Ce cadre conceptuel veut investiguer la «voie directe» et ainsi éviter le recours à l'explicitation abstraite du code écrit ; Jean Foucambert et Eveline Charmeux en sont les principaux théoriciens en France, et se sont inspirés de nombreuses recherches antérieures, portant en particulier sur les méthodes analytiques.
Dans ce cadre pédagogique, l'enfant doit découvrir le code écrit de la même manière qu'il a découvert le code oral, par la pratique, l'anticipation, l'imagination et l'expérience . De cette manière, il accède plus sûrement au sens, et met directement en oeuvre les mécanismes de lecture utilisés par le lecteur compétent.
Cette position est sous-tendue par des études datant des années 1940-1950 montrant que certains élèves, qui avaient appris à déchiffrer un texte « abstraitement » sans en comprendre le sens pouvaient en effet retomber dans l'illettrisme quelques années après. En outre, il est vrai que la présentation du code peut être considérée comme abstraite et difficile, d'autant plus qu'elle comporte de très nombreuses exceptions et subtilités, qui proviennent tant de l'histoire que d'une possible tendance à confirmer la différenciation sociale dans la pratique orthographique. Ce dernier élément s'oppose à une vision démocratique de l'enseignement, dont nous avons qu'elle était capitale dans l'arrière plan philosophique de ces études pédagogiques.
Les études qui ont été conduites dans de rares classes expérimentales ont consisté à observer le comportement des enfants lorsqu'ils sont laissés seuls devant la lecture d'un texte inconnu et d'un niveau légèrement supérieur au leur. On constate alors que les enfants tentent de deviner les mots inconnus, ou les sautent et continuent leur lecture. Ce sont ces processus qu'ont tenté d'utiliser les chercheurs en pédagogie de la lecture dans les années 1960.
L'élément fondateur d'une possible réfutation des théories précédentes n'est pas d'origine théorique, mais d'ordre pratique : il consiste en la reconnaissance de l'inefficacité, voire de la dangerosité pour le développement intellectuel futur des enfants, de l'usage des méthodes préconisées. Les grammairiens qui s'engagent dans cette dénonciation sont souvent en exercice, et donnent pour preuves leur propre expérience de l'enseignement : appliquer les directives serait tout simplement utopique. Comment laisser les élèves « seuls acteurs de leur enseignement », placés devant des textes, des mots à deviner, lorsque leur intérêt n'est de toute évidence pas du tout porté vers ces sujets.
Ces constatations « de bons sens » se doublent du recours à un autre corpus théorique, qui déborde le champ de la grammaire et de la linguistique proprement dite, pour se fonder sur les neurosciences. De très récentes recherches, dont certains neuroscientifiques estiment qu'elles sont utilisées abusivement, tendent à montrer la nécessaire liaison « graphème phonème », associée à une phase de déchiffrage. Frank Ramus ou Jean Emile Gombert, deux neuroscientifiques, sont souvent cités par les grammairiens qui tentent de réintroduire le déchiffrage.