Paris peut-il couler ?

Paris peut-il couler ?

La mise en place d'un cinquième ouvrage pour protéger Paris

Amélie Astruc Verbatim

27 mars 2014 | Commentaires fermés

Verbatim d’entretien

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Date :

06/03/14

Lieu :

EPTB Seine Grands Lacs, 8 rue Villiot 75012 Paris

Etaient présents :

Alexandre Quertamp, Marie Mazurier

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Et on a recommencé une phase de concertation depuis le 7 novembre qu’on devrait finir en milieu d’année.

Comment se passent les réunions de concertations, avec des personnes qui j’imagine ne sont pas forcément des spécialistes ?

De manière générale, les réunions se sont plutôt bien passées. Enfin, dans le débat public elles se sont plutôt bien passées. Evidemment il y a des gens qui ne sont pas forcément d’accord avec notre projet, ou qui ont des craintes…

Ces réunions sont-elles ouvertes à tous ?

Pendant le débat public, c’étaient des réunions publiques, vous étiez libres d’y assister. Il y avait toute une campagne de communication qui était faite : des affiches, des banderoles, des encarts dans les journaux des choses, comme ça. Pour la phase de concertation que nous menons depuis début novembre, non. Une réunion publique a ouvert la concertation et une qui viendra clôturer la concertation. Mais toutes les réunions intermédiaires d’avancement, sont plutôt à public restreint. Plus ou moins restreint selon les thématiques en fait. Parce qu’il y a des comités de pilotage où vous avez un peu les représentants de tous les élus locaux, sans que ce soit public mais il y a quand même beaucoup de monde. Il y a des ateliers thématiques, plutôt sur la partie environnementale. Donc là c’est plus restreint et c’est sur invitation par contre.

Y a-t-il eu une évolution de la perception du projet entre la première phase de concertation qu’a été le débat public et la réunion de novembre à Bray sur Seine ?

Ce qu’il faut savoir est que la concertation n’a pas commencé avec le débat public. C’est un projet de très long terme qui a commencé au début des années 2000. Ce qui a lancé le début du projet et le lancement de la concertation c’est toute une grande phase de réunions qui ont eu lieu au début des années 2000, entre 2001 et 2004, pour déterminer la faisabilité du projet. Déjà à la fin des années 90, plusieurs études à caractère hydraulique ont démontré que ce projet était opportun, qu’il était efficace sur la diminution du risque d’inondation su la région Ile de France. Donc une fois que l’on a vu que c’était quelque chose d’efficace, il y a eu toute une grande étude sur la faisabilité technique du projet. On parlait déjà de casiers à l’époque mais la forme des casiers a été établie pendant la phase de concertation 2001-2004.

Le tracé des digues a été établi en prenant en compte les contraintes locales. Il s’agissait d’éviter les villages et la plupart des habitations. Il fallait éviter autant que possibles les usages tels que les carrières par exemples. Il fallait regarder l’impact sur les terres agricoles, les impacts environnementaux. Donc par exemple, il fallait que le tracé des digues essaie autant que possible d’éviter les stations d’espèces protégées, n’empiète pas sur les zones Natura 2000. Ça a été fait dans ce sens-là.

Sur cette carte, vous avez le tracé digues et puis vous voyez de temps en temps des petits ziguiguis avec des tracés qui s’adaptent vraiment aux spécificités locales. La par exemple il y a une ferme d’importance qui est la ferme de la Grange donc le tracé des digues a été fait de manière à pouvoir l’éviter. On a aussi ici un centre de traitement des granulats. Il s’agit du premier site d’Ile de France pour l’extraction des matériaux alluvionnaires, pour faire les bétons hydraulique pour la construction en Ile de France. Là également, un autre centre de traitement évité. Tout ce tracé a été établi en concertation avec les acteurs locaux.

De qui émerge la volonté de lancer un tel projet, sur la base d’études réalisées ?

C’est un projet qui date d’il y a très, très longtemps, suite à la crue de 1982 où il y a failli avoir des dommages assez conséquents à Paris et en petite couronne. On était vraiment à quelques centimètres, notamment toute la ligne du RER C aurait été noyée et à partir de l’ennoiement de la ligne il y aurait surement eu d’autres dommages. Donc le préfet de l’époque a déclaré qu’il fallait compléter le dispositif de protection existant par un autre ouvrage. Au cours des années 80-90, il y a donc eu plusieurs études pour savoir où construire un nouveau projet. Il fallait que le projet puisse amortir les crues de l’Yonne. C’est la rivière qui cause toujours les problèmes de crue dans la région parisienne et c’est une rivière qui n’est pas bien contrôlée. Notre établissement gère les grands barrages réservoirs sur le bassin de la Seine (Aube, Seine, Yonne et Marne), et ceux qui sont situés sur l’aube la Seine et la Marne ont un volume de stockage important et contrôlent bien les écoulements. Par contre celui que l’on a sur l’Yonne est très en amont et ne contrôle qu’une faible partie du bassin versant de l’Yonne donc il n’a pas énormément d’impact sur les inondations liées à l’Yonne. C’est pourquoi il fallait que l’on complète le dispositif pour cette rivière. Donc plusieurs projets ont été étudiés par nous, mais les financements se font également avec le soutien de la région Ile de France, de l’Etat…

N’avez-vous pas récemment changé de statut juridique ?

