Voies généralistes ou voies spécialisées ?

Comme pour tous les troubles de l’apprentissage, une bonne prise en charge de la dyslexie nécessite de mettre en place une scolarisation adaptée à l’enfant dyslexique. D’après une circulaire de l’Éducation Nationale, datant de 2000, cette scolarisation s’inscrit non seulement dans les droits incontestables de l’enfant (« droit à la scolarisation et à la prise en charge appropriée »)  mais elle est également nécessaire pour la société :

« Que dire du coût pour la société de ceux qui auront été victimes d’absences totales de prise en charge ou d’erreurs graves d’orientation, et qui ne pourront aller au bout d’aucun cursus scolaire ou formatif. »[3]

Dès lors se pose la question de la forme que doit prendre cette scolarisation : doit-elle consister en une adaptation des voies généralistes ou en la création et l’amélioration de voies spécialisées ? Il est évidemment important de trouver la méthode qui permettra à chaque enfant de développer au mieux ses capacités malgré son handicap.

 

Une préférence pour le système général

 

Pour l’État, la meilleure solution semble être de laisser les élèves dyslexiques dans le système normal, éventuellement en accommodant les horaires pour leur permettre d’aller à des rendez-vous médicaux :

« L’école, dans un souci d’égalité des chances et de devoir à l’égard de l’ensemble des familles, doit être son propre recours pour faire face à la diversité des élèves accueillis. »[3]

Comme avec les autres enfants, il faudra prendre au sérieux leurs capacités, les stimuler mais sans jamais oublier que lire et écrire reste pour eux beaucoup plus difficile que pour d’autres et qu’ainsi certains outils de compensations ou aménagements sont nécessaires.

Seuls les enfants atteints de dyslexies sévères rejoindraient des voies spécialisées, et ce seulement pour une durée limitée dans la plupart des cas :

« Il s’agit évidemment de privilégier une scolarité au plus proche du milieu ordinaire, accompagnée à la mesure des besoins de l’enfant, sans exclure les prises en charge spécialisées si nécessaire, mais en évitant absolument d’engager les élèves dans des filières rigides tout au long du parcours scolaire. »[4]

 

 

Quelles structures spécialisées ?

 

Même si l’on limite le nombre d’enfants se dirigeant vers des structures spécialisées, la question de leur nature se pose tout de même. Une possibilité est l’envoi de ces enfants dans des classes spécialisées au sein d’établissements scolaires classiques telles que les CLIS* (Classe pour l’Inclusion Scolaire). En 2000, Jacques Fijalkow reprochait cependant à ces classes d’être des « classes de relégation, classes de résignation »[24] qui ne permettaient pas aux élèves de réintégrer le système normal par la suite. D’ailleurs, encore aujourd’hui, il n’existe pas officiellement de CLIS pour les dyslexiques, d’après Frank Ramus[d]. Certaines classes se sont détournées de leur objectif réel pour pouvoir accueillir et s’adapter à des dyslexiques, mais aucune classe spécialisée dans ces déficiences n’a encore été créée, malgré la mention de cette possibilité dans plusieurs circulaires de l’Éducation Nationale.

L’autre possibilité est de placer ces enfants dans des établissements uniquement dédiés à la formation d’élèves dyslexiques ou présentant d’autres troubles de l’apprentissage. Nous avons ainsi visité une école spécialisée située dans l’hôpital Raymond Poincaré de Garches[e]. Cette école fait partie du centre de référence des troubles du langage et des apprentissages. Elle accueille une vingtaine d’enfants souffrants de tels troubles. Elle leur propose des classes normales, tout en leur permettant de consulter régulièrement des spécialistes durant les horaires de cours habituels. L’école a ainsi les mêmes horaires que ceux d’une école classique, mais les élèves ont moins de vacances pour permettre les aménagements d’horaires indispensables à l’intervention de spécialistes auprès des enfants. Les élèves restent habituellement deux ans dans cette structure puis retournent dans des écoles non spécialisées, une fois leur retard absorbé. Le but du centre est de faciliter et d’éviter les retards dans la prise en charge des enfants. De tels centres semblent être une solution idéale pour la scolarisation des enfants atteints de dyslexie sévère mais ils sont peu nombreux et ne proposent qu’un nombre de place limité.

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