L'ouverture à la concurrence
du marché de l'électricité en France

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Le noeud politique :

Comment sont perçus par les parties prenantes et en particulier l'opinion publique les bouleversements liés à l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité ?

Que prévoient les lois et les codes?

L'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité s'inscrit dans une politique plus large de libéralisation des marchés de l'énergie. Les directives en vigueur, sont les directives du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel. Ces directives ont pour objectif de construire un "marché intérieur de l'énergie" à l'échelle de l'Union européenne. Cela consiste à passer de plusieurs marchés nationaux fonctionnant indépendamment les uns des autres à un seul marché européen intégré. Les directives européennes prévoient :

Actuellement, c'est la directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité qui est en vigueur dans l'U.E. Elle établit des règles communes concernant la production, le transport et la distribution d'électricité et définit les modalités d'organisation et de fonctionnement du secteur de l'électricité, l'accès au marché, les critères et procédures liés aux appels d'offres , aux autorisations et à l'exploitation des réseaux.

Lignes directrices :

Calendrier d'ouverture des marchés de l'électricité :

Indépendance des gestionnaires de réseaux : pour garantir un accès non discriminatoire au réseau, il est nécessaire de dissocier l'activité de réseau (monopole naturel) des autres activités des entreprises verticalement intégrées (production, approvisionnement).

Renforcement du rôle des autorités de régulation : afin d'assurer l'absence de discrimination, une concurrence effective et le fonctionnement efficace du marché, les compétences minimales dont doivent disposer les autorités de régulation sont les suivantes : Il leur incombe la surveillance et, si nécessaire, une intervention dans les domaines suivants :

Les autorités de régulation doivent également être en mesure de régler les différends entre les gestionnaires de réseaux et leurs utilisateurs et d'imposer des sanctions aux entreprises qui ne respecteraient pas leurs instructions. Les autorités de régulation doivent approuver les normes d'exploitation et statuer sur des dérogations aux règles normales d'accès pour de nouveaux investissements dans les réseaux.

Création d'un comité des autorités de régulation européennes auprès de la Commission européenne , avec les objectifs suivants :

Elle comporte aussi des mesures visant à garantir la sécurité d'approvisionnement, les obligations de service public et la protection des consommateurs.

Pour plus d'information, vous pouvez consulter une synthèse plus détaillée et le texte officiel de la directive aux adresses suivantes.

Sources :
Source
Source

La commission publie un rapport annuel sur la situation de l'application de cette directive (Source).

La Commission a proposé en juillet 2007 un ensemble de nouvelles mesures visant à parfaire l'ouverture du marché de l'électricité jugée insuffisante. C'est le troisième paquet énergie. Il devrait entrer edn vigueur le 03/03/2011.

Il appelle notamment à :

Vous pouvez consulter l'ensemble des textes du troisième paquet énergie(Source)

Remarque : Une "directive du Parlement européen et du Conseil" est un acte normatif pris par les institutions de l'Union Européenne qui donne des objectifs à atteindre par les pays membres, avec un délai. Ce délai permet aux gouvernements nationaux de s'adapter à la nouvelle réglementation. Cependant, chaque pays est libre d'intégrer dans son droit national et d'appliquer ces directives de la façon qu'il souhaite. Pour la France, de 2000 à 2006, plusieurs lois ont transposé par étapes, en droit national, les directives européennes.

Voici les principales orientations des lois du 10 février 2000 et du 3 janvier 2003 modifiées par les lois du 9 août 2004, du 13 juillet 2005 et du 7 décembre 2006 :

L'accès non discriminatoire aux réseaux publics d'électricité est assuré par les gestionnaires des réseaux publics d'électricité. Il est garanti par l'application d'une tarification de l'utilisation de ces réseaux proposée par l'autorité de régulation.

Fourniture : Dans le secteur électrique, le ministre chargé de l'énergie délivre une autorisation de production (tacite pour les installations < 4,5 MW, expresse au-delà). Les pouvoirs publics peuvent lancer, si les objectifs de la programmation pluriannuelle adoptée par le gouvernement pour planifier le développement de la production ne sont pas atteints, un appel d'offres mis en œuvre par la CRE est lançé. Par ailleurs, l'activité d'achat pour revente est libre, sous réserve du dépôt d'une déclaration auprès du ministre chargé de l'énergie.

