Détails techniques
En résumé
Il faut distinguer deux grands projets de transvasement de l’Ebre. Le Plan Hydrologique National de 2001 prévoit de transférer annuellement 1050 hm3 d’eau de l’Ebre vers l’arc méditerranéen, dont 190 hm3 pour Barcelone et ses environs. La solution de tracé retenue consiste à prolonger le mini-transvasement entre l’Ebre et Tarragone existant depuis les années 1980. En 2008, un transvasement depuis l’Ebre est envisagé pour remédier à la terrible sécheresse qui sévit sur toute la Catalogne. Il s’agit donc d’un projet provisoire, ne transférant qu’une trentaine d’hectomètres cubes.
En détails
Le transvasement dans le PHN de 2001
En 2000, le gouvernement de José Maria Aznar (Partido Popular, la droite espagnole), élabore le Plan Hydrologique National (PHN), qui est publié en février 2001. L’objectif de ce Plan Hydrologique est de compenser les inégalités d’accès à l’eau entre le nord et le sud de l’Espagne. En effet 70% de l’eau disponible se concentre dans le nord, alors que l’arc méditerranéen et l’Andalousie regroupent 55% de la population, et disposent de seulement 23% de l’eau (données de Rivernet).
Pour cela, le plan prévoit la construction de 118 nouveaux barrages, de 10 usines de dessalement réparties le long de la côte méditerranéenne et de plusieurs grands canaux. Le point principal du PHN est le transvasement de l’Ebre : 1050 hm3 prélevés de son débit pour être transvasés vers les villes de Barcelone, Valence, Murcie et Almeria, dont 190 hm3 pour Barcelone, soit une fraction non négligeable du débit du fleuve. Aucun transvasement ne doit avoir lieu entre les mois de juin et septembre, période où le débit de l’Ebre est le plus faible. Le diminuer encore par des prélèvements d’eau aurait des conséquences environnementales néfastes. Une autre proposition importante du PHN est le transfert d’eau depuis le Rhône jusqu’à Barcelone par des canalisations, condition imposée par le gouvernement catalan pour soutenir le PHN.
et schéma en coupe des dénivellations à franchir pour le tronçon nord en direction de Barcelone.
Propositions de tracé et solution retenue
Pour le tronçon transférant de l’eau de l’Ebre vers Barcelone, plusieurs solutions ont été envisagées. Elles diffèrent par le lieu du point de captation, puis par des variantes dans le tracé. Le PHN ne tranche pas entre les différentes alternatives proposées, mais il donne compare des éléments importants pour la décision : géomorphologie, parcs naturels traversés, densités de population et coûts.
1ère solution : Point de captation dans le Bas Ebre, en aval de Tortosa. Le rapport technique du PHN décrit trois propositions différentes de tracé.
Caractéristiques de la solution retenue :
Pas de tunnel
179 km de longueur
Hauteur à remonter (pompes) : 247m
Un nouveau barrage à San Jaime
2ème solution : Point de captation dans les barrages de San Antonio ou Talarn, sur la rivière Noguera-Pollaresa. 3 possibilités de tracé
Caractéristiques de la solution retenue :
104km de longueur
149m de hauteur à remonter
« hauteur turbination » : 168m
38,5km de tunnels, dont deux tunnels de plus de 10km
3ème solution : Prolongement du mini-transvasement jusqu’à Tarragone Une troisième solution est brièvement mentionnée sans être développée, elle consiste à prolonger le mini-transvasement de l’Ebre déjà existant entre l’Ebre et Tarragone. C’est cette idée qui est finalement retenue, selon une publication du Ministère de l’Environnement et du Milieu Rural et Marin, consultable ici (en espagnol).
Le coût total du PHN était estimé à 18 milliards d’euros, dont 4,2 milliards d’euros pour le transvasement de l’Ebre vers tout l’arc méditerranéen. Il était prévu que ce projet soit financé par l’Union Européenne, après examen du dossier par la Commission Européenne de l’Environnement. Suite à la publication du PHN, le gouvernement espagnol fonde l’entreprise publique Trasagua, qui allait se charger de la construction des infrastructures.
Pour en savoir plus sur le projet de transvasement dans le PHN de 2001 : Lien vers le texte complet du PHN (en espagnol)
Le mini-transvasement de 2008
En mars et avril 2008 sévit une grande sécheresse en Catalogne, et les réserves d’eau des barrages, à moins de 20% de leur capacité, approchent du seuil critique de 15% en-dessous duquel pour des raisons sanitaires il n’est plus autorisé d’utiliser l’eau pour la consommation, car elle brasse la boue du fond.
Sur demande du Ministère espagnol de l’Environnement (Ministère de l’Environnement et du Milieu Rural et Marin), la Compagnie AGBAR (Eaux de Barcelone) présente un projet de transvasement de l’Ebre, en reprenant la même idée que dans le PHN de 2001 : prolonger le mini-transvasement de l’Ebre jusqu’à Tarragone. Ce mini-transvasement, autorisé en 1981, dévie chaque année 120 hm3 d’eau pour la consommation urbaine et pour l’agriculture à Tarragone, dont les aquifères sont inutilisables car contaminés d’eau salée.
L’eau transvasée à Tarragone n’est pas entièrement consommée par les agriculteurs à cause des pertes dans le système d’irrigation. Il était donc prévu de libérer 30 à 50 hm3 pour Barcelone en modernisant le système d’irrigation de Tarragone, puis de transporter cette eau par une canalisation de un mètre de diamètre en surface le long de l’autoroute AP-7. Il s’agit d’un transport réversible d’eau : en cas de besoin, Barcelone peut alimenter Tarragone.
Le projet en quelques chiffres :
Volume à transporter : 4hm3 par mois pendant 7 mois (solution provisoire jusqu’à la mise en place de l’usine de dessalement du Llobregat, prévue pour mai 2009
Distance à parcourir : 62 km
Coût du projet : 180 millions d’euros
Durée des travaux : 6 mois
Diamètre de la canalisation 1,4m
600 logements, principalement ruraux, devaient être expropriés pour laisser passer la canalisation. Le tracé final de la canalisation dépendait de la possibilité d’exproprier certains logements. C’est pourquoi à la fin du mois de mai 2008, ce tracé n’était pas encore fixé, et il manquait encore plusieurs semaines pour connaître sa version définitive, mais la suspension du décret de mini-transvasement le 6 juin 2008 vint clore la question.
Suite de la controverse : les antécédents