Non. On n’a pas changé de statut juridique, on a juste eu un nouveau label. Le statut d’institution interdépartementale est resté le même. C’est-à-dire que c’est les conseils généraux de Paris et de la petite couronne qui nous financent, qui sont nos administrateurs. Mais on a été reconnus EPTB en février 2011. Cela ne change pas notre statut mais ça élargit nos compétences et nous confère de nouvelles missions. Avant nous étions purement et simplement gestionnaires d’ouvrages hydrauliques et maintenant on a d’autres missions où on est plutôt gestionnaires l’échelle du bassin, d’actions d’améliorations des eaux…

Ceci a-t-il un impact sur la gestion ou le lancement de ce projet ?

Non cela n’a pas d’impact. Cette mission a été lancée bien avant d’être EPTB puisqu’on a commencé à étudier le projet à la fin des années 90. Si, cela nous donne peut être plus de légitimité à porter ce projet. Mais cela ne change pas notre façon de voir les choses et de conduire le projet.

Cela vous permet-il de l’insérer dans le cadre plus large d’autres mesures ?

Alors, effectivement. Si je reviens juste sur cette phase de concertation 2001-2004, on a eu : étude de faisabilité donc on a démontré que le projet était faisable techniquement parlant, phase de concertation pour voir en quoi il pouvait générer le moins d’impact possible aussi bien sur les usages locaux que sur l’environnement, et ensuite, la concertation a été très partielle jusqu’au débat public. Il y a eu un ralentissement du projet notamment dû aux problèmes de financement. Bon, un autre projet également porté par Voies Navigables de France. Il fallait qu’on attende VNF pour avancer sur le projet. On savait qu’on allait être soumis à débat public. Donc il y a eu la préparation du débat public avec de nouvelles études menées pour pouvoir répondre aux questions du débat. Débat qui a eu lieu entre novembre 2011 et février 2012. Et suite à ce débat public, les grands enseignements que l’on a tiré sont : les gens se sont posé de nombreuses questions sur le projet en tant que tel. Il ne faut pas par exemple que ce projet, parce qu’on a construit un nouvel aménagement contre les crues, que les gens en aval se sentent encore plus protégés et construisent encore plus en zone inondable. Que cela ne serve pas d’excuse à l’accroissement de l’urbanisation en aval dans les zones inondables.

On nous a dit qu’il fallait inclure ce projet dans un programme plus vaste, de prévention du risque d’inondation qui comporte d’autres actions que ce gros projet de la Bassée. Sur le financement, de toutes façons, on avait beaucoup de difficulté à financer un projet de 600 millions d’euros, donc on a eu aussi énormément de questions sur le cout qui paraissait extrêmement élevé et le financement qui paraissait totalement incertain. Et on a eu énormément de questions de la part des locaux sur l’impact du projet – impact sur tout, sur les usages, sur les habitats, sur faune-flore, sur la nappe souterraine, aussi bien en qualitatif qu’en quantitatif. Voilà, la décision que l’on a prise à l’issue du débat et que l’on a communiqué en juin 2012, ça a été premièrement d’inscrire ce projet dans un PAPI (Programme d’action de prévention du risque inondations), programme qui comprends d’autres actions structurelles et non structurelles, à savoir information et sensibilisation de la population, de réduction de la vulnérabilité.

Est-ce que vous pouvez nous donner quelques exemples ?

Il y a de la pose de repère de crue, pour que les gens visualisent plus précisément ce que c’est qu’une inondation, jusqu’où ça peut aller. Il y a des actions de communication en utilisant les technologies modernes, donc développement d’applications smartphones, la réalisation de visuels en réalité augmentée, donc là où les gens peuvent voir en 3D ce que c’est qu’une montée des eaux dans leur quartier. Il y a la modernisation de nos outils de modélisation, modélisation hydraulique et économique. Il y a l’amélioration de nos connaissances des crues historiques. Tout ça, c’est vraiment sur l’information et la sensibilisation du public. Il y a aussi des actions d’appui aux collectivités territoriales, notamment d’appui aux mairies pour construire les plans communaux de sauvegarde, d’appui aux opérateurs de réseau. Il y a vraiment tout un panel d’actions prévues dans le cadre du PAPI que l’on a développé.

Donc, si j’en reviens à la décision qui a été prise en juin 2012, l’intégration du projet au PAPI de la Seine et de la Marne francilienne, ne réaliser qu’une seule partie du projet, donc ce qu’on appelle un casier pilote, qui permet de répondre à toutes les interrogations soulevées pendant le débat public et de mettre en place ce casier pilote et des opérations de valorisation écologique, à l’horizon 2014-2019 et pour un montant total de 100 millions d’euros TTC.

Sur toute la partie juin 2012 à octobre 2013, donc toute cette grosse année, elle a été dédiée à la préparation du PAPI. Une fois que ce PAPI a été construit et labélisé le 19 décembre dernier …

Vous êtes donc rédacteurs du PAPI ?