Dissociation comptable : Les opérateurs exerçant plusieurs activités au sein d'une même entreprise sont tenus d'établir dans leur comptabilité interne un compte séparé au titre de la gestion des réseaux de transport et de distribution.

Institution d'une autorité sectorielle et indépendante,la Commission de régulation de l'énergie, qui est chargée de la régulation des marchés de l'électricité et du gaz naturel.

Vous pouvez consultez les textes de loi(Source)

La prochaine étape législative dans l'application des directives européennes est la loi Nome, principalement inspirée des conclusions de la commission Champsaur (cf partie sur le nucléaire ). La loi NOME est censée entrer en vigueur le 1er juillet 2010 mais son examen prévu à l'Assemblée pour l'automne 2009 a été repoussé au printemps 2010, laissant planer le doute sur la date de sa mise en œuvre effective.

Elle prévoit un réaménagement des tarifs réglementés pour les professionnels. Elle prévoit aussi le partage de l'électricité nucléaire entre les fournisseurs. EDF se verrait contraint de céder l'électricité à ses concurrents à un prix inférieur à celui qu'il pratique actuellement. La loi NOME fixerait ces conditions pour une période transitoire allant du 1er juillet 2010 au 21 décembre 2025. Le volume maximal et le prix de cession seraient fixés chaque année par les ministres en charge de l'économie et de l'énergie, après avis de la CRE. Elle prévoit de lier le prix de cession au coût d'exploitation des centrales nucléaires (y compris les coûts d'investissements). La loi NOME élargirait les compétences de la Commission de Régulation de l'Énergie.

La dernière version de la loi Nome est disponible(Source)

Dans l'état actuel des choses, les consommateurs particuliers peuvent souscrire des offres à un tarif régulé fixé par les pouvoirs publics ou des offres à un tarif de marché. Seul EDF propose des offres avec le tarif régulé et il est possible de revenir à une offre avec des tarifs régulés jusqu'au 30 juin 2010 pour les particuliers ayant souscrit à une offre de marché. Pour ce qui est des consommateurs professionnels, la situation est plus complexe car il existe plusieurs types de tarifs réglementé suivant la taille de l'entreprise, mais la situation est globalement similaire, notamment concernant la possibilité de retour à un tarif de marché...

Les consommateurs sont-ils convenablement informés et protégés des implications de la libéralisation du marché de l'électricité ?

Depuis l'ouverture à la concurrence du marché de l'électricité, les consommateurs particuliers et industriels peuvent changer de fournisseur d'électricité librement. Mais au 31 décembre 2009, plus de deux ans après l'ouverture du marché pour les particuliers, seuls 4,6% des consommateurs résidentiels et 7,5% des consommateurs non-résidentiels ( industriels et collectivités territoriales ) avaient opté pour un fournisseur alternatif ( source : Observatoire des marchés pour la CRE du 4ème trimestre 2009 ).

Ces chiffres dénotent-ils un manque d'information et une indifférence des consommateurs ou une défiance envers les nouveaux acteurs du marché de l'électricité. Les enquêtes d'opinion semble confirmer un désintérêt des français pour la question de la concurrence dans le domaine de l'électricité ( source : 6ème baromètre FNCCR-IFOP «les Français et l'énergie» pour 2009 ), voire un mécontentement vis-à-vis de l'évolution de la qualité du service. Comment expliquer cet état de fait ? L'information sur les droits des consommateurs est-elle suffisamment claire ?

