Risques de commercialisation
Alors qu’une ouverture des données est envisagée depuis quelques années, des questionnements s’élèvent quant aux acteurs qui auront accès à ces données. Le risque que les assureurs accèdent à ces données fait surtout débat. En effet, des associations de patients mais également des politiciens ou des médecins s’inquiètent d’une possible utilisation des données afin de tarifer les assurés en fonction des risques. Or, la loi interdit ce genre de dérive et met un point d’honneur à garantir l’anonymat des données.
Cependant, certains considèrent que les mesures mises en place ne seront en aucun cas suffisantes. Par exemple, Frédéric Bizard, économiste, spécialisé sur les questions de protection sociale et de santé, estime que les garde-fous mis en place ne garantissent pas le bon usage de ces données. En effet, lors d’un entretien réalisé par nous-même, il nous explique que cette ouverture des données va permettre à certaines sociétés d’obtenir ces données rendues anonymes en payant une institution chargée de faire de la recherche scientifique ou des études. C’est ce qu’on peut appeler la commercialisation des données.
En d’autres termes, il déclare que les assureurs ou les institutions pharmaceutiques auront accès à ces données.
Ces derniers se défendent tant bien que mal, en assurant que leur utilisation des données ne pourrait être que bénéfique à leurs patients. En effet les assureurs offrent à leurs assurés des palmarès de professionnels basés sur les prix de chacun, donnant donc à tous un droit aux mêmes informations.
Quant à l’industrie pharmaceutique, il existe effectivement un risque que les instituts utilisent les données afin d’identifier les médecins qui prescrivent peu leurs médicaments afin d’entrer en contact avec eux, et a contrario de contacter ceux qui les prescrivent régulièrement pour s’associer à eux et leur en proposer de nouveaux. Cependant, dans le même temps, leur donner accès aux données sensibles peut également réduire les risques sanitaires concernant certains médicaments. Dans un exemple concret, Didier Sicard, ancien président du Comité consultatif national d’éthique, regrette les déviances qui ont pu avoir lieu dans l’utilisation du Mediator et estime qu’une plus grande ouverture de santé aurait pu prévenir ce scandale et ses conséquences désastreuses. Il indique en effet que le laboratoire à l’origine de ce médicament réfute aujourd’hui ses torts en stipulant qu’il n’avait pas accès aux données de santé à l’époque et n’a donc pu réaliser les dangers du Mediator.
Sources :
Entretien réalisé avec Frédéric Bizard, économiste et professeur à Sciences Po.
Sicard D., Spaeth J-M (2016, 27 septembre). Il faut ouvrir les données de santé à tous les acteurs. Le Monde.fr Disponible ici
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