Les statuts

Brève histoire des fonctionnaires

La fonction publique française a beaucoup évolué au cours de l’Histoire du pays et en est aujourd’hui une de ses spécificités par rapport aux autres nations. En effet, lorsque l’on parle communément de « fonctionnaire », on entend généralement par-là « agent de la fonction publique », ce qui prête déjà à confusion. En effet, une partie non négligeable des agents de la fonction publique ne sont pas des fonctionnaires, bien qu’ils travaillent au service de l’Etat, mais plutôt des contractuels en CDD, en CDI, ou bien sous un autre type de contrat. Il est donc nécessaire de reprendre l’évolution de cette définition du fonctionnaire au cours de l’Histoire.

Les premiers fonctionnaires datent de l’Ancien Régime. Il s’agissait alors de baillis et de personnes en charge de l’administration. C’est véritablement sous la monarchie de juillet que la fonction publique se développe et commence à ressembler à la fonction publique actuelle. Les fonctionnaires sont alors essentiellement l’équivalent de nos hauts fonctionnaires modernes. (Desrosières, A. “Historiciser L’action Publique : l’Etat, Le Marché et Les Statistiques,” 2003.)

Pendant la IIIème République, le gouvernement commence à essayer de définir précisément le statut de fonctionnaire, pour essayer de les comptabiliser et définir leurs droits exacts. La Première Guerre Mondiale vient mettre un terme à ces premiers efforts.

Une première définition du statut de fonctionnaire est proposée par le régime de Vichy, qui pouvait permettre d’en évaluer le nombre, mais elle est annulée en 1944. Il faut attendre 1952 pour voir la fonction publique territoriale, 1955 pour la fonction publique hospitalière et 1959 pour la fonction publique d’État. Le statut de fonctionnaire est ainsi pour la première fois adopté.

Cependant, même si le statut de fonctionnaire est plus ou moins définitivement défini dans les années 1950, l’évaluation de leur nombre n’en est pas tellement simplifiée. En effet, la fonction publique n’emploie pas de personnel sous un seul type de contrat qui serait celui de fonctionnaire. En effet, si des personnes sont employées sous les statuts précédemment définis des trois types de fonctions publiques,  d’autres travaillent pour l’État sous des CDD (notamment dans la FPT), des CDI, mais il y a aussi des hauts fonctionnaires (qui sont souvent nommés à leur poste par le gouvernement ou ses représentants, et qui sont soumis à des règles différentes des fonctionnaires titulaires), les personnels employés par les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC, du type RATP, SNCF, Poste, et qui sont plus proches des salariés du privé par leur contrat), par les établissements publics à caractère administratifs (EPA, X par exemple, qui sont eux aussi assez proches des fonctionnaires titulaires), etc.

À cela il faut ajouter que les fonctionnaires sont encore divisés en trois catégories (A, B ou C) qui correspondent en quelques sortes à leur « grade », elles-mêmes divisées en sous-catégories.

Tout cela fait un très grand nombre de catégories, et si les capacités des organismes compétents pour compter le nombre de fonctionnaires ont évolué, il reste matériellement impossible d’en évaluer le nombre exact puisque pas moins de 20% sont des contractuels.

« En 2005, le ministre de la Fonction publique affirme ainsi que son ministère « ne sait pas trop » combien il y a de fonctionnaires. »[1]

Une nouvelle question se pose donc, celle de la manière de compter les fonctionnaires et d’utiliser les chiffres. En France, c’est l’INSEE qui produit ces derniers.

 

[1] Ruiz, É. (“Counting: The invention of civil servant statistics in France (1890-1930).” Sociologie du Travail 52, no. 2, 2010.)