L'avis des consommateurs ( basé sur l'enquête d'opinion menée par l'IFOP pour la FNCCR « Les français et l'énergie et sur l'enquête menée par LH2 pour la CRE « baromètre septembre 2009 »)
Les consommateurs résidentiels

En 2009 :

  • 40% connaissent leur droit à changer de fournisseur. Ce chiffre n'a pas progressé depuis l'année 2008. Paradoxalement, 56% des foyers se sentent aujourd'hui bien informés sur l'ouverture à la concurrence des marchés de l'électricité (7% de plus qu'en 2008).Le décalage entre le sentiment de connaissance et la véritable connaissance est donc frappante. Information de la population en 2009
  • 47% des français savent qu'il existe un service d'information des consommateurs proposé par les pouvoirs publics.
  • 95% des consommateurs ne souhaitent pas changer de fournisseur.
  • 8 foyers sur 10 disent ne pas connaitre la marche à suivre pour changer de fournisseur d'énergie.
  • La possibilité de revenir aux tarifs réglementés après avoir testé le marché est plébiscitée par 75% des Français. Les fournisseurs alternatifs les mieux connus sont Poweo et Direct énergie , dont la notoriété a fortement progressé depuis un an.
  • 61 % des foyers français estiment que l'ouverture à la concurrence est une bonne chose ( +2% depuis 2008 ). Dans le même temps, la part des foyers estimant que l'ouverture à la concurrence est une mauvaise chose est passée de 13% à 18%.

Les consommateurs non-résidentiels

La connaissance du marché est meilleure que pour les particuliers : 9 chefs d'entreprises sur 10 savent que les marchés sont ouverts à la concurrence, mais ils ne sont que 17% à comparer les offres. Malgré cela, 56% seulement s'estiment bien informés sur la question.

Peu souhaitent changer de fournisseur : 4% des maires et 6% des chefs d'entreprise.

Les professionnels pensent majoritairement que l'impact de l'ouverture devrait être globalement neutre pour leur activité. A noter que les deux sondages divergent sensiblement sur ce point qui est pourtant clé, le sondage IFOP soutient que 85% des industriels pensent que la libéralisation n'a pas d'impact sur leur activité alors que le sondage LH2 indiquent 55% seulement.

Le démarchage des fournisseurs s'essouffle. Seuls 26% des chefs d'entreprise ont été contactés récemment, contre 33% en 2008. Il reste encore 9% de chefs d'entreprises qui ignorent la possibilité de changer de fournisseur.

Réseaux: dégradation de la qualité

Les Français (grand public, entreprises, maires) perçoivent une dégradation de la qualité de service, qui devient préoccupante s'agissant de la rapidité d'intervention et de la compétence des interlocuteurs en cas de problèmes. Ainsi, la perception de variations de tension oscille entre 11 et 16% selon les populations concernées. La perception de micro-coupures oscille de 10% (chefs d'entreprises) à 19% (chez les maires). S'agissant des coupures longues (plus de 1 minute), 5% des Français en ont vécu «souvent» (7% des maires). Du côté des élus, une progression forte de l'insatisfaction est à observer.

Sources :
Source
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L'avis de la commission européenne, de la CRE et des observatoires des marchés

Ils reconnaissent dans leur bilan annuel d'étude du marché qu'une meilleure connaissance du marché libéralisé de l'électricité pour les consommateurs est une condition importante à un meilleur fonctionnement des marchés concurrentiels de l'électricité. La commission européenne déplore par ailleurs le manque de transparence quant à l'avancée de l'installation des marchés libéralisés dans certains pays européens. Des initiatives ont été engagées pour pallier ce problème de connaissance insuffisante des consommateurs de leur droit comme le forum des consommateurs européens pour l'énergie et des campagnes d'informations nationales ou européennes.

La commission européenne insiste principalement sur la nécessité de factures d'électricité plus claires pour rendre la comparaison des tarifications plus aisée, facteur clé selon elle pour une meilleure appréhension et une plus grande confiance dans le marché.

L'avis de la Fédération syndicale européenne des services publics (FSESP/EPSU)

Elle critique les dispositions de la commission européenne concernant la protection des consommateurs qu'elle juge insuffisante et en particulier la charte des consommateurs d'énergie.

