Entretien avec M. Pauwels, ingénieur spécialisé dans les projets hydroélectriques.
Bonjour, tout d’abord, nous aimerions savoir si Hydrowatt démantèle certaines de ses centrales ?
Non, Hydrowatt travaille sur 40 centrales mais aucune n’est à démanteler.
Aujourd’hui, existe-t-il des réglementations sur les constructions de barrages ?
Oui, mais pour l’instant, ce n’est pas encore mis en place partout. Il existe deux types de listes. La liste 1 concerne les rivières, fleuves ou lacs où on ne peut pas construire de nouveaux ouvrages, de nouvelles centrales. Les centrales existantes doivent par ailleurs permettre aux poissons de monter et de descendre le fleuve, par le moyen de passes à poissons par exemple. La liste 2 concerne les rivières où les centrales doivent obligatoirement assurer le transports des sédiments grâce à des vannes. C’est un débat entre énergéticiens et fédération de pêche, police de l’eau, qui classent les cours d’eau.
Qu’est-ce qui peut conduire à un démantèlement ?
Justement, sur ce genre de rivières ou fleuves classés, parfois les investissements pour les passes à poissons sont bien trop chères et il vaut mieux économiquement parlant les démanteler. A titre d’exemple, sur une de nos centrales au fil de l’eau de trois à quatre mètres de haut, l’étude, la construction des passes à poissons revient à 200 000 euros, même s’il existe des aides de l’état pour cette mise en place. Sur le barrage de Vézin, par exemple, ils ouvrent pour permettre le passage des poissons. Mais il y a d’autres facteurs à prendre en compte…
Quels sont les autres facteurs, justement ?
Les ouvrages ont différents usages : de la production d’électricité, à la rétention d’eau en passant par l’apport d’eau potable. Ces usages sont bien évidemment à prendre en compte pendant l’étude du démantèlement. Il faut également vérifier si économiquement et techniquement, ce démantèlement est possible. Parfois, déverser les sédiments qui se sont accumulés contre les barrages dans le fleuve est une vraie mauvaise idée.
L’administration joue donc un rôle important ?
Oui, c’est elle qui met en place les règles, qui sont parfois un peu ridicules. Par exemple, un jour, on a été obligé de construire une passe à poissons alors qu’une dizaine de mètre plus bas sur la rivière, les poissons ne pouvaient pas remonter le fleuve de toute manière. Les débats sont parfois difficiles à mener. D’autre part, certains habitants ont construit des moulins il y a des années, mais sans les passes à poissons qui sont très chères, et se voient dans l’obligation de les détruire, alors que le moulin permet de réguler le niveau de l’eau, et les habitations à proximité risquent de voir leur jardin inondé.
Lorsque vous construisez de nouveaux barrages, pensez-vous au démantèlement ?
Non, pas du tout. Quand vous construisez un barrage, il faut entre 40 et 60 ans pour le rentabiliser, donc il peut rester une centaine d’année. On ne pense donc pas au démantèlement au moment de le construire.
Quels sont les avantages du démantèlement ?
Pour les gros barrages qui datent d’une soixantaine d’année, le milieu aquatique s’est développé et a repris son droit. De nouvelles espèces sont apparues. Leur suppression entraîne de forts impacts environnementaux à étudier. La réadaptation peut être délicate.
Les sédiments risquent de se déposer sur les frayères, où les poissons pondent leurs œufs. Par ailleurs, les centrales en aval risquent de récupérer beaucoup de sédiments, détériorant les turbines. On ne peut pas savoir exactement, chaque cours d’eau est différent. C’est donc très difficile à modéliser. Beaucoup d’études sont à faire : économique, écologique, technique, sociale… Elles prennent plusieurs années, mais je ne peux pas vous dire exactement combien car Hydrowatt n’a aucune expérience dans ce domaine. Lorsqu’un barrage est crée à un endroit où s’est mise en place une base de loisir, il faut vérifier que le démantèlement ne créera pas une ville fantôme, ou ne détruira pas l’activité économique de la ville. Il n’y a pas encore que peu de cas de démantèlement en France.
Prévoyez vous de construire encore des barrages ?
Pas de gros, il n’y a plus de place, à part pour des moyens de stockage par exemple. Mais on continuera à mettre en place des petites centrales au fil de l’eau.