Les principaux terrains sur lesquels jouent les associations les plus visibles sont a priori plutôt détachés de la communauté scientifique. Le débat public s’articule plus sur des conceptions de la famille parfois divergentes, que sur des faits avérés concernant le développement de l’enfant, et les slogans et phrases choc prononcés à l’occasion du débat (« un papa, une maman, on ne ment pas aux enfants » Manif pour tous, mars 2013) dépassent le champ de la vérité scientifique avérée.
Les psychologues et sociologues sont-ils représentés sous forme associative dans le débat ?
Leur parole est souvent convoquée comme celle de « professionnels de la famille » : pour autant, les plus importantes associations, comme la Société Française de Psychologie, se gardent bien de communiquer officiellement une position. A l’inverse, des initiatives ont été lancées par certains professionnels, à l’image de la pétition « Des psychanalystes face à l’égalité des droits et au « Mariage pour tous » » signée par plus de 750 praticiens [1].
Pour rappeler que la psychanalyse ne doit pas être instrumentalisée pour juger des conséquences morales ou sociales d’une mutation de la loi. « Nous tenons à inviter le législateur à la plus extrême prudence concernant toute référence à la psychanalyse afin de justifier l’idéalisation d’un seul modèle familial » précisent-ils. Seuls certains regroupements de psychanalystes, comme le Mouvement du coût freudien, tiennent une posture officielle contre une reconnaissance légale du couple homoparental. Dans un communiqué Michèle Montrelay, psychanalyste membre du Mouvement du coût freudien, invite les psychanalystes à mettre leur connaissance des constantes de la construction psychologique des individus au service des questionnements sur l’homoparentalité.
Ci-dessus : Jean-Pierre Winter, président du Mouvement du coût freudien, a pris position contre l’élargissement de ce qu’il appelle l’ « homoparenté » [2].
Quels sont les rapports entre la recherche scientifique et les associations impliquées dans le débat ?
Les travaux scientifiques engagés depuis une dizaine d’années en France sur le thème de l’homoparentalité, et en particulier ceux qui interrogent le bien-être des enfants élevés par des couples homosexuels et leur développement psychique, sont convoqués dans l’argumentaire des associations, d’un côté comme de l’autre.
La majorité des études réalisées ayant conclu que les enfants évoluant dans un contexte homoparental ne rencontraient pas plus de problèmes de développement que les autres [3].
les associations de représentation des familles homoparentales utilisent ces résultats pour appuyer leurs revendications. La « commission recherche » de l’APGL, par exemple, dit jouer une totale transparence sur les travaux publiés sur le sujet. Après avoir rencontré Mireille Brioude, professeure de lettres dans l’enseignement secondaire et travaillant dans cette commission, nous pouvons confirmer que l’APGL réalise un véritable travail pour synthétiser la connaissance scientifique disponible et la rendre disponible pour qui, comme nous, en fait la demande.
Les associations réticentes à l’adoption homoparentale, et à l’ouverture de la PMA aux couples homosexuels, font également référence au corpus scientifique. Le Collectif pour l’enfant développe dans son argumentaire [4] l’idée suivante : « En l’absence d’unanimité sur un sujet de cette gravité, il semble impératif d’appliquer le principe de précaution. ». Cette position est souvent reprise par les détracteurs de la reconnaissance de l’homoparentalité, pour qui les études réalisées sur des échantillons forcément restreints de population ne sauraient être pleinement représentatifs des impacts de l’homoparentalité sur le développement des enfants.
Les associations de représentation des familles homoparentales soutiennent de façon directe la recherche sur le sujet en fournissant des panels de familles volontaires aux chercheurs : il fait partie de leurs prérogatives de s’assurer que les membres de l’association ne soient pas sujets à de trop nombreuses sollicitations directes des chercheurs et étudiants.
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