On en est porteur. C’est un de mes collègues qui est en charge de ce projet mais par contre, les autres maitres d’ouvrage de ce PAPI c’est le Conseil Général 75 et de la petite couronne, qui sont aussi membres de l’EPTB. On a inclus aussi l’Essonne et la Seine et Marne, ils ont montrés leur intérêt mais pour la deuxième phase du PAPI. Et on a d’autres partenaires, même s’ils ne sont pas maitres d’ouvrage, s’ils ne financent pas – ils peuvent donner leur appui dans le cadre de certaines actions. L’Etat finance les actions, à concurrence de 40-50 % et on veut compléter le tour de table du financement avec l’Agence de l’Eau Seine Normandie et la région Ile de France. C’est le financement qu’on a eu dans le cadre de la phase 2007-2013 où la Bassée faisait partie du plan Seine. En fait le plan Seine, issu de la lignée des plans Grands Fleuves, c’est des financements qui sont mis à disposition par l’Etat et les régions pour des actions liées aux fleuves. Tout ceci s’inscrit évidemment dans le cadre des directives européennes (inondation, cadre sur l’eau), c’est lié au SDAGE Seine-Normandie. Tous ces plans et documents là sont systématiquement pris en compte. Voilà, c’est pour cela qu’on n’a pas eu de concertation entre le débat public et novembre 2013.

En fait, on a relancé la concertation, cette fois-ci pour choisir le site du casier pilote. On a présenté le 7 novembre les différents scénarii étudiés, on a présenté la démarche technique et environnementale qu’on allait mettre en œuvre. On a aussi le deuxième objectif de notre projet, qui consiste à améliorer et valoriser la Bassée de manière écologique puisque la Bassée aval perd ses caractéristiques et ses qualités de zone humide. Depuis novembre 2013, on a eu plusieurs réunions. En fait on s’est fait un planning de réunions qu’on a présenté le 7 novembre, qui évidemment prend du retard, ça c’est normal. On continue sur notre lancée et donc on a eu un premier atelier le 17 décembre, sur la valorisation écologique du territoire. On a eu une réunion avec les élus locaux, donc ça c’est plutôt pour les mesures d’accompagnement que demandent les élus si le projet est fait sur leur territoire, donc c’est leur demande. On a eu aussi un premier comité de pilotage début février pour éliminer deux premiers scénarii. Et en parallèle, on met à jour toutes nos données d’usage, on a revu les carriers, la chambre d’agriculture. On a fait pas mal de visites sur le terrain pour mettre à jour nos données et tout ça, ça sert d’entrant pour le choix final du casier pilote.

Quelles ont été les motivations pour écarter les deux casiers ?

Il y a deux casiers qui ont été supprimés (1 et 6). Ces deux casiers présentent un rapport efficacité cout plus faible que les autres, c’est-à-dire qu’en clair ils sont trop chers à construire par rapport à leur efficacité. Parce qu’ils présentent des linéaires de digues assez importants par rapport au volume de stockage qu’ils peuvent offrir. En plus, on est sur des problématiques environnementales qui sont très spécifiques, que l’on ne trouve pas sur les autres casiers, avec des zones tourbeuses qui sont vraiment patrimoniales mais qui supporteraient très mal une inondation. Donc qui perdraient complétement leurs caractéristiques spécifiques de zones tourbeuses. Donc vous voyez, on n’en a pas éliminés beaucoup. Par contre dans la suite de nos réflexions on a mis à jour toutes nos données notamment sur la partie carrières. Vraiment tout ce que vous voyez comme plans d’eau ce sont des carrières qui ont été extraites et tout ça s’est rempli par de l’eau de nappe et de pluie et ça forme des gravières. Les carrières grignotent progressivement le territoire et quand on met sur une carte les tracés de nos digues et la mise à jour des données sur les carrières on s’aperçoit que les tracés que l’on avait initialement prévus ne peuvent plus être utilisés en tant que tels. Donc ça fait des cohabitations très difficiles entre l’activité carrière et notre activité. Donc ceci représente une contrainte très forte. Ça plus les autres contraintes que l’on est en train d’identifier finalement ca restreint vraiment les possibilités de construction de casiers pilotes.

Comment cela se passe-t-il concrètement dans une réunion de concertation. Défendez-vous spécifiquement certains casiers qui vous paraissent plus pertinents que les autres ?

Clairement c’est ce que l’on va faire. En premier comité de pilotage on en a éliminé deux. On a fait cette première étape sur la base de données relativement anciennes, on a quand même présenté deux casiers à éliminer parce que même si les données n’étaient pas mises à jour on pouvait les supprimer assez facilement. Ça n’a pas recueilli d’objections particulières.

J’imagine que les acteurs locaux s’opposent assez peu à l’élimination de projets.

Si, ils peuvent s’opposer parce qu’au final on va en choisir un. Il faut choisir le moins contraignant à la fois pour nous et pour eux. Donc si, ils peuvent s’opposer. Ils peuvent penser qu’un casier serait moins contraignant qu’un autre, que celui-ci représente moins de contrainte environnementale.

Et sur ces deux casiers là un consensus a été atteint ?