Elle estime que :
  • La concurrence sur le marché de l'électricité ne constitue pas la meilleure protection pour les ménages. Les tarifs appliqués aux ménages devraient rester réglementés. Ils devraient être justes et raisonnables et fondés sur les coûts. Cette option devrait être explicitement laissée aux États membres.
  • La charte devrait avoir un caractère contraignant.
  • L'accès à un bouquet énergétique est un droit fondamental. Les coupures doivent être interdites.
  • La commission européenne doit préciser clairement que le rôle de la Commission et des États membres est de protéger les utilisateurs et de ne pas confondre les rôles et les responsabilités en rejetant le soin de veiller au bon fonctionnement du marché sur les consommateurs, les partenaires sociaux et d'autres organisations.
  • Il n'existe pas de mesures de protection contre l'absence de mesures, de la part de l'industrie, pour prévenir les problèmes de sécurité de l'approvisionnement, les pannes de réseau, le manque d'investissement, etc.
  • La commission européenne doit préciser clairement que le rôle de la Commission et des États membres est de protéger les utilisateurs et de ne pas confondre les rôles et les responsabilités en rejetant le soin de veiller au bon fonctionnement du marché sur les consommateurs, les partenaires sociaux et d'autres organisations.
  • Il n'existe pas de mesures de protection contre l'absence de mesures, de la part de l'industrie, pour prévenir les problèmes de sécurité de l'approvisionnement, les pannes de réseau, le manque d'investissement, etc...
  • La Commission continue à nier les preuves montrant que le marché intérieur de l'électricité et du gaz a une incidence négative sur les ménages et qu'il devrait être revu.

Sources :
Source
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L'avis de UFC-Que choisir.

L'UFC-Que choisir dénonce un arsenal législatif qui organise l'extinction progressive des tarifs réglementés en manipulant le consommateur. L'UFC-Que choisir en effet farouchement le maintien des tarifs règlementés en France tels qu'ils s'appliquent à l'heure actuelle en vertu des spécificités du marché français. Cependant, ces tarifs sont voués à disparaître, même si un sursis leur a récemment été accordé. L'UFC-Que choisir considère le dispositif de réversibilité totale ( possibilité de revenir à une offre au tarif régulé après avoir souscrit une offre au tarif de marché) comme « sournois ». Selon elle, le tarif régulé joue le rôle d'un prix plafond qui oblige les fournisseurs à s'aligner pour espérer capter de la clientèle. Le jour ou le tarif régulé disparaît, tous les fournisseurs fixeront leurs prix au niveau « naturel » du marché, c'est-à-dire 30 % à 40 % plus chers qu'aujourd'hui. Ainsi, alors que les consommateurs n'ont objectivement aucun intérêt à quitter le tarif réglementé, la réversibilité totale est destinée à les inciter à basculer sur un marché qui ne peut pas, en réalité, être compétitif à terme. Si la manœuvre n'est pas comprise des consommateurs et que, momentanément sécurisés, ils cèdent à la tentation de ce basculement, cela permettra aux fournisseurs, à la CRE et aux pouvoirs publics de justifier la suppression des tarifs réglementés. Pour l'UFC-Que choisir, il est donc clair que la réversibilité totale n'est pas une mesure en faveur des consommateurs, mais destinée à affaiblir le tarif réglementé pour mieux le supprimer. UFC-Que choisir a aussi dénoncé une protection insuffisante des consommateurs contre les démarchages agressifs, les ventes forcées et les clauses abusives dans les contrats souscrits par certains opérateurs. (Source)

Le morcellement de EDF ne pose-t-il pas problème ?

EDF était avant le processus de libéralisation l'entreprise qui exploitait le monopole dans le domaine de l'électricité. Les exigences d'un marché libéralisé de l'électricité ont provoqué un grand chamboulement de la structure de l'entreprise.

La loi du 9 août 2004 a transformé EDF EPIC ( Etablisssement public à caractère industriel ou commercial ), en EDF Société anonyme. RTE EDF Transport est depuis le 1er septembre 2005 une filiale d'EDF. ErDF, le gestionnaire de distribution, a également fait l'objet d'une filialisation. De plus, les concessions historiques de EDF des centrales nucléaires notamment sont sur le point d'être remise en cause car un marché complètement libéralisé implique un accès équitable à ces concessions pour tous les producteurs. Mais une partie de l'opinion publique ressent ce « morcellement » de façon négative et l'assimile à une dilapidation du patrimoine de l'entreprise.

