Les personnalités politiques et institutions locales sont les premiers intermédiaires entre les citoyens de communes voisines du site d’extraction et les institutions comme la préfecture, le gouvernement ou la commission européenne : ils sont une représentation politique immédiate des populations locales. Ils sont également en contact régulier avec les autres acteurs du débat, notamment les associations auxquelles ils ont le pouvoir d’attribuer des subventions.
L’opposition des citoyens se retrouve chez les élus
Des voix s’expriment en faveur de l’extraction
L’opposition des citoyens se retrouve chez les élus
Dès novembre 2010, une enquête publique dans treize communes de Côtes d’Armor et du Finistère concernées par le projet révèle la ferme opposition au projet des riverains : 80% d’opposition sur environ 1400 personnes interrogées. [1]
De février 2011 au début de l’année 2015, les communes de Morlaix, Lannion, et d’autres communes plus petites comme Trédrez-Locquémeau prennent à l’unanimité plusieurs motions contre le projet d’extraction ou en faveur de l’action du Peuple des Dunes. En janvier 2015, une subvention de 10 000 euros est même accordée au collectif par Lannion Trégor Communauté [2]. Le président de Lannion Trégor Communauté est d’ailleurs présent à la plupart des manifestations du Peuple des Dunes.
Dès sa nomination au poste de Ministre de l’Écologie en avril 2014, Ségolène Royal est contactée par Corinne Erhel, députée des Côtes d’Armor, inquiète tant pour la biodiversité et le littoral que pour l’emploi et l’activité économique dans sa circonscription. La ministre fait part de son opposition au projet dans une réponse par lettre en juin 2014, et la députée persiste en mai 2015 [2]:
Je ne suis pas opposée à l’extraction de sable dans son principe, j’en comprends les enjeux. Mais je suis fortement inquiète de la localisation choisie pour ce projet pour des raisons environnementales et une insuffisante prise en compte des conflits d’usage avec d’autres activités économiques ou de loisirs.
En septembre 2015, après le décret d’Emmanuel Macron, les réactions des élus ne se font pas attendre. Corinne Erhel regrette que les modalités d’extraction ne prennent pas suffisamment en compte les engagements pris lors des délibérations. En outre, Erven Léon, maire de Perros-Guirec et vice-président de Lannion Trégor Communauté et du conseil départemental des Côtes-d’Armor, avance que [2]:
Quand il y a une quasi-unanimité des élus locaux et de la population contre un projet, il faut qu’au plus haut niveau de l’Etat on en tienne compte. On ne peut pas développer une activité économique aux dépends d’une autre. Or c’est ce qui arrivera, quoi qu’en dise la CAN.
Lannion Trégor Communauté et Morlaix Communauté ont déposé ensemble un recours en justice contre le décret en novembre 2015. [3]
Des voix s’expriment en faveur de l’extraction
Yannick Guégan est le seul conseiller municipal local qui s’est résolument exprimé en faveur de l’extraction dès décembre 2010. [4]
C’était alors un élu UMP, chef de file de l’opposition au conseil municipal de Lannion, délégué de la ville pour la communauté Lannion-Paimpol. Il a été directeur du Centre de Formation Agricole de Pommerit-Jaud et en 2013 [6] et il a annoncé qu’il ne comptait pas se représenter pour les élections suivantes [5].
Il est le seul à tenir ouvertement cette position : ses deux colistiers Michel Le Gall et Danielle Marec s’étaient abstenus lors de la première concertation à ce sujet au conseil municipal de Lannion, tous comme les maires de divers-droite de Pleumeur-Bodou, Trémel et Kermaria-Sulard [4].
Ses arguments sont économiques : il évoque le rôle essentiel de l’amendement calcaire dans l’agriculture bretonne (il le présente comme sa condition d’existence) et les 140 emplois du site de la CAN à Pontrieux. Il remarque que c’est justement plus au large que les pêcheurs exercent leur activité, et parle du site d’extraction de Bréhat où les bars n’ont pas disparu [4].
En février 2012, il a encore une fois manifesté son soutien à la CAN, et en particulier aux 200 emplois de l’usine de Pontrieux, en votant contre la motion de soutien à Peuple des Dunes du conseil de Lannion-Paimpol. Il a encore une fois été le seul à voter contre ; ses deux colistiers se sont abstenus [7].
Notons de plus que Jean-Yves Le Drian, président du conseil régional de Bretagne, s’est positionné en faveur du projet lors des régionales de décembre 2015, et que Corinne Erhel était dans sa liste, dont le quatrième était d’ailleurs Olivier Allain, ancien président de la chambre d’agriculture des Côtes d’Armor, lui aussi en faveur du projet.[8]
(1) MELL Joseph (Commissaire Enquêteur), Demande de concession minière d’autorisation domaniale et d’autorisation d’ouverture de travaux d’exploitation – Rapport d’enquête publique. Dossier n°E10000410/35. (2 décembre 2009).
(2) Les collectivités s’insurgent contre une autorisation d’extraction de sable marin. La gazette des communes, (18 septembre 2015)
(3) Les opposants à l’extraction de sable prêts à attaquer le décret. Le Télégramme (Bretagne). (16 novembre 2015)
(4) L’agglo dit également « non » à l’extraction de sable. Le Télégramme (Bretagne), (16 décembre 2010)
(5) Lannion. Yannick Guégan ne se représente pas. Le Télégramme (Bretagne), (9 octobre 2013)
(6) CFA de Pommerit-Jaudy. Un nouveau directeur à la rentrée. Le Télégramme (Bretagne), (25 avril 2009).
(7) Extraction de sable. L’Agglo de Lannion soutient le Peuple des Dunes. Le Télégramme (Bretagne), (29 février 2012)
(8) Dans le Trégor, l’offensive ratée de Marc Le Fur. Ouest-France, (14 décembre 2015)