Historique du dessalement

En résumé

L’Espagne est le quatrième producteur d’eau dessalée au monde. Elle construit sa première usine de dessalement dans les Canaries en 1964. Dès lors, la production d’eau dessalée ne cesse de croître : elle double entre les années 2000 et 2004. En 2004, après avoir annulé le Plan Hydrologique National d’Aznar adopté en 2001, Zapatero, l’actuel chef du gouvernement espagnol, propose le Programa Agua. Il se fixe comme objectif la construction de vingt nouvelles usines de dessalement de grande capacité sur le littoral méditerranéen, dont celle de Barcelone, aujourd’hui en travaux. De nos jours, les plus de 900 usines de dessalement espagnoles produisent environ 1,8 million de m3 d’eau dessalée par jour.

En détails

L’Espagne, qui fut le premier pays à dessaler de l’eau de mer pour l’agriculture, est devenue une puissance dans ce domaine, avec des entreprises qui exportent leur savoir-faire. Par exemple, deux tiers des habitants de l’archipel des Canaries consomment de l’eau de mer dessalée. La moitié des habitants des Baléares, archipel fréquenté chaque année par près de 10 millions de touristes, font de même.

L’Espagne est le pays européen le plus équipé en usines de dessalement. L’Espagne occupe le quatrième rang mondial pour le recours au dessalement, derrière l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis et les Etats-Unis. Les plus de 900 usines existant en Espagne produisent environ 1,8 million de m3 d’eau dessalée par jour, soit suffisamment pour approvisionner quotidiennement environ 9 millions d’habitants, soit un cinquième de la population espagnole (45 millions d’habitants).

Les premières usines de dessalement apparaissent dans les années 1950 au Moyen-Orient. Elles utilisent la distillation. Ces régions, pauvres en eau mais riches en combustible, se mettent à convertir leurs ressources énergétiques en ce qui leur manque le plus : l’eau.

Dès les années 1950, Franco, que la guerre civile espagnole (1936-1939) a propulsé au pouvoir, trouve dans le tourisme une importante source de revenus. L’habitude nouvelle des vacances à bon marché et du soleil amène des centaines de milliers de touristes européens sur les côtes espagnoles (3 millions en 1958), venus, en une étrange quiétude, donner leur obole au franquisme – comme si ce dernier faisait désormais partie intégrante et intégrée du paysage politique européen. Les Canaries séduisent, mais la région manque d’eau. Franco décide alors en 1964 de construire la première usine de dessalement d’Europe dans les Canaries, l’usine de Lanzarote (l’approvisionnement des Canaries en eau potable dépend d’ailleurs aujourd’hui principalement de cette technologie). Cette installation utilise la même technologie que celle du Moyen-Orient, la distillation. Puis Palma, dans les Baléares, s’est dotée de trois usines, dont la plus importante, Bahia de Palma, fournit 68 000 m3 d’eau par jour (25 millions de m3 d’eau par an), de quoi alimenter une dizaine de millions de touristes et une vingtaine de golfs. C’est quelques années plus tard que le gouvernement changera de stratégie pour commencer à utiliser la récente technologie de l’osmose inverse dans les nouvelles installations.

La production d’eau dessalée en Espagne double entre 2000 et 2004, passant de 0,7 million de m3 à 1,4 million de m3 produits par jour.

En 2001, dans son Plan Hydrologique National (PHN), Jose Maria Aznar (Parti Populaire) prévoie d’acheminer une partie des eaux de l’Ebre sur plus de 480 km vers les communautés de Valence et de Murcie, où le Parti Populaire est particulièrement fort, ainsi que dans la province d’Almería (Andalousie). Comptant sur l’augmentation de l’approvisionnement en eau prévue par le PHN, des promoteurs se lancent dans la construction de grands complexes touristiques entre Almería et Alicante, comprenant des dizaines de terrains de golf. Cela représente plusieurs milliards de dollars.

Pendant les deux mandats consécutifs d’Aznar (1996-2004), plusieurs usines de dessalement voient le jour. C’est l’exemple de l’usine Lanzarote IV (ci-contre), adjointe en 2000 aux usines préexistantes.

En 2004, à son arrivée au pouvoir, le socialiste Jose Luis Zapatero annule le PHN et le remplace par le Programa Agua. Le nouveau président du Gouvernement espagnol promet, lui, de ne pas transférer d’eau d’un bassin hydrologique à un autre : il s’agit d’approvisionner le sud sans prélever d’eau dans le nord. Zapatero souhaite privilégier les mesures d’économie (surtout dans l’agriculture), de petits transvasements très localisés, et surtout le dessalement de l’eau de mer.

Le Programa Agua repose sur la multiplication des unités de dessalement le long du littoral méditerranéen espagnol : il s’agit ni plus ni moins d’en construire 20 nouvelles, dont deux aux Baléares, l’une à Palma, l’autre à Ibiza, et surtout El Prat de Llobregat, celle de Barcelone. Une enveloppe de 1,5 milliard d’euros est débloquée pour ce faire. Zapatero pense que ce nouveau plan sera bien plus à même de garantir l’apport d’eau, qu’il pleuve ou qu’il ne pleuve pas, indépendamment du climat.

En 2004, on compte 900 usines de dessalement en Espagne. Elles sont de taille modeste et produisent au total 1,4 million de m3 d’eau par jour. La construction des usines de dessalement prévues par le Programa Agua doit permettre d’atteindre une production de quelque 1,64 million de m3 d’eau dessalée par jour (600 millions de m3 d’eau par an) sur tout le littoral méditerranéen espagnol, dont un quart dans la seule région de Murcie.

En 2005, la sécheresse est telle qu’on doute même du fait que l’Ebre eût pu apporter suffisamment d’eau pour alimenter les conduites qu’Aznar avait prévu de construire dans son PHN.

L’adjudication des six premières usines de dessalement prévues dans le Programa Agua se produit au printemps 2006.

Alicante II (osmose inverse) a été adjointe à l’usine préexistante en 2006. Alicante est un port situé dans la communauté de Valence.

Les travaux de la gigantesque usine de dessalement de Barcelone (ci-dessous) sont lancés en juillet 2006.

A la mi-2008, la production d’eau dessalée s’élève à 1,74 million de m3 par jour. Les objectifs fixés par le Programa Agua sont atteints, largement dépassés même.

L’usine de dessalement de Barcelone devrait entrer en service mi-2009. Elle devrait à elle seule apporter 0,2 million de m3 d’eau par jour supplémentaires.

suite de la controverse : l'usine de Barcelone