L'avis de la commission européenne de l'énergie.

Dans le processus de libéralisation engagé en Europe, la séparation la plus effective des activités de production, transport, distribution et fourniture est nécessaire. D'une part, le transport et la distribution est une activité en monopole naturel alors que la concurrence doit porter sur les activités de fourniture et de production. D'autre part, Dans un discours concomitant à la mise au point du 3ème paquet énergie en février 2007 le commissaire de la commission européenne de l'énergie a clairement fait savoir qu'il privilégie la séparation des activités de production et de distribution des entreprises énergétiques comme étant le meilleur moyen de garantir une concurrence juste et profitable au consommateurs. Il identifie le dégroupage comme un critère indispensable au bon fonctionnement du marché libéralisé de l'électricité. Qu'une entreprise contrôle à la fois les activités de production, de distribution et de vente pose de sérieux conflits d'intérêts. En effet, permettre un accès non-discriminatoire au réseau à des concurrents, point crucial du marché libéralisé de l'énergie ne sert pas toujours au mieux les intérêts d'autre secteurs de l'entreprise. Des enquêtes ont révélé de nombreuses pratiques visant à empêcher l'installation de concurrents sur certains réseaux par le biais de termes discriminatoires de raccordement de nouvelles centrales sur le réseau. Les entreprises intégrées verticalement sont censées mettre en place des barrières pour l'information entre les branches de distribution et de vente mais dans les faits on observe que la faiblesse de ces barrières offre un avantage à ces entreprises. Les entreprises voulant investir dans les énergies renouvelables se heurtent à un accès inéquitable au réseau. De plus, ces conflits d'intérêt internes nuisent aux investissements d'interconnexion efficace des réseaux car si ces investissement doivent permettre plus de sécurité du réseau et plus d'approvisionneurs ( de quoi faire baisser les prix ), les producteurs d'énergie locaux profitent parfois de capacité d'interconnexion trop faible pour maintenir des prix anormalement élevés. À l'inverse, les opérateurs dégroupés montrent des volontés d'investissement dans les interconnexions beaucoup plus franches car leur préoccupation première est l'optimisation du réseau.

Ces raisons poussent la commission européenne à considérer le dégroupage total comme la solution la plus efficace aux problèmes de discrimination et d'interconnexion. L'option ISO du 3ème paquet énergie permet d'avancer face au statu quo mais ne sera pas aussi efficace que le dégroupage total et se fera au prix d'une régulation également d'autant plus complexe (Source).

L'avis d'EDF

Suite à l'adoption du troisième paquet énergie, le CEE de EDF a rendu public cette résolution adoptée à l'unanimité :

«L'Europe, via la commission européenne avec son projet de troisième directive sur l'énergie veut poursuivre la libéralisation du secteur.

Cette politique a montré depuis le début qu'elle était :

  • Contre l'intérêt des citoyens, car les prix de l'énergie subissent une hausse constante.
  • Contre l'intérêt des salariés avec la suppression de centaines de milliers d'emplois dans les entreprises de l'énergie.

La commission européenne , au travers son troisième paquet, n'empêchera en rien la flambée des prix pour les usagers, et ne fait que poursuivre la politique de détérioration des emplois dans les entreprises.

Les membres du CEE d'EDF s'opposent à cette nouvelle directive qui prône la séparation patrimoniale, et de fait, la fin de tous les tarifs réglementés.

Les membres du CEE d''EDF appellent l'ensemble des citoyens européens usagers de l'énergie, l'ensemble des salariés européen de l'énergie, à signer massivement la pétition lancée par les organisations syndicales européennes, pour dénoncer les conséquences néfastes de la libéralisation du secteur.»

(Source)

L'avis de la Fédération syndicale européenne des services publics (FSESP)

Le dégroupage total des anciens monopoles verticalement intégrés pronés par le troisième paquet énergie est vivement critiqués par la FSESP. Elle s'appuie sur les travaux de plusieurs économistes dont Steve Thomas de l'University de Greenwich et du Pr.Florio de Florence pour affirmer que l'impact assessment du paquet législatif est mal étayé. Par exemple, ils affirment que les arguments qui consistent à dire que les opérateurs de gestion de réseau seront réticents à investir si ils ne sont pas dégroupés n'ont pas de fondement économique.

