Pierre-Yves Bournazel est conseiller de la ville de Paris depuis 2008 et conseiller régional d’Ile-de-France depuis 2010. Familier des problématiques du Grand Paris, il a pris plusieurs fois positions sur le péage urbain et a notamment soutenu sa place dans la loi Grenelle II, ainsi que les études de cas à son sujet.
-Pourquoi s’intéresser aux questions de transport et d’écologie à Paris ?
La région capitale est de plus en plus polluée. Ca a des conséquences sur les cancers, sur les enfants, les personnes lesplus vulnérables. Il y a des causes spécifiques, et donc une nécessité de lutter contre les pollutions: c’est-à-dire repenser la politique des espaces urbains: transports, voitures mais aussi l’habitat. Le but est de pouvoirmieux respirer dans la ville. Mais la problématique est résolument régionale: à l’échelle du grand Paris métropole. Il faut s’attaquer à tous les sujets de pollution.
-Quelles mesures avez-vous envisagé personnellement ?
En 2009, j’ai formulé le souhait au conseil de Paris de la réalisation d’uneétude technique du péage urbain,pour pouvoir adapter de manière pragmatique les questions urbaines et sociales. Il faut s’attaquer aux deux sujets en même temps: celui des voitures propreset celui des transports en commun.
Au niveau de l’habitat, j’ai proposé un cahier des charges en énergie positive de manière à faciliter fiscalement les mesures prises par les habitants pour améliorer leur bilan.
L’étude de cas permettrait de voir où est le problème, comment on le résout et comment on favorise les véhicules propres. Sa problématique serait en quelques sortes « comment inverser les tendances?Comment limite-t-on les circulations en coeur de ville? ».
-Et qu’en est-il aujourd’hui ?
Aucune expérimentation n’a suivi la loi Grenelle II. Cependant, il faut aussi repenser le péage urbain sous forme d’écopass, afin d’éviter que les gens s’imagine concrètement comme de manière plus abstraire une barrière à l’entrée des villes.
L’écopass est un système pragmatique, sous forme de pastille, qui donnerait la liberté de circuler selon la pollution de la voiture et/ou raison du déplacement. Je suis également partisan d’une incitation fiscale à l’achat de véhicule propre.
Il est important de penser en même temps :
Le but est d’inciter au comportement environementalementresponsable: il ne faut pas montrer du doigt et accuser mais faire changer les mentalités (et ça, ça prend du temps!) Le stationnement est également à limiter.
Cependant, j’insiste sur l’aspect progressif du procédé, de manière à réellement instaurer un comportement écologiquement responsable qui incite le citoyen lui-même à prendre des initiatives.
-Comment envisagez-vous le réinvestissement des recettes ?
L’investissement des bénéfices de l’écopass iraitdans les transports. La région capitale a beaucoup de retard en transport. Cela constitue non seulement un frein à l’activité économique mais implique aussi une moins bonne qualité de vie.
-Et temporellement, comment se déroulerait l’implantation ?
Il faut organiser des modalités pour favoriser les transports en commun et les véhicules propres (dans la circulation, dans le stationement, dans l’accès au centre ville) en même temps que la mise en place du système.
Cependant, la puissance publique est à l’heure actuelleelle même non exemplaire (à l’instar du diesel dans la RATP). La dédielisation et la lutte anti pollution nécessite de voir à moyen long terme. On a déjà perdu du temps. Le problème de l’action publique, c’est que gouverner ce n’est plus prévoir.
La progression de l’implantation se doit d’être la plus flexible possible. Il faudrait obliger les plus récalcitrant fiscalement pour les inciter.
Pourquoi les gens passent par Paris? Il y a un problème de transports en commun. Au final, ça crée de l’embouteillage. Il vaut progressivement restreindrel’ouverture aux véhicules propres. Les polluants seraient uniquement autorisés aux moindres heures de circulation.
- Que penser du problème de l’acceptabilité?
Il s’agit avant toutd’expliquer aux gens d’une bonne façon que l’écopass n’est pas là pour pénaliser mais pourréorienter sur les transports. Il faut qu’ils entendent« on va vous aider à acquérir un véhicule propre ». Il s’agit de faire évoluer les comportements, d’inverser des tendances.Expliquer progressivement: on va vous accompagner, c’est un sujet important, on vous donne les outils.