Oui il n’y a pas eu d’antagonismes. Bon par contre ça risque de se faire peut être dans la prochaine étape. Le prochain comité de pilotage fin avril si on est dans les temps, où là, on va faire une analyse multicritères, c’est-à-dire qu’on va présenter pour chacun des scénarii des indicateurs qualitatifs ou quantitatifs liés à la fois aux contraintes techniques (coût, efficacité, volume de stockage) et aux contraintes environnementales (sites Natura 2000, digues traversant des stations d’espèces protégées ou patrimoniales connues). Et on va présenter aussi des critères liés aux usages. Par exemples, certaines des carrières vont perdurer jusqu’à 2030, donc on va être gênés pour construire nos digues par ce qu’on va être en co-activité avec les carrières. Ça va être difficile de faire les travaux. Ici il y a encore beaucoup d’agriculture et il y a à nouveau des projets de carrières qui s’ouvrent un peu partout. Il va falloir indemniser les terrains agricoles, sur les grandes surfaces. On va avoir du mal à tracer et construire nos digues sur la zone au moment où cette zone la va être extraite. Donc il y a vraiment des éléments assez importants et plus précis que pendant le premier comité de pilotage. On va présenter ça au gens et on leur dira clairement « Voilà nous on propose ce scénario-là, soit un seul scénario soit deux scénarii qui combinent chacun soit des avantages soit des inconvénients. Voilà notre préférence. » On verra comment réagissent les gens.

Est-ce que vous vous basez également sur un retour d’expérience. Ce genre de projet existe-t-il ailleurs ?

On se base sur un retour d’expérience oui. Dans ce cadre-là on fait partie d’un projet-programme européen qui s’appelle Alpha avec lequel on a des partenaires hollandais, anglais, allemands et belges. C’est souvent des problématiques assez similaires, c’est-à-dire que c’est aussi des zones de rétention des crues qui sont souvent temporaires et sur lequel y a des activités. Donc il faut assurer la compatibilité entre le stockage de l’eau et les activités. Donc ça par exemple, on s’inspire sur ce que font les collègues européens sur ce même type de problématiques. On peut dire aux gens « Vous voyez, ça existe ailleurs, ça marche et il y a d’autres personnes qui les font. » Là où ça n’existe pas vraiment c’est que tous ces espaces on les remplit par pompage en fait, là où la majorité des espace est remplie gravitairement. Par vannes tout simplement. Par exemple le long du Rhin ça existe. Vous avez le Rhin, vous avez des polders. C’est vraiment le même principe de digues transversales qui créent des espaces de stockage. Quand le Rhin est haut, y a des vannes qui s’ouvrent ça vient remplir les polders, c’est gravitaire.

Mais pour nous, c’est pas possible de le faire gravitairement parce que comme la Seine a été recalibrée au début des années 80, la Seine ne déborde plus. Donc on est obligés de recourir à du pompage pour remplir ces casiers. Donc pendant le débat public on nous a demandé pourquoi nous n’avions pas pensé à des méthodes gravitaires. Aussi bien on a pu leur répondre de manière qualitative mais pas quantitative. C’est-à-dire qu’on avait pas d’archives sur les éventuelles alternatives gravitaires qui ont été menées donc après le débat public on a fait faire des études hydrauliques par notre bureau d’étude Hydratech avec un recensement de toutes les alternatives gravitaires envisageables et on les a toutes étudiées à un stade très préliminaire. Mais c’était un stade suffisant pour démontrer qu’aucune alternative gravitaire qui permette d’avoir l’efficacité de la Bassée, ou s’il y a des alternatives gravitaires qui étaient comparables, il y a des contraintes énormes sur le territoire.

Par exemple, quelque chose qui pourrait être envisageable c’est venir mettre une digue en travers de la Seine là, en aval. Une grande digue qui viendrait couper finalement lit mineur et lit majeur, avec un clapet. Et puis vous fermez votre clapet, il n’y a plus d’exutoire en aval et vous venir remplir la zone. Mais ça veut dire que vous inondez tout le lit majeur alors que là justement l’intérêt des casiers c’est d’éviter les zones à enjeu. Donc s’il y a des alternatives gravitaires qui sont aussi efficaces que le pompage, a contrario elles créent des contraintes vraiment très importantes localement, contrairement à notre projet qui en crée, évidemment, mais moins que les alternatives gravitaires.

Quel avantage on trouve à ce format de structure de protection plutôt qu’à un barrage par exemple ?

Un barrage, on ne pourrait pas le faire là pour le coup. Sur la Seine, c’est pas possible ; c’est le principe de la digue que je vous ai expliqué là, une digue ou un barrage. Là, sur le coup on est sur une inondation totale de la zone sachant que vous avez des lieux habités, que vous avez des usages en place. Vous noyez tout et vous pouvez pas tout noyer, c’est pas possible surtout par exemple pour les carrières, on en a jusqu’en 2040 voire plus, c’est pas possible de venir noyer la totalité du territoire. Autant avec notre projet, on pourrait noyer l’activité d’extraction en tant que telle, c’est-à-dire par exemple vous avez des dragueuses ou des pelleteuses. Là, on dit 24 heures avant « attention, faut libérer la zone, on va venir stocker ». Ok la dragueuse, elle peut s’en aller, on va limiter la casse. Par contre le centre de traitement en tant que tel, c’est celui qui vient traiter les granulats, c’est-à-dire qui vient avec la cribleuse, qui trie les particules selon leur diamètre et puis après, on va charger sur les péniches avec ce qu’on appelle des sauterelles. Ce sont des grandes grues qui permettent de délier les granulats et de venir ensuite les trier, tout ça peut pas se noyer ça. Oui, c’est pas possible donc si vous voulez noyer ça, après pour indemniser … Oui, oui, c’est possible, ça … Et si vous aviez un grand barrage là, vous viendriez noyer l’ensemble.

Donc du coup, au niveau des 4 barrages qui existent à l’heure actuelle, là on a inondé des zones qui n’étaient pas du tout occupées ?

