Robot : késaco ?

   Un enjeu de taille, parce qu’il sous-tend la manière dont sera taxé un robot et les différentes stratégies qui permettront d’échapper à une éventuelle taxe est la question de la définition pratique d’un robot.

“Je pensais  que les robots  pouvaient tout faire. Mais en m’intéressant  à ce domaine, j’ai contacté des roboticiens et des fabricants et j’ai découvert la réalité du terrain, qui est très  différente.”

Nathalie Nevejans

   Delphine Siquier [1] précise en quoi cette définition technique est une condition sinequanone de l’établissement d’une quelconque taxe dans l’article “La taxe robots, un nouvel ovni dans le paysage fiscal ?” paru dans Les Nouvelles Fiscales en mai 2017 :

« Plus sérieusement, face à un tel constat, on peut s’interroger, notamment au regard de l’article 34 de la Constitution selon lequel l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement doivent être définis par le législateur. Lui incomberait donc la douloureuse tâche de préciser ce que l’on entendrait par « robot ». D’autant que pour assurer le respect du principe d’égalité, il doit surtout fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu’il se propose d’atteindre. Et cette appréciation ne doit pas entraîner de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques. Pour cela, il conviendrait donc de définir un robot d’une manière non discriminatoire par rapport à l’objet visé, et ainsi traiter de la même manière tout ce qui a le même effet. Enfin, l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, impose au législateur d’adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques pour prémunir les sujets de droit contre le risque d’arbitraire. Tout cela est donc loin d’être évident… »

   Il est donc vital de définir de manière juridique et techniquement ce qu’est un robot pour bien délimiter les contours de la notion. Xavier Oberson souligne lui aussi de prime abord que la question est délicate et est primordiale d’un point de vue fiscal [2].

   Mady Delvaux pose ainsi le cadre quelque peu surprenant au niveau technique :

“Aujourd’hui,  nous ne savons même pas faire la différence entre la voiture autonome et le robot  aspirateur alors qu’ils n’ont rien à voir.”

   Une norme Iso 8373 [3] a déjà été proposée ainsi qu’une résolution adoptée par le Parlement Européen concernant des critères permettant d’identifier des robots comme tels :

“[…] mécanisme programmable actionné sur au moins deux axes avec un degré d’autonomie, se déplaçant dans son environnement, pour exécuter des tâches prévues. Le robot inclut le système de commande et l’interface de communication. La classification d’un robot en robot industriel ou robot de service est fonction de l’utilisation qu’il est prévu de faire du robot.”

   Ces questions semblent être sujets de tensions parmi les spécialistes de l’intelligence artificielle ou des machines en général comme le montre l’intervention en tout début de conférence “L’homme et le robot au travail, quelle relation inventer ?” [4] qui entend rappeler qu’un robot est avant tout un ensemble de trois éléments distincts : « des capteurs, un processeur et des opérateurs ».

   Néanmoins, les différentes propositions induisent des conséquences peu souhaitées sur des possibles échappements à l’impôt ou des recaractérisations de robots en simples machines industrielles (en introduisant une intelligence artificielle au départ distinguée de la machine opérative et donc considérée comme un robot dans cette même machine individuelle).

   Ainsi Xavier Oberson insiste sur le concept d’autonomie pour caractériser un robot bien plus que sur une notion d’enveloppe physique, bien trop sujette à distorsion. [2]

   Une fois le domaine d’application d’une éventuelle taxe sur les robots bien délimité, vous vous demandez peut-être comment cette mesure pourrait être mise en pratique (« Les modalités de la taxe : quels critères ? »). Si les suggestions réelles vous intéressent, un tour sur la page des propositions politiques vous permettra d’avoir un aperçu des réflexions et des revendications publiques émises par des responsables politiques et syndicaux européens depuis 2016.

Avancement de la mission
56%

Sources :

[1] Siquier Delot, Delphine. « La taxe robots, un nouvel ovni dans le paysage fiscal ? » Les Nouvelles fiscales, 15 mai 2017.

[2] Université de Genève. Taxer les robots? Conférence de X. Oberson, 2017.

[3] « ISO 8373:2012(fr), Robots et composants robotiques — Vocabulaire ». Consulté le 25 mai 2018.

[4] « L’homme et le robot au travail, quelle relation inventer? – Les Mardis des Bernardins ». France Culture, 8 octobre 2015.