L’expérimentation est également un bon moyen pour augmenter l’acceptabilité du péage urbain ; il permet d’avoir le temps d’écouter, de faire, et d’adapter: il laisse le temps d’évoluer. Il faut se placer dans une logique de communication et non de décision : les décisions doivent pouvoir être adaptées. On doitavoir d’avantages de politique de transition. Il faut être hyper flexible.
-Question du dézonnage du passNavigo: solution pour améliorer les transports, vraiment ?
Ce n’est pas une bonne stratégie. C’est surtout de la démagogie pour les élections régionales.
Les gens attendent de la sureté et de la rapidité. Il y a beaucoup d’investissement à faire.
La bonne stratégie seraitdonc l’investissement, avec une priorité aux transports. C’est essentiel pour les investisseurs, pour l’attractivité économique, pour la qualité de vie des habitants
Il a un problème de logique d’attractivité, or les transports en commun sont la première attractivité.L’attractivité des métropoles est essentielle!! Il faut assurer la compétitivité.
La nécessité est d’anticiper. Il faut tout faire progressivement. Quand ça a marché: on installe, si ça marche, on continue.
En même temps: les gens doivent sentir un objectif, doivent sentir une logique.
-Mais comment trouver le budget nécessaire dans ces temps de crise ?
C’est une question de choix politique.
Moi j’ai fait le budget. Dire où, combien. Hiérarchiser les priorités. Le mal français est qu’on dépense sans revenir dessus. Or pas de droit acquis: il y a une stratégie à avoir à l’échelle sociale.Il faut évaluer la dépense.
-Qui doit supporter le cout des investissements pour les transports en commun?
Le système français ne fonctionne plus: il faut redonner un projet de société: comprendre ce que sera le monde de demain: chaque dépense publique doit financer le monde de demain. Forme les citoyens à avoir desmétiers hyper compétitivité.
Commencent par des subventions à des associations. Souvent il faut changer les habitudes pour les financement pour le monde de demain, celui des transports fiables, rapides et surs.
On prend du retard dans la compétitivité des grandes métropoles: on va finir rabougris. Il faut du courage!!! Il faut abandonner ce qui ne sert plus à rien, et virer de bord.
Le budget découlera du courage de réformer le système. (en profondeur)
- Que répondez-vous à l’argument de l’acroissement des inégalités sociales ?
On propose un accompagnement ce qui empêche la création de nouvelles inégalités. On leur propose par initiation fiscale différente d’un droit à polluer car justement on aide à acquérir un véhicule propre. Il s’agit d’une incitation vers le comportement. Pour donner le temps pour inverser les tendances. On explique, on rassemble, on incite, on évalue la politique publique qu’on met en place. Il faut être pragmatique et faire confiance aux réalités de terrain.
Ecopass est au contraire une lutte contre les inégalités sociales :tous peuvent lutter contre la pollution. Tous peuvent partir de leur territoire, bouger, circuler si on améliore les transports : améliorer les transports, c’est permettre à tous de bien vivre dans la cité.
-Qu’en est-il des inégalités géographiques ?
Ecopass les réduiraient car assurait la mobilité en finançant les véhicules en commun.
La ségrégation commence par pas pouvoir se déplacer, elle est due au cloisonnement: il n’y a pas d’accès aux transports faciles. Elle commence par la liberté d’aller et venir qu’on veut justement améliorer en réinvestissant dans les transports.
-Au niveau des transports: quelle évolution proposez vous?
Je soutiens le projet du Grand Paris Express, qui va décloisonner les territoires, en étant un métro le plus performant.
Je soutiens en outre la rénovation de ce qui est existant et usé en matière de sécurité et d’accès (aux personnes non mobiles par exemple). Cependant le changement de gouvernement fait qu’on avance plus sur ce projet. Il a un problème de recherche d’argent.
Il faut faire une demande d’investissements. Si on renonce aux investissements, il a des problèmes.
Le problème est que tout est lié: c’est une question de vision. On a un système figé qui ne fonctionne plus.
La logique de la réélection fait que le courage n’est pas pris pour faire lesinvestissements. Le système est ainsi à bout de souffle: on est au pied du mur. Il faut le courage de réformer. Il faut du neuf.