La viande artificielle
Alors que les éleveurs doivent faire face à une demande croissante, un autre type de production de viande animale, qui pourrait satisfaire les consommateurs, est en train de voir le jour : la viande artificielle. Encore au stade expérimental, ce moyen de production est subventionné par des moyens quasi-illimités, par notamment Bill Gates et Peter Thiel (un investisseur qui avait soutenu le projet Facebook).
Echantillon de viande (image tirée d’Alternet, un site d’information financé par des donateurs)
Les start-up créées dans ce domaine cherchent à créer une viande aussi proche que possible de la vraie. Bill Gates, à propos du faux poulet que la start-up dont il détient la majorité des parts, a déclaré : « J’ai goûté les substituts de viande de poulet de Beyond Meat et j’ai été impressionné. Je n’ai senti aucune différence par rapport à la vraie viande ». Deux méthodes sont développées : soit créer le goût de la viande à partir de substituts, soit créer de la viande « in vitro » (à partir de cellules souches musculaires de vaches, par exemple).
Ces solutions techniques permettraient de mettre fin à la réduction de l’animal à un objet, selon Peter Thiel, qui espère ainsi éviter l’expansion de l’élevage intensif. Ces considérations rejoindraient donc celles des véganes, qui refusent de manger tout produit issu de l’animal, au nom de l’éthique. Mais d’autres personnes, comme François de Closets, un journaliste, pensent que le problème de nos relations avec l’animal ne peut être simplement résolu par une issue technique, et que nous devons faire face au problème directement et modifier nos habitudes alimentaires.
Une question importante réside dans l’attitude de la société vis-à-vis de ce moyen de production : le consommateur aura-t-il confiance ou non dans ce substitut ? Si oui, alors les solutions de l’élevage pour produire plus n’auront plus de sens. Mais il risque de s’écouler quelques années avant que la question ne se pose réellement : le premier steak haché artificiel a été présenté en août 2015. Pour le professeur Post, qui a présenté ce steak, la viande artificielle permettrait de consacrer moins de terres arables à la production de viande, ce qui permettrait de les utiliser pour nourrir la population mondiale croissante tout en évitant toute privation. Hanna Tuomisto, une spécialiste d’agro-écologie de l’université d’Oxford, a regardé l’impact de cette production de viande par rapport à de la « vraie » viande : il faut seulement trois mois pour qu’elle arrive à maturité, et l’émission de gaz à effet de serre est réduite de 96%. Quelques problèmes importants subsistent cependant. D’une part,le coût de production, qui devra être suffisamment faible pour que cette viande soit compétitive. D’autre part, les risques économiques pour les éleveurs que présentent une telle concurrence. En effet, si un substitut de viande devait arriver sur le marché à des prix comparables, il y a fort à parier que la crise de l’élevage en France ne ferait que s’aggraver et que les éleveurs auraient du mal à s’adapter à une telle concurrence. Cependant, les partisans de la production artificielle de viande ne semblent pas pour l’instant s’intéresser excessivement à cette éventualité, puisque nous n’avons pas trouvé de réflexions de leur part allant dans ce sens. Il est sans doute un peu tôt pour que les chercheurs se posent déjà la question, et l’avenir réservé aux start-up de viande artificielle reste encore assez obscur tant que les techniques sont encore au stade expérimental.