US Postal: du triomphe au tribunal

7 ans de domination et finalement un grand vide

Lien avec la controverse:

L’affaire US Postal ou « Affaire Armstrong », comme l’affaire Festina a entrainé une véritable déferlante médiatique. Du point de vue de la médiatisation les deux affaires sont donc assez proches. En revanche, jamais, avant l’affaire Armstrong, un programme de dopage n’avait été aussi sophistiqué :

l’US Postal a mis en place le programme de dopage le plus perfectionné, le plus professionnel et le plus efficace jamais vu dans le sport

Travis Tygart

Ainsi, parmi les acteurs généraux de la controverse ce sont principalement les médecins et le personnel de l’équipe qui se sont illustrés dans cette affaire. En effet, Lance Armstrong a bénéficié d’une aide médicale et logistique hors norme et tellement performante qu’il n’a jamais été suspendu pour dopage au cours de sa carrière.

 

Conséquences de l’affaire

L’UCI revoit de fond en comble sa politique anti-dopage. Mais surtout, la défiance s’installe de manière durable: on n’hésite désormais plus à dénoncer les coureurs dont les performances sont suspectes, malgré un manque évident de preuve. Froome subira cette absence de présomption d’innocence lors de ses deux victoires en 2013 et 2015. Le public entre alors dans une vision bipolaire du cyclisme: vouloir à la fois une performance toujours plus magistrale, avec toujours plus d’attaques, et pourtant que tout cela se fasse sans aucune aide, avec les seules ressources acquises à l’entraînement. La défiance s’installe également chez certains sponsors, qui ne souhaitent pas voir leur nom associé à un scandale de dopage. Quelques semaines après les révélations concernant l’affaire Armstrong, Bert Bugginkn membre du conseil d’administration de la banque néerlandaise Rabobank déclare:

 

Nous ne sommes plus convaincus que le cyclisme professionnel international est en mesure de faire du cyclisme un sport propre et juste

 

A partir de ces révélations, la lutte anti-dopage se mue en véritable croisade, tous les moyens sont bons pour arrêter les hérétiques. C’est ainsi que des méthodes de dépistage alternatives se mettent en place, telles que les calculs de puissance indirects. Sachant que l’on a un large panel de coureur dont le dopage était avéré, certains considèrent logique qu’une personne titillant les même seuils de performances que ce panel soit fatalement dopé à son Tour.

 

US Postal en détails:

1996-1998 : Un début timide

Lorsque US POSTAL devient le sponsor principal de l’équipe, il ne s’agit pas de monter l’une des équipes les plus fortes de l’histoire du cyclisme. En effet, l’objectif était simplement de participer au Tour de France avant 1998. Il s’agissait donc d’une petite équipe en terme de budget et d’ambition, qui misait sur l’apport de jeunes coureurs américains talentueux comme Tyler Hamilton. Ses débuts ont d’ailleurs été relativement difficiles : seulement trois coureurs de l’équipe réussirent à terminer le tour de Suisse en 1996.

Dès l’année suivante, un palier supérieur est franchi avec le recrutement des prometteurs Ekimov et Hincapie. Les places d’honneur du russe Ekimov sur des courses majeures convainquent d’ailleurs les organisateurs du Tour de France d’inviter la formation américaine à participer à l’édition 1997. US postal ne s’arrête pas là car son leader Ekimov remporte deux étapes sur le Tour et se classe huitième au général !

A la fin de l’année 1997, US POSTAL engage un jeune champion du monde rescapé du cancer : Lance Armstrong. Personne ne le sait encore, mais ce contrat va bouleverser l’histoire du cyclisme…

L’année 1998 est une année de transition pour l’équipe qui se cherche de nouveaux objectifs : Armstrong, encore convalescent termine tout de même quatrième du tour d’Espagne.

1999-2005 : Le rouleau compresseur en action

A l’aube de l’année 1999, un ancien cycliste belge Johan Bruyneel est engagé en tant que directeur sportif. Son objectif est clair : gagner le tour de France avec Lance Armstrong. Il décide donc formater son équipe pour qu ‘elle soit quasiment entièrement dévouée à la cause du coureur texan. C’est également le début du fameux « programme » qui selon les mots de l’USADA (agence américaine Antidopage) demeure le programme de dopage le plus sophistiqué jamais mis à jour de toute l’histoire du sport.

Grâce à son programme de dopage imposé à toute l’équipe et à sa rage de vaincre hors du commun, Lance Armstrong s’adjuge 7 tours de France consécutifs dépassant ainsi les historiques quintuples vainqueurs de l’épreuve (Anquetil, Merckx, Hinault, Indurain). Lors de sa première victoire en 1999, les médias et organisateurs le présentent comme le « champion du renouveau » qui doit faire oublier la sinistre affaire Festina. Cependant, son image en Europe va assez vite se ternir suite à des rumeurs de dopage (il aurait été contrôlé positif mais blanchi par l’Union Cycliste Internationale), dès lors les soupçons de dopage ne le quitteront plus… Malgré cela, sa popularité outre-Atlantique demeure immense : son parcours hors du commun force le respect et fait de lui une star incontestée (il devient alors l’ambassadeur et l’égérie de plusieurs grandes marques ce qui lui rapporte des millions de dollars).

