Pour chaque utilisateur, un certain nombre d’impératifs reviennent lorsque l’on évoque la mobilité électrique. Il s’agit essentiellement du prix de la voiture électrique, de son autonomie et de son caractère écologique. Par exemple, les consommateurs pensent que la voiture électrique n’a pas une assez grande autonomie (de l’ordre de 100 à 200 km) et ne peut pas, pour le moment, remplacer la voiture thermique :
« The high initial cost, short driving range, long charging (refueling) time, and reduced passenger and cargo space have proved the limitation of battery-powered EVs. » (1)
Cependant, la voiture électrique peut s’avérer aussi performante que ses concurrentes dans des marchés spécifiques que nous allons chercher à analyser.
Une grande diversité d’utilisateurs
Les consommateurs peuvent se diviser en un nombre incalculable de catégories dont les opinions sont divergentes: on distingue l’important groupe des « householders », c’est-à-dire des familles possédant déjà une propriété et une ou deux voitures thermiques. Il y a aussi le groupe des étudiants, avec peu de budget et ne possédant pas forcément de première voiture, les personnes âgées, ayant le pouvoir d’achat, mais pas forcément la même capacité à s’adapter aux nouvelles technologies,… Finalement, quel est l’utilisateur type intéressé par la voiture électrique ?
Les contraintes imposées par le véhicule électrique
Esquissons d’abord le profil cet utilisateur, en fonction des propriétés du véhicule électrique.
Pour le moment, le prix de la voiture électrique est bien plus élevé que celui de la voiture thermique (entre 3000 et 5000€). Mais les aides de l’État compensent cet écart par le fameux bonus écologique.
Son autonomie est plutôt faible, de 100 à 200 kilomètres selon le modèle, et les temps de recharge sont aussi variables (de quelques dizaines de minutes à plusieurs heures selon que la recharge est normale ou rapide). De plus, cela nécessite une prise 220V ou plus haute tension. C’est indubitablement un point limitant le marché de la mobilité électrique.
La voiture électrique, comme toute voiture, nécessite un lieu de stockage (garage, parking).
Le point fort de la voiture électrique semble clairement résider dans son caractère écologique.
Ces caractéristiques filtrent naturellement les potentiels acheteurs de voitures électriques parmi les 40 millions de conducteurs français.
Filtrage des utilisateurs potentiels
Commençons par le prix : s’il est plus élevé que celui de la voiture thermique, la voiture électrique semble d’abord toucher des utilisateurs ayant un portefeuille établi, donc typiquement des utilisateurs à la carrière lancée.
Ensuite, l’autonomie limite le type de mobilité possible : l’utilisateur se déplacera électriquement sur des trajets relativement courts (moins de 100 km par jour). Ce type de déplacement est la mobilité quotidienne d’un grand nombre d’automobilistes français. Mais celui qui n’a qu’une voiture électrique ne pourra pas parcourir de longues distances, ce qui est ponctuellement nécessaire (pour partir en vacances ou en week-end). Il faut donc que l’utilisateur possède déjà une voiture thermique.
Enfin, l’utilisateur doit posséder un parking ou un garage ; en pratique, quelqu’un vivant en maison individuelle est plus concerné par l’achat d’un véhicule électrique. Cependant, ce point est à nuancer quand on connait l’évolution fulgurante de la location du véhicule électrique par des systèmes d’autopartage (Autolib’ en est l’exemple le plus flagrant). Ainsi, un automobiliste urbain peut utiliser le véhicule électrique, sans en posséder un.
Ainsi, les propriétés techniques du véhicule électrique lui offre un marché filtré. On toucherait en premier lieu un utilisateur type qui :
- a une carrière lancée ;
- effectue des trajets quotidiens de moins de 100 km, et qui a une seconde voiture pour les longs déplacements ;
- possède une maison individuelle.
Typiquement, on touche donc le marché périurbain. On a cependant vu que certains utilisateurs tout à fait urbains pouvaient choisir la location, éliminant ainsi la question du prix et donc de la carrière.
Un cap à franchir
Après notre entretien avec le responsable « nouvelles technologies » de l’association 40 Millions d’Automobilistes, on s’est rendu compte que, si ce marché semblait légitime, la réalité avait tendance à le déformer. Les utilisateurs ont d’autres avis, car la vie en société est adaptée à l’utilisation du véhicule thermique, notamment du point de vue des infrastructures mises en place (pompes à essence vs. prises de recharge publiques). Mais l’un des points les plus sensibles semble d’un aspect plutôt psychologique : les automobilistes français sont-ils prêts à passer à l’électrique ? Ce type de véhicule n’a pas encore fait ses preuves, et la population craint encore une insécurité, une fiabilité pas encore éprouvée… C’est en fait parce que le véhicule électrique est une nouvelle technologie qu’elle voit, auprès de ses clients potentiels, certaines portes se refermer. La vision commune du véhicule électrique est clairement en train de changer, suite aux nombreuses campagnes de promotion, et les effets sur les ventes s’en font ressentir. Il ne s’agit néanmoins pour l’instant que d’un frémissement.
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Note :
(1) The state of the art of electric, hybrid, and fuel cell vehicles, Chan, C.C. (2007), Proceedings of the IEEE, 95(4), 704-718. (retour au texte1)
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