Si, on a inondé des zones. Pour le lac du Der (le lac Marne), on a inondé 3 villages à l’époque, c’est vrai, on a inondé 3 villages complétement. Mais c’est quelque chose, je pense, qu’on ne pourrait plus faire maintenant. On a déjà bien du mal à faire passer notre projet en venant noyer une habitation et une fleur, habitation de fleurs ou je ne sais trop quoi alors… Par contre dans le cadre des alternatives on a étudié la possibilité de mettre des barrages sur l’Yonne. Par ce que là, on n’a pas parlé du fonctionnement hydraulique… Là on est sur la Seine, mais on est à l’amont immédiat de la confluence avec l’Yonne, ce qui veut dire que nous agissons indirectement sur l’Yonne. C’est-à-dire que quand la crue arrive, on vient ralentir la Seine pour laisser passer l’Yonne, et pour réduire les niveaux d’inondation…

Les pires scénarii de crues sont en fait des crues simultanées. Les pointes de crues sont toujours déphasées mais c’est plutôt des crues successives. L’Yonne est toujours beaucoup plus réactive que la Seine mais il faut plusieurs trains d’événements pluvieux pour avoir une concomitance. On va avoir un premier événement pluvieux qui va arriver, l’Yonne va réagir au bout de trois jours alors que la Seine va réagir au bout d’une semaine. Par contre si vous avez un deuxième épisode pluvieux trois ou quatre jours plus tard, la deuxième pointe de crue de la Seine se conjugue avec la première pointe de crue de l’Yonne et dans ce cas-là vous allez avoir à la confluence des niveaux et des débits très élevés. Donc on vient agir à ce moment-là en fait.

Parmi les scénarii étudiés nous avons étudié des scénarii de grands barrages sur l’Yonne mais il y avait une faisabilité technique qui n’était pas évidente non plus, un gel des terrains de manière permanente par ce que là on maintient les usages à l’intérieur des casiers. Ce qu’il faut savoir c’est que l’on ne vient pas acheter tous les terrains pour les transformer en prairies, qu’il n’y ait plus aucun usage et pouvoir inonder tous les sept ans. On maintient par ce qu’on a des niveaux d’inondation de 2 à 3 mètre, donc c’est compatible avec un maintien des usages. Mais en sécurité : on remplit, on vide, ensuite on vient nettoyer la zone et après les usages recommencent à l’intérieur de la zone. Les barrages que nous avons étudiés sur l’Yonne ont été sur des hauteurs de submersion de 10 à 40 mètres ce qui obligeait à neutraliser complétement les terrains. C’était cher, c’était sur des terrains qui n’étaient pas forcément très étanches, il y avait aussi des systèmes de pompage pour certains des sites. Voilà, donc c’est ce projet-là qui a été privilégié par rapport aux ouvrages de grands barrages.

Si le projet de casier pilote s’avère concluant, ne risque-t-il pas d’être difficile de refaire accepter la construction de nouveaux casiers, que l’on aura dans un premier temps éliminés ? Et dont on aura montré les limites de faisabilité ?

Clairement celui-là je pense qu’on ne le fera jamais par ce qu’avec cette fameuse zone tourbeuse, en plus il a un volume de stockage qui est faible. Oui je pense que celui-là on le fera jamais, effectivement. Après on a une enveloppe financière qui est limitée quoi, on ne doit pas dépasser 100 millions d’euros TTC. Donc c’est vrai qu’on a une contrainte financière qui est très forte. 100 millions d’euros ça parait énorme mais finalement on l’atteint assez vite. Donc si ce projet de casier pilote est concluant, de toute façon la décision sur la réalisation du projet global n’est pas avant 2030. Par ce que les travaux auront lieux vers 2020, ensuite on est sur une période d’expérimentation qui dure cinq en dont on est en 2025, ou 2030, donc la décision de poursuivre ne sera pas prise avant 2030. Et d’ici là on ne peut rien savoir, sur nos possibilités de financement, sur nos évolutions de statuts… En plus ce qu’il faut savoir c’est qu’on est dans une période vraiment transitoire. Le territoire évolue sans arrêt, notamment avec les carrières. Donc je pense que l’avantage que l’on aura d’ici 2030-2035, c’est qu’on aura une situation un peu stabilisée par ce que toute l’extraction de matériaux aura été faite. Par contre il y aura des plans d’eau partout donc c’est vrai qu’il faudra repenser nos tracés de digues avec l’ensemble de ces carrières extraites et des surfaces de gravières. Donc pour le moment, un casier pilote c’est déjà bien assez compliqué comme ça… !

Ce projet a été lancé sur la base de dix casiers réservoirs. Nous n’envisageons aujourd’hui plus que la construction d’un unique casier pilote. Ce casier pilote est-il capable à lui seul de réduire l’impact des crues de manière significative ?