La FSESP remarque que les syndicats et les représentants du personnel rapportent un effet négatif du dégroupage dans les entreprises concernées en particulier en terme de suppression de poste, de dégradation des perspectives de carrière et des droits de particpation des employés. Elle diminue également les possibilités de restructuration des entreprises et donc leur capacité d'adaptation et augmente le risque que des entreprises avec une connaissance insuffisante du secteur et une implication moins grande que celle des grandes entreprises traditionnelles occupent des positions cruciales de gestion du réseau et de production.

Our experience is that a restructuring is used to cut jobs, not to create new and additional jobs.

(Source)

L'avis de la CGT-FNME

On assiste à un véritable dépeçage du patrimoine industriel de EDF qui s'inscrit dans un mouvement plus large de bradage du service public en France notamment sous l'impulsion de l'union européenne. La concurrence ne se fera que pour le bénéfice du secteur privé qui va s'accaparer les installations industrielles de production d'électricité et sur le dos des consommateurs, notamment ceux aux plus bas revenus.

La CGT s'oppose à une logique de privatisation de la filière. Elle refuse aujourd'hui le pillage de cet actif collectif que sont les grandes entreprises nationales de l'énergie, leurs moyens de production, leurs capacités de recherche.

La libéralisation du marché et ses conséquences économiques transforment un groupe industriel en centre de profits pour son actionnaire majoritaire. A force d'investir à tout va en Europe EDF a abandonné les nécessaires investissements sur le territoire national. Si certains se félicitent des résultats du groupe EDF portés par l'international, pour la CGT, c'est au détriment des réseaux français que cela s'est fait par l'absence de politique d'entretien et d'investissements préventifs (Source).

La libéralisation du marché de l'électricité est-elle compatible avec ce qu'on pourrait appeler la mission de service public concernant la fourniture d'électricité ?

La notion de service public désigne juridiquement l'ensemble des activités exercées par la puissance publique dans le but de satisfaire des besoins sociaux devant être disponibles pour tous. Les activités d'un service public sont soumises sur certains points à un régime juridique spécifique. Il est important de remarquer qu'une collectivité publique a le choix entre :

  • Assumer directement un service public
  • Déléguer sa gestion à un organisme spécifique du secteur public ou à un organisme privé.

Concernant les fonctions de service public remplies par le secteur public, on distingue de ce fait :

  • celles qui relèvent des fonctions régaliennes, liées à la souveraineté de l'État,( maintien de l'ordre, armée )
  • celles qui relèvent du secteur administré ou du secteur marchand mais que le secteur public a pris en main.

La raison généralement avancée dans ce dernier cas est un besoin d'intérêt général essentiel ou stratégique dont la nature est considérée non compatible avec le fonctionnement normal du marché. C'est le cas des activités de réseau ( routes , réseau électrique... à relier au concept de monopole naturel ).

Le service public ne fait en revanche pas partie des missions traditionnelles de l'UE. L'organisation du service public relève des États ou des collectivités locales. Toutefois, les instances de l'Union européenne ont été amenées à s'interroger sur les entreprises chargées d'un service public à cause du conflit potentiel entre le service public et le principe de libre concurrence, qui relève de l'U.E. La Commission a élaboré deux concepts jugés plus clairs que celui de service public :

  • les services d'intérêt général(SIG) : il s'agit de « services marchands et non marchands que les autorités publiques considèrent comme étant d'intérêt général et soumettent à des obligations spécifiques de service public
  • les services d'intérêt économique général (SIEG) : ce sont des « services de nature économique que les États membres ou la Communauté soumettent à des obligations spécifiques de service public en vertu d'un critère d'intérêt général. Cette notion couvre les industries de réseau comme l'électricité entre autre.

