Des recommandations françaises en évolution

En France, l’organisme qui donne la position officielle sur le Syndrome du Bébé secoué est la Haute Autorité de Santé (HAS). Ses recommandations sont utilisées d’un côté par les praticiens, ce qui leur permet de réagir au mieux face à un cas de secouement, et de l’autre par l’appareil judiciaire, qui use de ses recommandations pour étayer la défense ou l’accusation en cas de procès.

 

Qu'est-ce que la HAS ?

La Haute autorité de santé (HAS) est une autorité publique indépendante à caractère scientifique, créée par la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, pour renforcer la qualité et la pérennité de notre système de santé. Elle agit pour améliorer la qualité du système de santé afin d’assurer à tous un accès durable et équitable à des soins aussi efficaces, sûrs et efficients que possible.

Source : solidarité-santé.gouv.fr
En 2011, la HAS publie pour la première fois des recommandations à l’adresse des personnels de santé vis-à-vis du syndrome du bébé secoué [1]. Ces recommandations font état d’une triade de symptômes (cf rubrique Un consensus médical contesté, page Un débat d’experts), qui fait actuellement le cœur de la controverse actuelle. En 2017, la HAS actualise ces recommandations [2]. La HAS justifie cette révision par deux grands arguments : l’augmentation depuis 2011 des connaissances scientifiques sur le sujet et la nécessité d’être clair et pédagogue. En effet, la HAS doit prendre en compte la méconnaissance des professionnels de santé de ce syndrome et les contestations du public, contestations liées au fait qu’un diagnostic est aussi une accusation portée contre une personne. A la différence des premières recommandations de 2011, le terme TCNA (Traumatisme Crânien Non Accidentel) apparaît. L’apparition de ce terme est importante, car elle montre que, bien que la HAS soit restée officiellement sourde aux revendications des familles pendant 6 ans, elle a légèrement changé de posture pour l’actualisation des recommandations. Cette nouvelle appellation témoigne d’un réel changement de paradigme. Le terme SBS est contesté en partie parce qu’il sous-entend la cause dans sa dénomination même alors qu’il ne devrait seulement faire état d’un certain nombre de symptômes. En choisissant d’utiliser dorénavant le terme de TCNA, la HAS rompt avec cette ambigüité. L’organisme français de la santé fait ainsi une concession au débat en dissociant la qualification des symptômes de la qualification des causes de ces symptômes. Aux Etats-Unis s’est déroulé le même revirement. Au terme Shaken Baby Syndrom a été substitué l’appellation Non Accidental Head Injury. Néanmoins, la HAS réaffirme avec force la pertinence de la démarche diagnostique énoncée pour la première fois en 2011. Parmi les participants au groupe de travail qui a élaboré les recommandations, figurent notamment des auteurs de l’article qui critiquent l’étude suédoise.

La HAS écrit à ce sujet :

« Depuis 2011, les connaissances se sont accrues particulièrement concernant les lésions induites par le secouement, ce qui a nécessité une actualisation des recommandations. (…) Ce syndrome implique de nombreux champs professionnels : médical, médico-social et social, juridique et judiciaire. Parmi les professionnels, la méconnaissance du sujet (en particulier l’extrême violence du geste / son caractère répété / la fréquence des séquelles) et le poids des idées reçues (on peut,en jouant avec un enfant,créer les lésions du SBS) sont majeurs. Ceci est à l’origine de divers dysfonctionnements, toujours au détriment de l’enfant. (…) »

Détail des recommandations

Les recommandations de la HAS présentent à la fois :

  • comment repérer un Traumatisme Crânien Non Accidentel (TCNA) ;
  • quel conduite le corps médical doit tenir ;
  • les lésions observées en cas de secouement, notamment les lésions intracrâniennes (mais aussi les lésions médullaires et intra rachidiennes, oculaires et périoculaires, cutanéo-muqueuses, de la la nuque et les lésions osseuses) ;
  • les examens nécessaires pour un bilan clinique complet ;
  • les diagnostics différentiels ;
  • et enfin, en guise de résumé, les critères diagnostics pour (in)valider la thèse d’un TCNA par secouement.

Ce document résume également les aspects juridiques en cas de diagnostic de TCNA par secouement. Il explique pourquoi il est important de signaler le cas dans l’intérêt de l’enfant et détaille la procédure judiciaire. Il est clairement inscrit que « l’absence de signalement par le professionnel de santé peut notamment l’exposer aux sanctions de l’article 223-6 du Code pénal » quoiqu’en soit le secret médical. En aucun cas le signalement ne doit accuser une personne comme auteur des faits.

Références

[1] Haute Autorité de Santé, & Somfer. (2011). Recommendations de bonne pratique Syndrome du bébé secoué ou traumatisme crânien non accidentel par secouement – Texte des recommandations. has-sante.fr

[2] Haute Autorité de Santé, & Somfer. (2017). Recommendations de bonne pratique Syndrome du bébé secoué ou traumatisme crânien non accidentel par secouement – Texte des recommandations. has-sante.fr