La pomme de terre Amflora a peu d’avenir et semble être déjà un produit du passé. En effet, durant ces longues années de latence et d’échecs, la recherche scientifique a progressé et la méthode de modification du génome utilisée pour Amflora n’est plus aujourd’hui la seule manière de procéder. La société BASF a ainsi créé une nouvelle variété de pomme de terre transgénique, Amélia, qui possède les mêmes propriétés qu’Amflora, le npII en moins, et devrait donc déclencher beaucoup moins de réactions hostiles. La controverse aura donc empêché à Amflora de véritablement exister.
En revanche, elle ne laissera pas aucune trace de son existence. On peut citer comme impact, le fait que l’EFSA a été saisie trois fois dans l’affaire : à chaque fois, elle a cherché à modifier sa méthode de travail pour fournir une expertise différente, qui se veut plus juste, et a donc fait évoluer son fonctionnement. Sur le plan politique, la pomme de terre est à l’origine d’un bouleversement dans le fonctionnement de l’Europe : les pays n’arrivant pas à se mettre d’accord ont finalement conclu que l’Europe autorisait officiellement Amflora, mais que chaque pays était autorisé à l’interdire. Autrement dit, cette « pomme de discorde » a fragilisé l’uniformisation législative européenne.
Concernant les biotechnologies dans l’agriculture, notamment des pommes de terre à fécule, l’avenir est moins sombre. En effet, le président de l’Union Nationale des Producteurs de Pommes de Terre est d’avis de « suivre ce dossier de manière technique. ». Il constate : « Il faut que la recherche française puisse être forte dans ce domaine, tout en étant bien encadrée par la puissance publique, afin de conforter notre industrie et qu’elle reste compétitive. »
Un autre aspect qui est frappant est que personne, à part BASF, ne défend avec ferveur Amflora. En effet, les producteurs de pommes de terre n’en voient pas l’intérêt, les industries féculières n’en expriment pas le besoin, les consommateurs, s’ils ne sont pas sans avis, craignent les éventuels risques. Pour changer la donne, il faudrait que les OGM « apportent un plus à la société. Si demain on nous promet des variétés OGM permettant d’utiliser moins de produits phytosanitaires. Le dossier méritera d’être étudié de très près avant que l’on puisse se prononcer. »[Président de l’UNPT].
Amflora est au cœur d’une controverse car elle combine de nombreuses particularités : elle est innovante, mais lancée dans un marché sans demande particulière, elle présente un certain nombre de dangers difficiles à évaluer et le principal bénéficiaire des revenus qu’elle pourrait engranger n’est autre que BASF, la société détentrice du brevet. Changer légèrement une seule de ces caractéristiques aurait changé profondément le visage de la controverse.