Non, non ça c’est sûr, mais il apportera quand même sa pierre à l’édifice. C’est-à-dire que l’on est sur du très long terme. Mais les barrages se sont construits sur du très long terme aussi. Les premiers barrages datent des années 30, donc voilà ça va faire presque 90 ans parce que ça a dû commencer à être réfléchi dans les années 20. Donc si vous voulez ça fait 90 ans qu’on équipe le bassin de la Seine, tout ça se fait vraiment sur le long terme. Donc on construit à chaque fois un ouvrage en plus, un ouvrage en plus. Le projet global avait effectivement un impact significatif qui permettait de réduire les niveaux d’eau de 25 à 35cm. Tandis que là on est plus sur du 5cm, 5 à 10cm mais c’est toujours ça de pris. Quand on compare à d’autres exemples en France et en Europe de sortes de polders, on est sur des volumes de stockage de cet ordre-là, de 8 à 10 millions de mètres cubes. Il y a en a qui font 30 millions de mètres cubes et puis il y en a qui font 8 à 10 millions de mètres cubes. Par ce que là on est sur un objectif de 10 millions de mètres cubes.

Quant aux craintes de contamination des nappes et des sols par l’eau qui sera acheminée dans les casiers via le système de pompage, comment y répondez-vous ?

Je ne sais pas, je me demande toujours pourquoi les gens ne se posent jamais la question d’une inondation naturelle. Dans le cadre d’une inondation qui se fait naturellement ou la Seine déborde dans son lit majeur c’est pareil. Enfin, peut-être que la dynamique n’est pas la même, effectivement par pompage on remplit plus vite que dans le cas d’une inondation naturelle et peut-être sur des hauteurs supérieures mais voilà, pas plus loin qu’à l’amont de Bray sur Seine, la Seine déborde naturellement. Donc pourquoi les gens ne se posent-ils pas la question…

Comment expliquez-vous donc la défiance que suscite le projet ?

Je ne sais pas… Franchement je ne sais pas… Peut-être à cause de la réserve naturelle… De là à ce que ce soit une crainte vraiment justifiée…

De toute façon pour l’étude d’impact du projet il faut qu’on affine déjà des modélisations hydrologiques donc quantitatives : là c’était surtout sur la crainte de remontées sur les sites habités, dans les caves, ou mêmes des remontées au niveau du sol pour les riverains, donc là ce modèle hydrogéologique avait été développé par Armines et permis de localiser certaines protections sous-terraines comme les palplanches, à certains endroits, donc là encore les naturalistes crient au scandale : « On va mettre des palplanches, ça va modifier la circulation souterraine ça va avoir un impact quantitatif sur la nappe. » Sur le risque qualitatif on a aussi déjà mené quelques études, par exemple sur le problème de diffusion des contaminants présents dans la Seine, de contamination dans la nappe en fait. Donc là ça avait surtout porté sur les métaux et les produits phytosanitaires, mais c’était une modélisation simplifiée en 1D en fait, sur tout dans la zone non saturée. Donc on doit encore affiner nos modélisations, surtout là ça fait partie des recommandations que l’Etat nous a formulées. Par ce qu’on a fait une demande de cadrage à l’Autorité environnementale. Donc l’Autorité environnementale en fait, c’est les services de l’Etat qui nous disent : « Voilà ce que vous devrez prévoir et démontrer dans votre étude d’impact, voici les craintes qu’on a et vous devrez lever les doutes pour que le projet soit accepté. Donc il y a tout l’aspect modélisation hydrogéologique et l’impact du sur stockage de sel sur la qualité des eaux sous-terraines.

Ne faites-vous appel qu’à des experts extérieurs pour la réalisation d’études scientifiques ou avez-vous également des experts en interne ?

Alors nous de formation on est hydrauliciens. Mais pour autant on suit quand même toutes les études multithématiques qui ont été menées sur le sujet. On va aussi bien du foncier, à la géologie, aux géotechniques, à l’hydraulique et l’hydrogéologie. Voilà. Donc on se renforcera dans les prochaines années avec plutôt un géotechnicien parce que là pour le coup on n’a pas les compétences génie civil et géotechniques. Après on fait appel à des bureaux d’étude pour les études nécessaires. C’est pas nous qui faisons les études en interne. On en fait la maîtrise d’ouvrage. On assure la maîtrise d’ouvrage on les vérifie, par contre c’est pas nous qui réalisons les études. Et sur Ludovic Oudin, sur l’aspect expertise hydraulique, là ce n’est pas nous qui l’avons demandé, c’est le débat public. Pendant le débat public, tout le monde avait des interrogations sur le projet VNF

La notion de neutralité hydraulique…

Voilà donc neutralité hydraulique c’est un concept que les gens ont beaucoup, beaucoup de mal à comprendre. Je pense que personne n’a compris et même une fois qu’il y a eu l’expertise hydraulique, personne n’a vraiment compris. Qu’est-ce que ça veut dire ? Neutralité hydraulique ça veut dire que tout le monde a peur que l’aménagement de VnF n’accélère les écoulements à l’aval. Et que finalement notre équipement ne vienne que compenser cette augmentation. Donc en fait VnF devait prouver que l’aménagement Bray-Nogent n’avait aucun impact sur les écoulements, les écoulements locaux, sur leur tronçon de projet, notamment sur la partie écologique. C’est-à-dire que voilà, aussi bien en période de basses eaux, de moyennes eaux, que de crues, qu’il n’y ait pas d’impact sur la nappe. Par ce que voilà, si vous abaissez le niveau d’eau vous abaissez le niveau d’eau de nappe, doc vous abaissez le degré d’hydromorphie des sols donc ça a un impact sur les petites plantes, donc c’est pas bon. Surtout pour la réserve. En crue il fallait qu’ils conservent la potentialité d’expansion des crues en basse saison parce que c’est une zone d’expansion des crues reconnue. Il ne fallait pas qu’ils accélèrent les écoulements à l’aval, donc reproduire les erreurs du passé en fait parce que dans les années 80, la Seine a été rectifiée totalement et ça a eu un impact sur les inondations parce que ça a accéléré les écoulements. Donc c’est ça la neutralité hydraulique.

