La suppression de la population de moustiques n’est pas seulement dommageable pour les rôles qu’elle assumait dans l’écosystème, mais elle l’est également pour son équilibre. Des chercheurs brésiliens indépendants rappellent que la niche écologique occupée par l’Aedes Aegypti serait libérée, même localement, si son élimination était quasi-totale. Elle pourrait alors être occupée par d’autres espèces, peut-être plus virulentes et résistantes à des technologies OGM [16].
Cela n’est pas une certitude, mais est un risque suffisant pour questionner le bien-fondé de l’opération, ce que ne se prive pas de faire l’ONG GeneWatch [1]. La principale préoccupation est, selon plusieurs chercheur indépendants, la place que prendrait le moustique Aedes Albopictus, également vecteur de transmission de la dengue, mais à un degré bien moins important que l’Aedes Aegypti.
L’Aedes Albopictus est par ailleurs présent dans la liste des espèces les plus invasives du monde de la Global Invasive Species Database dressée par 235 scientifiques du monde entier, experts sur le sujet.
Cependant, Oxitec, qui a également développé une version de sa technologie pour ce deuxième moustique, assure que ce problème s’il se présente, sera géré en temps et en heure, et que sa réalisation ne pausera pas plus de problèmes que l’éradication de l’Aedes Aegypti (entretien avec M. Hadyn Parry, directeur général d’Oxitec, 30 avril 2014).
Oxitec a réalisé deux tests principaux sur la place du moustique Aedes Aegypti dans la chaine alimentaire, dont un démontre l’impact nul sur la santé des prédateurs du moustiques, lorsque ceux-ci les ingèrent [7].
Ces test effectués en 2013 font partie de l’effort, reconnu par plusieurs détracteurs [15], d’Oxitec pour prendre en compte les considérations écologiques de ce projet ; cependant la fin des tests en Malaisie, en 2009, a été marquée par l’usage massif d’insecticides qui ont éradiqué l’ensemble des espèces de moustiques localisées dans la zone de test, afin d’assurer la confidentialité de leurs recherches. Cela est pointé du doigt par la communauté scientifique, pour qui le manque de transparence porte un grand coup à la crédibilité de la science auprès du grand public.
Cet usage d’insecticides pourrait également trahir un autre écueil, pointé du doigt par des recherches indépendantes [21] : la capacité de l’espèce Aedes Aegypti à développer, après plusieurs générations, une résistance à la technologie, et à se passer d’un antibiotique normalement nécessaire pour annihiler l’effet de ce gène, la tétracycline, pour survivre. C’est encore GeneWatch qui reproche à Oxitec de ne pas avoir étudié et quantifié cette éventualité [1, 37].
L’introduction d’OGM dans la nature fait partie des grands points de débat de société du XXIe siècle. Oxitec affirme avoir testé l’influence de plus de 100 générations de moustiques sur l’environnement, sans trouver quelque impact négatif que ce soit [33].
Cette volonté de transparence fait partie des éléments sur lesquels Oxitec travaille avec ses clients pour palier à des erreurs de communication, admises, par le passé : les résultats des test malaisiens (2009) demeurent, encore aujourd’hui, confidentiels.