La mesure de la quantité de particules

         Une fois les normes fixées, il faut s’assurer qu’elles sont respectées, et pour cela, il est nécessaire d’estimer la quantité de particules fines présentes dans l’air, en masse et en nombre.

          La masse de particules est mesurée à l’aide d’une pesée différentielle sur un filtre. Pour déterminer la masse de particules dans l’atmosphère, on passe un filtre dans l’air, afin de récolter les particules, et on en déduit la masse en soustrayant la masse du filtre vide à la masse du filtre plein. PSA utilise la même méthode pour mesurer l’efficacité de ses filtres à particules. La voiture roule sur un banc d’essai homologué, et un filtre recueille les particules à la sortie du pot d’échappement. PSA trouve 0,2 mg/km, avec une incertitude de ±0,5 mg/km. D’après PSA, ces tests sont homologués et reproduits dans des laboratoires indépendants, avec des résultats identiques :

« On utilise que des protocoles homologués par l’UNECE, c’est un organisme qui met en place des normes et des protocoles qui sont repris au niveau mondial, l’UNECE c’est à Genève. Et un pays peut dire : j’applique tel protocole. […] Et pour être très tranquilles on a ce que l’on appelle des Golden véhicules : il y a un véhicule PSA qui en est un : il ne roule jamais, il est toujours sur un plateau quand vous l’envoyez d’un labo à l’autre, et il tourne dans les labos et vous le mettez sur un banc à rouleaux, et vous mesurez la valeur. Le véhicule va chez Total, il va chez Ford, il va chez PSA, il va à l’UTAC, l’organisme de certification français, il va au GRC à l’Europe et on mesure. Ca permet de vérifier qu’on est homologué, qu’on est cohérent et que notre système marche. Et ça on le fait très régulièrement, et nos systèmes de mesures, c’est pas nous qui les avons inventés. » Pierre Macaudière

           Cependant, d’après Giechaskiel et al.,

« For vehicles with modern aftertreatment technologies, the gravimetric method is reaching its detection limit. A filter weighs about 150 mg, whereas the PM mass collected by the filter from DPF equipped vehicles can reach as low as 10 µg, i.e. <0,1% of the filter mass. At the lowest emissions levels, the artifacts and measurement uncertainties discussed above can contribute more than 90% of the recorded mass increase. »

               La méthode de mesure de la masse des particules fines émise par un moteur diesel est imprécise, du fait de la grande incertitude sur le résultat. On peut ainsi objecter à la mesure de PSA une trop grande confiance accordée aux incertitudes. Les barres d’erreur annoncées sont-elles justifiées, compte tenu de la méthode utilisée ?

        Depuis la norme Euro 5, il est nécessaire de mesurer le nombre de particules présentes dans l’atmosphère. Selon le professeur Isabella Annesi-Maesano, une méthode courante est la mesure de la diffusion lumineuse, mais la communauté scientifique lui préfère une autre méthode (voir plus bas). PSA utilise toujours le même banc d’essai homologué. Les gaz d’échappement sont récupérés, et traités pour éliminer la vapeur d’eau, et les autres gaz qui pourraient gêner la mesure. Les gaz restants sont passés dans des vapeurs de butanol qui créent une couche sur les particules de diamètre compris entre 23 et 2500 nm. Cela fait « grossir » les particules et permet de compter les plus petites. Selon Pierre Macaudière de PSA, les mesures du nombre de particules sont donc parfaitement fiables. A la sortie du pot d’échappement,

« je suis au delà du bar, 1.5 ou 2 bars, j’ai plein d’eau, et donc si je fais simplement une expansion de ce gaz, je fais des tonnes de particules et si je mesure ces particules je mesure de l’eau, donc il y a tout un processus de traitement qui est fait par les laboratoires européens, validés au niveau de l’UNECE et ainsi de suite, qui dit l’échantillon on le traite, on le détend, on le réchauffe pour éliminer l’eau et on élimine tout ce qu’on appelle les volatiles. Et nous on recompte. Ensuite toutes les particules passent dans une chambre de condensation, on condense du butanol dessus, donc on fait grossir toutes les particules, qu’elles fassent 20 nm ou 1 micron, elles comptent pour un. Et donc on s’est fait attaquer en disant : hé les gars vous oubliez les petites. Et si, les petites on les compte aussi ! » Pierre Macaudière

           Pour plus de précisions sur ces mesures, voir Quelles particules sont filtrées ? et l’article Giechaskiel et al, Review of motor vehicle particulate emissions sampling and measurement: From smoke and filter mass to particle number.

          La mesure du nombre de particules fines dans l’atmosphère est souvent laborieuse lorsque l’on souhaite avoir des données sur l’air d’une ville. Comme nous l’a expliqué Isabella Annesi-Maesano, des organismes comme Airparif, ainsi que les experts en environnement et maladies respiratoires utilisent plus couramment des modèles mathématiques. Ceux-ci sont, toujours d’après le professeur Annesi-Maesano, très fiables. Par exemple, lorsqu’Airparif a annoncé les niveaux de pollution élevés du 14 mars, les chiffres provenaient de simulations numériques.

          Les mesures de particules fines au sortir d’un moteur diesel sont contestés, comme décrit dans l’article d’Audrey Garric du Monde du 6 mars 2013 :

« Il existe une très grande divergence entre les émissions mesurées sur le cycle d’essai réglementaire [nouveau cycle européen de conduite, NEDC] et les émissions mesurées pendant l’usage réel : les paramètres du véhicule (réglages du moteur et aérodynamisme) sont optimisés pour offrir les meilleurs résultats lors des tests, mais ils diffèrent grandement en conditions réelles, avec des vitesses de conduite qui changent brusquement, un état des routes variable et des véhicules qui ne sont pas neufs, regrette Klaus Steininger, l’un des auteurs du rapport, chargé de mission à la DG Entreprise et industrie de la Commission européenne. »

               PSA est effectivement d’accord avec ce genre de remarque : il peut y avoir jusqu’à un facteur 10 entre les émissions sur le banc d’essai et en conditions réelles. Cela dépend essentiellement du conducteur :

« Pour votre info, le moteur essence comme diesel, il y a des moments où on fait lors des accélérations, lorsque le gars décide de conduire comme un fou, on peut faire 4, 5, 6, 10 fois la norme du cycle d’homologation ! Le cycle d’homologation c’est un thermomètre. Une voiture qui émet beaucoup émettra beaucoup dans la vie réelle. C’est pareil, les gens se plaignent de la consommation, elle n’est pas représentative sur le cycle, oui bien sûr ! Il faut rouler doucement… Par contre je peux vous garantir que si vous avez deux voitures, une qui consomme moins que l’autre, dans la vie réelle ce sera la même chose. » Pierre Macaudière

          Pour essayer d’améliorer l’utilisation des diesels muni d’un filtre à particules, PSA projette d’équiper ses véhicules d’une technologie embarquée permettant à l’utilisateur d’estimer ses émissions en particules fines et en gaz polluants, et ainsi d’adapter sa conduite.

          Les statistiques obtenues sur la quantité de particules fines ne reflètent qu’une partie de la réalité, car elles introduisent un effet d’échelle.

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