L’interdiction de “vapoter” dans les lieux publics est un des enjeux majeurs de la controverse entourant la cigarette électronique car il est facteur indiscutable du développement et de l’expansion de ce nouveau produit.
Les professionnels de la cigarette électronique y sont très défavorables, alors que le gouvernement pousse actuellement pour la mise en place de cette mesure de précaution.
Pour trancher, il faut déjà se rappeler des conditions qui avaient entouré la loi Evin du 10 janvier 1991 interdisant notamment l’utilisation des cigarettes “classiques” dans les lieux publics.
Cette interdiction avait été motivée par la prise de conscience entourant le phénomène de tabagisme passif, comme le rappelle la ligue contre le cancer [1] : “l’interdiction de la cigarette électronique dans les lieux publics nous paraîtrait souhaitable. Mais encore une fois, l’interdiction de fumer dans les lieux publics avait été justifiée par le tabagisme passif. En France, on est très sur la liberté individuelle donc comme là on dit qu’il n’y a pas de risques, ça va être difficile de mettre en place cette réglementation.”
Cependant dans le cas de la cigarette électronique, les acteurs s’accordent à dire que le tabagisme passif lié à la cigarette électronique est tout à fait négligeable.
Peut-il y avoir du tabagisme passif?Pour les associations de consommateurs, c’est la liberté de vapoter qui est remise en cause. L’interdiction est, pour elles, trop peu justifiée. Ainsi, le président de l’AIDUCE, Brice Lepoutre, affirme dans le Huffington Post [4]:
“L’Aiduce s’insurge contre cette politique de la peur, cette tentation de dévoyer le principe de précaution jusqu’à l’absurde. On interdit quand il y a un risque. En l’espèce, de façon factuelle, il n’y en a aucun, sauf dans l’imagination de certains prescripteurs fanatiques des comportements approuvés. On finirait bien par se demander quelles sont leurs sources d’inspiration, quand seul le tabac peut sortir vainqueur d’une mesure qui lui assimilerait nos vaporisateurs…”
L’interdiction du “vapotage” dans les lieux publics est en réalité motivée par un autre phénomène : celui de l’incitation au tabagisme par le biais de la cigarette électronique.
C’est ce que le gouvernement, et Bertrand Dautzenberg, Président de l’OFT, prônent [3]:
“Je suis pour l’interdiction de la cigarette électronique dans les lieux publics car cela reste une incitation au tabagisme. Aujourd’hui, un patron de restaurant qui place un cendrier, même vide, sur une table, peut être condamné pour incitation au tabagisme. Cela va de même pour l’e-cigarette : lorsque vous êtes dans une salle avec 4 personnes qui vapotent, c’est une incitation. Que des profs, ou des présentateurs télés se mettent à vapoter dans leurs lieux de travail, c’est remettre l’image du tabac dans la société, ce n’est pas terrible.
Les premiers à avoir interdit leurs utilisations sont les compagnies aériennes, pour éviter tout litige entre les passagers concernant la réglementation. La SNCF et la RATP ont suivi le mouvement. Cependant leur utilisation n’est pas encore formellement interdite dans les écoles et les hôpitaux, ce qui devrait changer sous peu sous l’impulsion de la ministre de la santé avec la circulaire de santé publique qui devrait être passée en 2014.”
Cette initiative est notamment soutenue par Claude Evin, lui même [5] :
L’ancien ministre socialiste de la santé et actuel président de l’Agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France se dit en effet favorable à l’interdiction de « vapoter » dans tous les lieux accueillant du public, y compris le lieu de travail. « C’est une question de cohérence du message, assure-t-il au journal du Monde. Si vous arrêtez de fumer du goudron, ce n’est pas pour vous retrouver à côté de quelqu’un qui ‘tire’ sur sa cigarette électronique. Il ne faut pas l’autoriser dans les lieux accueillant du public. »
M. Evin rejoint sur ce point l’ancienne ministre de la santé, Marisol Touraine, qui s’était déclarée favorable à un alignement de la législation de la cigarette électronique sur celle du tabac : interdiction dans les « lieux à usage collectif » (lieux publics et de travail), dans les bars et les restaurants [2].
D’autres questions doivent aussi être traitées par le gouvernement :
A quel niveau faut-il taxer la cigarette électronique ?On constate cependant une certaine lenteur dans la prise de décisions par l’État :
L’inertie de l’état ?Bibliographie:
[1] Interview de l’association de la Ligue contre le cancer
[2] AFP, « Cigarette électronique: Touraine pour l’interdiction dans « certains lieux publics », L’Express, publié le 30 avril 2014
[3] Interview de Bertrand Dautzenberg, président de l’OFT
[4] Brice Lepoutre, « Une interdiction de vapoter en lieux publics serait liberticide et injustifiée, et contraire à l’intérêt de la santé publique », Chronique publiée dans Le Huffington Post le 1 avril 2014
[5] Alexandre Pouchard, « Cigarette électronique : Claude Evin favorable à l’interdiction dans les lieux publics », Le Monde (site web), 7 Octobre 2013