Dans le domaine de l'électricité, l'objectif de service public de fourniture d'électricité est une fourniture équitable du point de vue à la fois économique et géographique pour tous les consommateurs, et ceci à un prix raisonnable est généralement reconnue. Mais suivant les conceptions, les missions de service public incombant aux gestionnaire de réseau et aux fournisseurs sont plus ou moins contraignantes et ne sont pas forcément compatibles avec un marché libéralisé de l'énergie.

Le schéma décidé par les autorités politiques française en application de la législation européenne.

La concurrence dans le domaine de la fourniture et de la production n'empêche les missions de caractère public que la filière doit garantir. En ce qui concerne l'électricité, la loi définit le service public de l'électricité comme ayant « pour objet de garantir l'approvisionnement en électricité sur l'ensemble du territoire national, dans le respect de l'intérêt général ».

La majorité des missions de service public sont assurées par les gestionnaires de réseau de transport et de distribution d'électricité, à savoir ErDF et RTE. Plus spécifiquement, il leur incombe de : gérer le réseau public de transport d'électricité ie l'exploiter, entretenir et développer le réseau. Ils doivent traiter équitablement tous les utilisateurs du réseau. Ils doivent aussi garantir l'approvisionnement en électricité de la France : RTE doit alerter le ministre de tutelle en cas de détection d'un déséquilibre possible entre la consommation d'électricité et les capacités de production. Ils doivent garantir la sûreté du système électrique français en analysant l'évolution de l'équilibre offre-demande d'électricité. RTE a la responsabilité de décider des délestages (coupures de l'alimentation de certains clients) nécessaires, sur lesquels une information doit être diffusée le plus tôt possible. Enfin, RTE doit faciliter et sécuriser les échanges d'électricité avec les pays voisins.

En ce qui concerne EDF, les obligations de service public tiennent à l'achat de l'électricité produite à partir d'énergies renouvelables, de la participation aux éventuels appels d'offres lancés par l'Etat pour compenser un déséquilibre entre l'offre et la demande et de la mise en œuvre d'un programme de recherche-développement, ainsi que des engagements en termes de sûreté de ses installations, en particulier nucléaires, de préservation de l'environnement et de transparence.

Par ailleurs, la CSPE ( charge de service public de l'électricité ) a été mise en place pour rétribuer les distributeurs d'électricité (EDF principalement) pour les éventuels surcoûts liés à la mission de service public qui leur incombe. En particulier, cela concerne trois aspects :

  • l'obligation d'achat de l'électricité produite par les énergies renouvelables,
  • le surcoût de la production électrique dans certaines zones îliennes non connectées au réseau,
  • les aspects sociaux de la fourniture d'électricité, liés à son classement en « produit de première nécessité».
L'avis de la CGT-FNME

L'énergie est un bien indissociable du développement humain, une ressource nécessaire - et indispensable - au même titre que l'eau. La précarité énergétique est en augmentation constante. Elle concerne désormais entre deux et cinq millions de Français.

Les inégalités sociales, économiques et territoriales existante entre foyer pauvres et aisés, ville et campagne, entre les régions ( La Bretagne est une région très fragile d'un point énergétique ) risquent fort de s'aggraver si on confie les missions de service public lié à l'électricité à des entreprises du secteur privés. Car le service public français de l'électricité et du gaz est l'objet d'un véritable dépeçage au bénéfice du secteur privé.

La déréglementation du secteur énergétique nuit aux usagers, et aux salariés et elle n'est pas capable de permettre un accès équitable au réseau et un prix raisonnable : pour preuve, le niveau moyen des prix de l'électricité sur les marchés européens est supérieur aux tarifs régulés, ce qui démontre qu'une gestion saine par l'état des tarifs est plus profitable car alors les prix sont véritablement fixés en fonction des coûts de production et de renouvellement des structures. En revanche les logiques libérales des entreprises ont toujours poussé à ce que les investissements financiers prennent le pas sur ceux utiles à l'outil de production… En ce qui concerne le nucléaire, la situation est encore plus critique : l'acceptabilité de la filière est indéfectiblement liée à sa propriété publique : l'État est garant de son fonctionnement et de sa sûreté (Source).