Comme nous avons pu l’observer sur les deux affaires par lesquelles nous sommes entrés dans notre controverse, la première étape des procès de Paul François et de James-Bernard Murat a été de prouver le caractère professionnel de la maladie en question. Il existe pour cela une démarche qui doit être faite auprès de la mutuelle. Les agriculteurs doivent remplir une déclaration de maladie professionnelle sur la base d’un certificat médical devant établir le lien entre la maladie contractée par l’agriculteur et ses conditions de travail. Ce dossier est déposé auprès de la mutuelle sociale agricole (MSA) qui décide de prendre en charge, ou non, le caractère professionnel de la maladie. La MSA dispose d’un délai de 3 mois auxquels s’ajoutent trois mois de délai supplémentaire, afin d’apporter une réponse à l’agriculteur. En cas de réponse positive, l’agriculteur percevra alors une rente dont le montant est calculé en fonction de la gravité des séquelles observées chez l’agriculteur et de son taux d’inaptitude au travail. En cas de réponse négative, il existe une possibilité de faire appel afin que le dossier soit réexaminé.
Pour que le caractère professionnel d’une maladie soit établi, la loi stipule que cette dernière doit se déclarer chez l’agriculteur dans les dix ans suivant sa cessation d’activité. De plus, l’agriculteur doit prouver une durée minimale d’exposition de dix ans au pesticide responsable de ses problèmes de santé. Lorsque cette durée d’exposition n’est pas avérée, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles peut être saisi (CRRMP). Un comité de médecin émet alors un nouvel avis qui s’impose à la MSA.
Il faut savoir que des tableaux de maladies professionnelles, adoptés par décrets, sont présents dans la législation française. Le premier d’entre eux, datant de 1919, a été instauré en réponse aux nombreuses maladies liées au plomb apparues à cette époque-là. Il a ensuite été considérablement complété en parallèle des avancées scientifiques qui ont permis d’établir de nouveaux liens entre l’utilisation de produits chimiques, dont les pesticides font partie, et l’apparition de certaines pathologies. La dernière actualisation de ce tableau, le cinquante huitième, a été effectuée l’an passé : le lymphome non hodgkinien a été ajouté à cette liste, comme le note l’Echo Républicain du 18 juin 2015. Les décisions de jurisprudence permettent à terme, si elles sont favorables aux victimes, de compléter ce tableau. Lorsque la maladie observée ne figure pas dans ce tableau, il faut que l’état de santé de l’agriculteur soit suffisamment grave s’il veut obtenir gain de cause (25% d’incapacité partielle permanente). La procédure de reconnaissance du caractère professionnel d’une maladie est souvent longue. Cependant, lorsque les délais administratifs maximaux sont dépassés, la reconnaissance implicite du caractère professionnel de la maladie est accordée, ce qui est assez fréquent selon les dires de Maître François Lafforgue, avocat de l’association Phyto-victimes.
Cette législation est aujourd’hui remise en question. A quels changements devons-nous nous attendre ? Quelle nouvelle législation peut intervenir dans les années à venir ?