Le projet de la Tour Triangle suscite de vives réactions en raison de l’importante superficie de l’édifice qui sera consacré au marché de bureaux. De nombreuses personnalités politiques ont réagi : Nathalie Koscuizco-Morizet souligne depuis 2014 qu’il n’y a pas d’acheteurs pour l’instant. Elle estime ainsi que « La Tour Triangle apportera 80 000 m2 de bureaux presque dénués d’équipements ; or, 800 000 mètres carrés de bureaux ne trouvent déjà pas preneur à Paris ». Le MoDem supporte des arguments du même type et explique que cela n’apporte aucune plus-value à Paris.
Ces arguments en défaveur d’une telle surface de bureaux avaient déjà été évoqués par les différentes associations opposées au projet : les associations font valoir qu’il y a déjà des bureaux vides dans le quartier de La Défense et que ceux du centre haussmannien sont préférés en raison du confort de ces quartiers. C’est ainsi qu’Olivier Rigaud, coordinateur du Collectif contre la Tour Triangle, affirme en Aout 2012 que « Cette opération ne fait que rajouter des mètres carrés supplémentaires de bureaux, alors que des milliers de mètres carrés sont vacants dans Paris » et maintient ses arguments en Mars 2014 : « [La Tour Triangle] sera uniquement consacrée aux bureaux à un endroit où l’offre est surabondante »
Il convient donc de se pencher sur ces chiffres. En la matière, la région Ile-de-France est déjà championne d’Europe avec ses 52 millions de m² de bureaux. Paris est considérée comme le marché le plus performant d’Europe après Londres pour les investissements immobiliers non résidentiels. Selon une étude de l’Observatoire régional de l’immobilier d’entreprise de la région Ile-de-France sur le parc immobilier de bureau de la région, menée fin 2014, «au 2e trimestre 2014, 3,3 millions de mètres carrés de bureaux de seconde main sont libres de toute occupation en Île-de-France». A Paris, le chiffre est d’environ 805.000 m². L’observatoire note l’existence d’un «marché de bureaux à deux vitesses, avec d’un côté des bureaux neufs bien situés qui restent demandés, et de l’autre, des bureaux anciens éloignés de standards de marché et dont les prix continuent de baisser, sans pour autant trouver preneur». Le cap symbolique des 4 millions de mètres carrés de bureaux disponibles a été franchi fin 2014 en Ile-de-France. Cela représente un taux de vacance de 7,6 %. Si le taux ne dépasse pas 5,6 % dans le « triangle d’or » (zone qui désigne à Paris la délimitation des avenues Montaigne, George-V et les Champs-Elysées, il atteint 12 % à La Défense.
Mais ces chiffres eux-mêmes font débat. Le site dédié au projet Triangle affirme que 2 834 000 m² de bureaux sont disponibles dans Paris en avril 2015, soit seulement 4,8% du total du parc de bureaux parisiens. En-deçà de 5% de vacance, il est admis par la profession que le marché est sous tension. Le site affirme que c’est le cas à Paris depuis 2011.
Depuis 2008, le marché de Paris intra muros consomme environ 770 000 m² de bureaux en moyenne par an. En outre, les promoteurs déplorent dune offre de bureaux très majoritairement obsolète et pas au niveau des ambitions d’une grande capitale européenne : un handicap dans la compétition internationale pour l’accueil de sièges sociaux. Ils affirment ainsi que les bureaux de dernière génération de Triangle 2 constitueront une vraie réponse à cet enjeu d’attractivité pour la capitale.
Le promoteur Unibail prétend également que les bureaux que la Tour Triangle accueillera, bureaux de catégorie haut-de-gamme ne se placent pas sur le même marché que celui en crise, et que la demande dans ce cas est réelle.
Ces informations nous ont été confirmées lors d’un entretien en 2016 avec Vincent Jean-Pierre, directeur du développement bureaux pour Unibail-Rodamco. En ce qui concerne le marché des bureaux à Paris, qui propose déjà plusieurs milliers de mètres carrés de bureaux dans la capitale, ces bureaux disponibles sont selon lui dispersés, en mauvais état et ne disposent pas de l’aspect premium qu’aura la Tour Triangle, ce qui est très susceptible d’attirer de grandes entreprises.
Sur cet aspect-là, les promoteurs reçoivent également le soutien du MEDEF qui estime que cette offre supplémentaire fluidifiera le marché. En Mai 2014, le MEDEF affirme que “Paris manque de mètres carrés de bureaux disponibles” avec un “taux de vacance de 4.5%” qui est “en dessous du taux nécessaire à la fluidité du marché estimé à 6-8% par les acteurs de l’immobilier des bureaux ».
Ainsi, même si une telle surface de bureaux semble justifiée pour le promoteur, celui prend en compte les différentes oppositions. Depuis le rejet par le Conseil de Paris, le 17 novembre 2014, du projet, le nouveau projet, Triangle 2 diminue drastiquement la surface de bureaux prévue puisque près de 10.000 m² sont déprogrammés (principalement pour héberger de nouveaux espaces publics réclamés par les élus). La surface totale de bureaux dans la Tour atteint désormais 69 900 m².
Crédit photo (c) lepoint.fr