M. Yves Cochet : Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, mes chers collègues - peu nombreux -, notre groupe a effectivement souhaité qu'il y ait un débat sur la sécurité ou la vulnérabilité du système électrique français, car, depuis plusieurs années, celui-ci montre ses faiblesses ; ce fut le cas au début de l'année 2010, mais aussi en 2009. Ce sera peut-être également le cas - nous avons des raisons de le craindre, j'y reviendrai - au cours des prochaines années. Ainsi, des dizaines de milliers, sinon des millions, de foyers, des dizaines de milliers, sinon des millions, de nos concitoyens ont été privés d'électricité pendant plusieurs jours en raison d'aléas climatiques qui, d'après ce que nous savons, ne cesseront probablement pas de se multiplier.
Le samedi 24 janvier 2009, une violente tempête a secoué la France. Le Sud-Ouest, particulièrement touché, a déploré jusqu'à 1,7 million de foyers privés d'électricité. Selon le gestionnaire RTE - le réseau de transport d'électricité - 118 lignes à haute et très haute tension et 93 postes de transformation ont été hors service au plus fort de la crise. Les lignes à basse et moyenne tension ont également subi de graves avaries.
Malgré la rapidité et l'ampleur des moyens mis en œuvre par les agents d'EDF, de RDF et de RTE, il a fallu plus d'une semaine pour rétablir l'électricité partout. Pourtant, cette tempête avait été annoncée par Météo France. On ne peut donc que constater l'extrême fragilité du réseau électrique français face aux aléas climatiques.
Ainsi, aujourd'hui, il fait froid. Nous verrons ce qui se passera entre dix-huit heures et vingt heures, au moment où la consommation sera la plus forte. Au début de cette année 2010, des milliers de familles provençales ont été privées d'électricité jusqu'à quatre jours consécutifs pendant une vague de froid, comme celle que nous connaissons aujourd'hui.
Nous avons même entendu des responsables d'EDF appeler les Provençaux et les Bretons à réduire leur consommation électrique, alors que, depuis une quarantaine d'années, un matraquage publicitaire fait par EDF les a incités à s'équiper en chauffage électrique, lequel est l'un des facteurs de la fragilisation du système électrique français. EDF stigmatise les familles qui ont suivi ses propres recommandations : c'est scandaleux ! Le système électrique français est beaucoup trop vulnérable, pour trois raisons principales.
Premièrement, l'enfouissement des lignes à basse et moyenne tension, ainsi que des lignes à haute et très haute tension, est insuffisant, par rapport à des pays comme l'Allemagne, où l'impact des aléas climatiques est fortement réduit. Je ne fais qu'évoquer le problème du coût, car nous pourrons en parler davantage au cours du débat.
Deuxièmement, la concentration de la production électrique sur de grosses centrales, notamment nucléaires, est excessive. Ceci implique la nécessité d'entretenir un réseau important de lignes à haute et très haute tension qui, quand elles sont touchées, affectent des populations importantes. Le réseau est, en principe, maillé, un peu comme l'internet, mais il est beaucoup moins résilient, et lorsqu'une ligne tombe...
M. Jean-Claude Lenoir (Premier médiateur national de l'énergie) : Internet va en Chine !
M. Yves Cochet: Heureusement, nous n'exportons pas d'électricité en Chine !
Lorsqu'une ligne tombe, il peut y avoir un effet de dominos - un tel incident s'est produit en Allemagne -, c'est-à-dire que l'ensemble du réseau peut basculer. Là réside la fragilité de la région PACA et de la Bretagne. On n'est pourtant jamais en bout de ligne dans un réseau maillé. Or il s'agit là d'un réseau dont la topologie est différente, d'un réseau arborescent. Dans ce cas, si l'on est derrière la feuille du réseau, la ligne est coupée.
Un troisième argument porte sur la trop grande utilisation du chauffage thermique, qui n'est qu'assez peu pertinente vis-à-vis de la controverse présentée.
M. Cochet initie ici un débat où il critiquera la concurrence car elle favorise les dysfonctionnements qu'il pointe dans ses deux premiers arguments.