d’Africains hors d’Afrique dans un même sentiment de fierté pour le passé et les valeurs africaines.

La défense des droits civiques aux Etats-Unis a rejoint la lutte pour l’indépendance des pays africains. Plusieurs congrès panafricains ont alors favorisé l’émergence d’un mouvement politique africain qui a mené entre autres à la naissance de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA).

« Le Panafricanisme a connu ses heures héroïques et de gloire dans la dernière phase de la période coloniale de l’Afrique, et durant les luttes qui ont été organisées à partir des années 1960 contre la ségrégation raciale, aux Etats-Unis notamment. » dira Philippe Ouedraogo.

Le mouvement a depuis perdu en vitesse, avec l’indépendance de nombreux pays africains et l’essoufflement de l’idéal d’un peuple africain uni. Dans le sillon de cet affaiblissement est née une fascination de la diaspora africaine pour leur continent d’origine. [3]

Ses revendications

« L’Afrique aux Africains », était un des slogans de lutte du panafricanisme. Cinquante à soixante ans après, il dénonce l’absence persistante de démocratie, la misère généralisée dont sont victimes de nombreux africains sans couverture sociale minimale, mais aussi la dépendance économique et culturelle de l’Afrique à l’égard de l’Europe et de l’Amérique. [3]

Les questions posées par le mouvement actuellement sont principalement :

– Quels sont les outils pour affirmer la gouvernance des pays Africains

Quel est le but poursuivi et les objectifs intermédiaires visés dans la gestion du pouvoir ?

– Le pouvoir respectera-t-il la souveraineté du peuple et son droit à la libre expression ?

Sa position par rapport à la Controverse

Ces questions touchent bien entendu à l’utilisation du Franc CFA dans les pays de l’ancienne Françafrique, et de nombreux activistes de la diaspora se rattachant au panafricanisme dénoncent la monnaie. Pour eux, elle remet en question la gouvernance africaine, son détachement de l’Europe …

Pour l’économiste Kako Nubukpo, cette position est toutefois critiquable :

« Quelqu’un qui a grandi en Afrique ne peut pas fonctionner comme quelqu’un qui a grandi dans la diaspora. […] Quand tu grandis en Afrique tu vois tout de suite la responsabilité des Africains dans le mal-développement de l’Afrique. Quelqu’un qui a grandi dans la diaspora vit l’Afrique comme le mythe du Paradis Perdu. Il a tendance à faire porter sur la France des responsabilités qui ne sont pas françaises. »

Kako Nubukpo, entretien du 16/04/2018 [E]

Kemi Seba et le billet de 5000 FCFA

L’arrestation à Dakar le 25 août 2017 du nationaliste panafricaniste Kémi Séba accusé d’avoir brûlé en public un billet de 5000 francs CFA (un peu moins de 8 euros), pose d’une manière très médiatisée la question du maintien de cette monnaie accusée par une partie des jeunes intellectuels africains d’être à la fois une survivance de la période coloniale et un moyen pour la France de continuer à exercer une tutelle sur ses anciennes colonies. [4]

L’incident a contribué à médiatiser en France la controverse du Franc CFA. Le geste de Kemi Seba est à la fois salué par certains activistes, et regretté par d’autres. Ainsi, pour l’écrivain sénégalais Felwine Sarr ,la forme par laquelle Kemi Seba se révolte contre la monnaie dessert son propos :

« On peut ne pas adhérer à sa méthode, à son propos simpliste, à ses théories du complot, à ses excentricités, au traitement caricatural qu’il fait d’une question dont la réponse est plus complexe que la binarité d’un oui ou d’un non ; il n’en demeure pas moins vrai que les questions impérieuses de la souveraineté et de l’autonomie des Etats africains postcoloniaux, des rapports de domination qui persistent dans les relations entre les anciennes puissances coloniales et les pays africains, méritent d’être posées, et Kémi Séba les pose. »

Felwine Sarr, Le Monde Afrique, 28/08/17 [5]

 

Source : https://i1.wp.com/237infos.com/wp-content/uploads/2017/09/1505062046_apres-la-relaxe-le-procureur-de-la-republique-senegalais-fait-appel.jpg?fit=825%2C440

Bibliographie : 

 [1] « Le panafricanisme : idéal pour la jeunesse africaine ou outil factice de gouvernance politique ? » JeuneAfrique.com (blog), 26 juin 2017. http://www.jeuneafrique.com/451431/politique/panafricanisme-ideal-jeunesse-africaine-outil-factice-de-gouvernance-politique/.

[2] Jaffré, Bruno. « “Le panafricanisme : histoire, mythes et projets politiques” de Philippe Ouedraogo ». Thomassankara Website (blog), 2 mars 2010. http://www.thomassankara.net/le-panafricanisme-histoire-mythes-et-projets-politiques-de-philippe-ouedraogo/.

[3] « Mot clé : Panafricanisme – Le Monde diplomatique ». Consulté le 21 juin 2018. https://www.monde-diplomatique.fr/index/sujet/panafricanisme.

[4] « Franc CFA : Kemi Seba, l’incendiaire ». JeuneAfrique.com (blog), 11 septembre 2017. http://www.jeuneafrique.com/mag/471143/politique/franc-cfa-kemi-seba-lincendiaire/.

[5] « Franc CFA : « De quoi le geste de Kémi Séba est-il le nom ? » ». Le Monde.fr, 28 août 2017. https://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/08/28/franc-cfa-de-quoi-le-geste-de-kemi-seba-est-il-le-nom_5177645_3212.html.

[E] Entretien réalisé en 2018 par les élèves de l’Ecole des Mines de Paris. http://controverses-minesparistech.fr/groupe7/wordpress/entretiens/