L’implantation d’Oxitec au Brésil est de nature différente de celle aux Îles Caïmans et en Malaisie : elle marque la première fois que la technologie est commercialisée dans un pays. L’étude des possibilités alternatives a amené l’État de Bahia à privilégier les moustiques transgéniques face à la technologie australienne Wolbachia, par exemple.
L’efficacité de la méthode d’Oxitec a bien évidemment motivé ce choix [5], mais celui-ci relève également d’une volonté de la part du Brésil de profiter de l’expérience d’Oxitec et de devenir un pays à la pointe de la lutte OGM anti-vectorielle. Ainsi, une usine de production d’œufs de moustiques a été implantée sur place, contrairement aux autres lieux de test (îles Caïman, 2007 et Malaisie, 2009). L’entreprise Moscamed a été créée dans le but de faciliter les échanges entre Oxitec et le ministère de la santé brésilien et mène actuellement ses propres tests. Oxitec est en charge de lui apporter un soutien technique (entretien avec Hadyn Parry, directeur général d’Oxitec, 30 avril 2014).
Néanmoins, cette collaboration, revendiquée et assumée par les deux acteurs, marque la volonté d’industrialisation du Brésil, qui devient ainsi un des premiers pays au monde à employer cette technologie à grande échelle, et la vitrine des produits d’Oxitec. Comme le souligne la chercheuse brésilienne Luisa Reis-Castro, le Brésil ne voit plus d’intérêt à être uniquement bénéficiaire de technologies étrangères, mais plutôt cherche à faire partie des pays à la pointe de la recherche [10] : l’opportunité de s’inspirer d’une technologie étrangère illustre ce positivisme du pays vis à vis du progrès scientifique.
Enfin, la virulence de la dengue dans les pays considérés est également moteur dans la prise de décision ; le pragmatisme amène les autorités à choisir une méthode plutôt que de ne pas choisir, et ce quel que soit le niveau de développement du pays [11].