Le jour où l'Etat me donne 10 000 fois ce qu’il donne à l’université, je supprime complètement les droit de scolarité : complètement.

Richard Descoings, ancien directeur de Science Po Paris

...du modèle X-ENS

Si les précédents articles traitent d’une possible augmentation des droits de scolarité pour les étudiants de l’enseignement supérieur, le cas de quelques écoles n’a pas été évoqué jusque là. En effet, les élèves de l’école Polytechnique et des ENS (Écoles Normales Supérieures) jouissent d’un statut particulier, leur garantissant une rémunération tout au long de leurs études.


 

 

Polytechniciens en uniforme


Alors que l’engagement financier à deux vitesses dont fait preuve l’Etat fait débat (15 000 € en classe préparatoire contre 8 000 € par élève à l’université), les études des polytechniciens et normaliens sont non seulement financièrement prises en charge par l’Etat mais également assorties d’une rémunération. Un salaire mensuel de 1 300 € nets est accordé aux normaliens.  Les polytechniciens touchent, quant à eux, une solde mensuelle d’environ 700 €. Notons que ce ne sont pas les seules écoles à rémunérer leurs étudiants : l'ENA ou les ITPE le font également.

 

Comment se justifie cette étonnante singularité ?

 

Au cours de leur scolarité dans une ENS, les normaliens acquièrent le statut de fonctionnaire stagiaire et s’engagent à servir l’Etat pendant au moins 10 ans à compter de leur date d’entrée à l’école. Cet “engagement décennal”, instauré sous Napoléon Ier, est assortie du salaire précédemment évoqué en tant qu’attribut du statut de la fonction publique.


Les élèves français de l'Ecole Polytechnique servent sous statut militaire dans les conditions fixées, ils souscrivent un engagement spécial en qualité d'élève officier de l'école pour une durée égale au temps de la scolarité et sont tenus de servir l’Etat pendant 10 ans au terme de leur formation.

 

Peut-on se soustraire au devoir de servir l’Etat une fois la formation achevée ?



A l’ENS, avant que la Cour des Comptes n’ordonne de mener systématiquement les suivis d’anciens élèves, les règles de remboursement de la scolarité (en cas de rupture de l’engagement décennal) n’étaient appliquées que pour les diplômés qui signalaient leur passage dans le secteur privé. Les textes indiquent donc qu’il est possible de ne pas honorer sa promesse d’engagement décennal à condition d’être prêt à rembourser à l’Etat le coût de ses études.


Les décrets définissant le statut des polytechniciens indiquent que si les 10 années (à compter de la date de sortie de l’école) de service auprès d’un corps de l’Etat ne sont pas observées, une commission interne examinera le dossier des “pantouflards” (démissionnaires de la fonction publique avant 10 ans de service) et leur précisera la somme à rembourser en tenant compte des soldes versées et de la gratuité de la formation dont ils ont bénéficié. Si certains pantouflards remboursent déjà les frais de scolarité à hauteur de 45 000 €, dans la pratique, la menace rentre rarement à exécution.

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