Une expertise complète a donc été sollicitée à ce sujet. Donc Ludovic Oudin a expertisé toute la partie hydrologique de nos deux modèles, donc les transformations flux débit sur nos deux modèles, à VnF et à nous. Et après il y a eu un expert belge sur notre modèle hydraulique et il y a eu un expert hydraulique sur le modèle hydraulique de VnF.

J’aurais aimé vous interroger sur l’étude de l’OCDE que vous avez sollicitée et qui est parue en janvier 2014. D’une part pourquoi l’avoir sollicitée et d’autre part, quelle est votre réaction par rapport à cette étude ? Est-elle conforme à ce que vous attendiez ?

Oui alors les résultats de l’étude OCDE viennent confirmer le sentiment général sur des grands aspects. Voilà alors déjà le fait qu’on ait un déficit de protection sur le bassin de la Seine, donc sur la région parisienne. La région parisienne est insuffisamment protégée contre les inondations. Qu’il y a un problème aussi au niveau de la gouvernance du risque d’inondation qui est très disséminée entre les différents ministères. Voilà donc c’est le ministère de l’intérieur pour la protection civile, le ministère de l’environnement pour la prévention du risque inondation d’un point de vue plus hydraulique ou environnemental, les mairies qui sont en charge de la protection des riverains. Voilà donc il y a beaucoup de responsabilités qui sont disséminées entre plein de services différents, il y a un déficit de gouvernance… L’étude OCDE elle nous a aussi permis de confirmer les coûts qui seraient générés par une inondation majeure dans la région Ile de France. Donc les coûts aussi bien directs que les coûts indirects. Par exemple, si le métro est HS pendant 6 mois vous ne pouvez plus travailler donc ça a un impact économique. Donc voilà ça a permis de confirmer ces coûts. Et puis ça a permis de confirmer les éléments d’amélioration qui étaient déjà pressentis, qu’on pressentait déjà.

Donc en fait les recommandations de l’OCDE ont été rendues publiques le 24 janvier, et donc on va travailler dessus et les prendre en compte éventuellement dans le cadre de la deuxième phase du PAPI. Parce que notre PAPI il est sur la période 2014-2019 mais il est en deux phases. Première phase 2014-2016 avec des premières actions et une première convention de financement. Mais il y a une révision à mi-parcours : fin 2016-début 2017 où on pourra intégrer de nouveaux maîtres d’ouvrage, donc des nouveaux conseils généraux. On voudrait par exemple intégrer les Yvelines et le Val d’Oise, pour que tous les départements de la région Ile de France soient inclus. Et puis éventuellement présenter de nouvelles actions qui seraient liées aux recommandations de l’étude OCDE.

La sollicitation de l’étude nous a permis d’appuyer le PAPI, d’appuyer les actions qu’on porte, les actions de prévention du risque inondation qu’on porte, et puis vraiment sensibiliser tout le monde au risque inondation et qu’il y ait une organisation et un regard un peu neutre sur le risque inondation en Ile de France.

Mais c’est vrai qu’à la lecture de ce rapport, ils insistent beaucoup sur les mesures non structurelles…

Ils insistent beaucoup. Bon, mais la Bassée et le casier pilote est la recommandation numéro 10 de l’étude OCDE. Donc ils cautionnent notre projet. Ce qui est bien aussi avec l’OCDE c’est qu’on a un regard international et l’expérience de ce qui se fait ailleurs donc ça apporte vraiment un regard nouveau sur nos actions de prévention des inondations en France et dans la région Ile de France.

Vos financements vous viennent de l’Etat et de l’Agence de l’Eau Seine Normandie c’est bien ça ?

Alors, nous on autofinance, à 20% du montant. Sur le projet de la Bassée, l’Etat a financé à 50 %, donc il reste 30 % à trouver, et on va les répartir entre la région Ile de France et l’Agence de l’Eau, sachant que l’Agence de l’Eau, elle financera tout ce qui est à caractère environnemental, tout ce qui est étude écologique, inventaire faune-flore, surement constitution des dossiers réglementaires de l’étude d’impact. Ils ne vont pas financer l’aspect protection contre les inondations.

Dans le débat public, l’idée que les collectivités locales concernées contribuent au projet était soulevée.

Oui, ça a été soulevé après je ne suis pas sûre que ça a été une préoccupation … Oh, vous n’avez pas lu tous les verbatim quand même, si ? Vous avez lu tous les verbatim ? Parce que ça en fait du travail, avec 40 pages à chaque fois

Euh, non. On a travaillé mais on a pas tout lu. C’est plus aussi quand on lit les articles de la presse locale, avec notamment Yves Jégo qui s’emporte un peu …

Ben je ne sais pas, moi je trouve que c’était plutôt apaisé. Alors après, il y a ce qu’ils nous disent en réunion et puis ce qu’ils disent à de tierces personnes. Malgré tout, sur les élus locaux, ils sont lassés évidement que le projet, on en parle depuis longtemps et qu’il n’y ait toujours pas de décision de prise, ça c’est normal. Ils veulent des mesures d’accompagnement, c’est normal aussi. Après, moi je trouve qu’on a plutôt de bonnes relations avec eux. Alors, ils nous connaissaient pas non plus forcément, c’est-à-dire qu’il y a notre prédécesseur qui avait été très présent sur le terrain au début des années 2000, qui les avait vu et revu. Et du coup, l’équipe a changé. Donc, ils n’avaient pas non plus visualisés de nouveaux visages, de nouveaux interlocuteurs, même au moment du débat. Par contre, là depuis novembre, on les a vraiment vus à de nombreuses reprises donc, là ils nous identifient mieux, c’est plus clair pour eux. Moi, je ne ressens pas d’animosité spécifiquement.

