Quand faire le dépistage ?

Un diagnostic jugé trop tardif

 

Le diagnostic de la dyslexie a lieu 18 mois après le début de l’apprentissage de la lecture, soit en CE2.

«Le critère d’un retard de lecture de 18 mois minimum en dépit d’une intelligence normale, d’une scolarisation adéquate, d’un milieu socioculturel normalement stimulant et en l’absence de troubles neurologiques est généralement retenu. » [10]

Dans la pratique, il est possible d’obtenir des diagnostics dits précoces, dans le cas d’antécédents familiaux par exemple. C’est aussi le cas pour les enfants repérés dès la maternelle et considérés comme étant « à hauts risques ». Malgré tout, aucune prise en charge ne peut être mise en place avant le CE2, car il faut attendre dans tous les cas 18 mois. Ce délai est en effet obligatoire pour établir un réel diagnostic de dyslexie, par définition même de la dyslexie. De plus, les enseignants ne sont pas nécessairement formés à repérer les signes de dyslexie, ce qui cause également des délais dans le diagnostic car ils sont souvent incapables de distinguer les enfants dyslexiques des enfants ayant simplement des problèmes d’apprentissage.

Cela conduit donc à un retard de lecture d’au moins deux ans pour les enfants dyslexiques. Selon les parents, ce retard est trop important car pendant deux ans, leurs enfants souffrent. De plus, il est ensuite plus difficile à rattraper. Les médecins spécialisés, comme Mme Schlumberger[c], sont souvent d’accord : au cours de ces deux années, l’enfant dyslexique va suivre un apprentissage qui ne lui est pas adapté (comme l’enseignement de la lecture par la méthode globale). C’est pourquoi ils souhaiteraient mettre en place de façon systématique un repérage plus précoce, dès la maternelle, des enfants avec un « haut risque » de dyslexie.

Par ailleurs, en interrogeant des parents d’élèves, nous avons découvert que certains centres spécialisés n’accueillaient pas d’enfants au-delà d’un certain âge (souvent 10 ans). Un diagnostic trop tardif risque donc de priver l’enfant de l’accès à ces centres.

 

Avancer le dépistage… mais pas trop

 

Certains acteurs souhaitent donc un diagnostic, ou tout du moins un repérage, plus précoce des enfants à risques. Ce souhait est principalement formulé par les parents d’élèves, ainsi que les médecins spécialisés. Par exemple, Mme Schlumberger[c] aimerait que les enseignants, dès la maternelle, soient plus sensibilisés au problème de la dyslexie. Ils pourraient ainsi repérer les enfants ayant des difficultés pour ensuite pouvoir cibler des enseignements adaptés. Franck Ramus explique que cette intervention est possible car les compétences orales indispensables à la lecture sont enseignées dès la maternelle.[d] Une circulaire de l’Éducation Nationale va d’ailleurs dans ce sens :

« Lorsque l’ensemble des signes d’alerte manifestés par un élève laisse à penser que les difficultés qu’il rencontre peuvent être en rapport avec des troubles spécifiques du langage oral ou écrit, il est indispensable […] d’établir, dans les meilleurs délais, un diagnostic fiable. » [4]

Toutefois, dépister trop tôt présente un risque. Franck Ramus explique ainsi que les facteurs prédictifs observables dès la maternelle ne sont en rien déterministes. Un enfant qui présente ces facteurs en grande section ne sera pas nécessairement dyslexique. C’est d’ailleurs pour cela que l’Éducation nationale souhaite prendre des précautions, comme l’indique cette circulaire de 2000 :

«Évitons de parler de trouble spécifique du langage oral avant 5 ans, et de trouble spécifique du langage écrit avant 8 ans. » [3]

Enfin certains parents craignent qu’un dépistage précoce conduise à une médicalisation excessive du problème. « Arrêtons d’emmener nos enfants chez le médecin à la moindre difficulté scolaire. » s’insurge ainsi un parent d’élève sur la radio Europe 1 [28].

D’autre part, d’autres parents, en particulier ceux issus de milieux favorisés, ont tendance à souhaiter une prise en charge rapide et intensive de leurs enfants qu’ils considèrent comme dyslexiques trop rapidement. C’est précisément cette prise en charge qui est jugée excessive par une partie des enseignants.

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