La comparaison avec les peines alternatives

P.-V. Tournier, F. Lombard et A. Kensey publient en 2005 la première étude permettant de comparer les taux de récidive entre des sortants de prison et des condamnés à des peines non carcérales. C’est la seule étude qui permette de quantifier l’impact de la prison sur le taux de récidive. Cette étude permet de répondre à la question : comment la prison agit-elle sur le risque de récidive d’un individu ?

Avant de donner les résultats de l’enquête, précisons les modalités de l’étude :

- observation suivie

- période d’observation : 5ans

- 5 234 dossiers : infractions à la législation sur les stupéfiants, vol recel simple, vol recel aggravé, vol avec violence, conduite en état alcoolique, coups et blessures  volontaires, agressions sexuelles.

Les résultats bruts

« Le taux de condamnations à l’emprisonnement ferme, pour un délit, dans les 5 ans est globalement de 31%. Il est maximum pour les sortants de prison soit 61%, dans les 5 ans qui suivent la libération (on peut alors parler de retour en prison). Il est nettement plus faible pour les personnes condamnées à des sanctions non carcérales, dans les 5 ans qui suivent la condamnation initiale :

-   61 % pour les sortants de prison contre…

-   41 % à la suite d’un SME-TIG,

-   34 % à la suite d’un TIG peine principale,

-   32 % à la suite d’un SME, et enfin,

-   19 % à la suite d’un sursis simple.

Ce que nous appelons le taux de recondamnation est, pour l’ensemble, de 49%, dans les 5 ans qui suivent la libération ou le prononcé de la sanction initiale non privative de liberté. La hiérarchie, selon la nature de la sanction initiale, est la même que pour les taux de niveau 4 (prison ferme), mais les écarts sont plus faibles :

-   72 % pour les sortants de prison, contre…

-   59 % à la suite d’un SME-TIG,

-   58 % à la suite d’un TIG peine principale,

-   52 % à la suite d’un SME, et enfin,

-   39 % à la suite d’un sursis simple.

Ainsi la règle pourrait paraître simple : plus la sanction est contraignante, plus les taux de nouvelles affaires sont élevés, à condition de considérer que le TIG sans SME est plus contraignant que le SME sans TIG. S’il est essentiel de savoir que les choses vont dans  ce sens, évitons de tomber dans le piège des interprétations trop rapides. »

En effet, il ne faut pas conclure trop rapidement en disant qu’orienter un individu vers la prison augmente ses chances de récidive. En effet, les individus envoyés en prison ou vers des peines alternatives n’ont pas le même profil, et « cela peut avoir de l’influence, sur le choix de la peine par les tribunaux, sur leur devenir en  matière de comportements délictueux, voire sur la réaction de la justice pénale à ces nouvelles infractions. ».

P.-V. Tournier a donc appliqué la « méthode des taux comparatifs » pour tenter de s’affranchir de la différence de passé judiciaire. Les tableaux suivants indiquent l’impact de cette méthode sur les résultats. Les cases grisées correspondent à de forts écarts.

 

tab 5 Audrey

 

Conclusion de P.-V. Tournier

« Les écarts entre taux comparatifs sont donc nettement plus faibles que les écarts entre taux observés mais la comparaison reste en défaveur de la prison. Encore faudrait-il prendre en compte les conditions concrètes d’application des peines, en milieu fermé comme en milieu ouvert, afin de mettre en évidence les facteurs susceptibles de faire baisser les taux de récidive. Au premier examen, les effets des alternatives à la détention sont déjà loin d’être négatifs, malgré la faiblesse des moyens matériels et en personnels dont disposent les Services pénitentiaires d’insertion et de probation. »

 

Les conditions de détentionLes moyens d’action

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