Cependant, les choses deviennent de plus en plus difficiles pour Armstrong : certains de ses équipiers refusent de suivre le programme, les contrôles sont incessants… Armstrong entre alors en collaboration étroite avec le sulfureux docteur italien Michele Ferrari, véritable génie du dopage : c’est lui qui, en gérant constamment les doses de produits dopants à prendre, va permettre à Armstrong et son équipe de passer à travers les mailles du filet.

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Credit photo: Paolo Cocco

L’US postal continue donc de gagner et même en dehors du tour de France (Paolo Savoldelli s’adjuge le tour d’Italie en 2005, Ekimov rafle l’or Olympique sur l’épreuve du contre la montre en 2000 puis en 2004…). La formation US Postal surnommée « le train bleu » en raison de sa cohésion apparente semble tout simplement inarrêtable.

 

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Credit Photo: Reuters

En 2005, Lance Armstrong remporte donc son septième tour de France en reléguant tous ses adversaires au rang de simples figurants : il est bien le patron du Tour de France, le maître incontestable du peloton.

2006-2008 : La transition

A la fin du Tour de France 2005 qu’il quitte couvert de gloire, Armstrong décide d’arrêter sa carrière professionnelle. Johan Bruyneel demeure directeur sportif de l’équipe et regoûte à la victoire sur le tour de France avec le coureur espagnol Alberto Contador. Cette période est décisive : les langues commencent à se délier, d’anciens coéquipiers d’Armstrong comme Landis, Andreu, commencent à dévoiler des faits gênants pour la réputation d’Armstrong, qui parvient malgré tout à s’en sortir indemne.

2009-2011 : La provocation de trop

En 2009, Armstrong décide de redevenir coureur professionnel pour gagner le tour de France une huitième fois. A 37 ans, il présente cela comme son ultime défi. Il ne parviendra pas à l’atteindre : il termine troisième en 2009 du tour puis 23ème en 2010. Cependant, l’essentiel est ailleurs : ses détracteurs et l’USADA (agence antidopage américaine) voient ce retour à la compétition comme la provocation de trop. A partir de ce retour, ils ne le lâcheront plus : ne lui laisseront aucun répit jusqu’à la mise à jour du « programme » de dopage mis en place.

En 2012, l’USADA communique un dossier extrêmement détaillé accablant Armstrong, Johan Bruyneel et Michele Ferrari : tout le système s’écroule devant les preuves implacables de l’USADA. Armstrong est suspendu à vie du milieu sportif, ses titres obtenus entre 1998 et 2005 lui sont tous retirés. Armstrong effectuera ensuite des aveux publics début 2013. Ces aveux lui permettent d’éviter la prison mais lui font perdre toute la crédibilité qu’il possédait : il est désormais surnommé  « le tricheur » et perd tous ses sponsors.

 

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Crédit photo : Joel Saget, AFP/Getty Images

Pour aller plus loin:

Ce qu’il faut retenir de cette vidéo:

Elle montre que le dopage à l’époque Armstrong en plus d’être généralisé dans le peloton, prenait une forme d’organisation quasi-mafieuse. En effet on y voit le coureur italien Siméon partir dans un groupe d’échappé, être rattrapé par le peloton, ensuite on y voit Armstrong parler avec le coureur italien, l’air de dire : « Les autres peuvent partir en échappé toi, tu restes par contre… ». Or il faut savoir que Simeoni avait osé témoigner contre le Dr Ferrari, le Dr d’Armstrong, quelques mois avant… Pratique rappelant l’omerta qui peut régner dans les organisations mafieuses.

 

Source:

https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89quipe_cycliste_Discovery_Channel

http://www.20minutes.fr/sport/1020832-20121011-affaire-armstrong-mode-emploi-dopage-us-postal-selon-usada

http://www.lemonde.fr/sport/article/2012/10/22/lance-armstrong-dechu-de-ses-titres-par-l-uci_1779158_3242.html

http://www.lemonde.fr/sport/article/2013/01/18/par-ses-aveux-armstrong-veut-eviter-la-case-prison-et-la-banqueroute_1819320_3242.html

http://www.leparisien.fr/sports/les-dates-cles-de-l-affaire-armstrong-22-10-2012-2255771.php#xtref=https%3A%2F%2Fwww.google.fr

http://www.lequipe.fr/Cyclisme-sur-route/Actualites/Rabobank-arrete/320633

Pierre Ballester, L.A. Confidentiel