Non, ce n’est pas tant l’animosité mais plutôt une espèce de crainte qui peut être justifiée, non ? La question du financement, sur des projets comme ça, c’est une question centrale …

Sur le financement, ben je pense qu’on les a rassurés sur ce point-là. Ah oui, ben Yves Jégo, ben Montreux ça participerait bien sûr. Bien sûr, enfin pas bien sûr, mais si on mettait en place une redevance. Oui, parce qu’on a mis en place une redevance pour services rendus – étiage, pour faire financer le fonctionnement de nos ouvrages. Si, on était amené pour compléter notre financement, si par exemple pour la partie travaux, on n’arrivait pas à mettre en place un financement suffisant avec l’Etat, la Région, l’Agence de l’Eau, on pourrait réfléchir effectivement à la mise en place d’une redevance pour services rendus – inondations. Cette redevance, elle pourrait être mise en place une fois les travaux réalisés, pour participer à l’entretien, à la maintenance, aux frais de fonctionnement et dans ce cas-là, on a réfléchi effectivement au fait que les communes bénéficiaires de l’aménagement participent. Donc autant Bray-sur-Seine, Marolles, enfin toute la partie où se situe l’aménagement, elle ne participerait pas au financement, par contre, Montreux qui est la première ville concernée – c’est vraiment la ville où l’efficacité serait la plus ressentie, puisqu’elle est directement à l’aval –oui.

Est-ce qu’il n’y a pas une difficulté à définir les communes qui bénéficient de l’ouvrage ?

Oui, il faudrait qu’on trouve un critère, mais ça a déjà été fait. Il y a l’EPTB Oise-Aisne, donc sur l’Oise, qui a mis en place ce système. En fait, c’est-à-dire qu’il a mis en place ce système de redevances qui permet de financer l’entretien des ouvrages et pour lesquels les communes qui sont bénéficiaires de l’ouvrage paient. Mais ça, c’est assez facile à déterminer. Quand vous avez des modèles hydrauliques qui vous permettent de dire, avec et sans aménagement, voilà le delta de niveau d’eau et des zones qui sont pas inondées, vous pouvez faire ce genre de redevances après.

Tout à l’heure, vous évoquiez un déficit de gouvernance qui est notamment soulevé dans le rapport de l’OCDE. Est-ce qu’à votre niveau, vous ressentez quelque-chose qui complique votre tâche ?

Ben, c’est sûr que c’est très dilué. On travaille avec la DRIIE Ile de France, qui s’occupe de tout ce qui est directives inondations, mise en place du PGRI (Plan de Gestion du Risque Inondation), des stratégies locales mais on est aussi porteur de certains comités de travail. Il y a la préfecture de police qui s’occupe de la sécurité civile. Bon, il y a une répartition des tâches qui se fait, mais bon on a un peu l’impression que des fois, il y a des compétences qui se superposent. On a des limites de prestation qui sont un peu floues. Effectivement, ce n’est pas toujours évident. Par contre, dans l’étude de l’OCDE, c’est très bien expliqué, moi j’ai trouvé qu’on comprenait bien qui était responsable de quoi, c’est précis.

Est-ce qu’on peut envisager en France que dans les années à venir, il y ait éventuellement une réforme ?

Des réformes, on est en plein dedans avec la réforme des grandes métropoles qui viendrait peut être simplifier éventuellement les choses puisque la compétence de gestion d’eau des milieux aquatiques reviendrait à ces grandes métropoles justement. Donc, ça viendrait centraliser un peu les compétences dans le domaine de la gestion d’eau, de la prévention des inondations. Après sur le territoire d’une grande métropole mais nous, nos ouvrages par exemple, ils sont situés très en amont. Donc comment est-ce qu’on articule, ça je ne sais pas, on va le voir dans les années qui viennent en fait.

Au niveau de la communication qui est faite, donc là comme vous dites ce sont des projets qui sont très en amont. Là, les gens localement commencent à être informés. Est-ce que les parisiens sont au courant de ce qui se passe et quel est leur ressenti ?

Celui-là, moins que les autres quand même, parce que par rapport à nos barrages, on est en région Ile de France. En fait, c’est bien simple, pendant le débat public, on a eu la moitié des réunions qui s’est fait sur le territoire du projet et l’autre moitié qui s’est fait à Paris, à Nanterre, à Melun, dans toutes les villes en fait qui sont soumises au risque inondation. Autant on a eu une participation forte, voire très forte sur la Bassée, autant à l’aval il n’y avait personne quoi. Bon, après est-ce que ça vient de la campagne de communication qui n’était pas bien faite, j’en sais rien mais les parisiens, on a bien du mal à les sensibiliser au risque inondation.

Pourtant ils sont les plus touchés non ?

Paris, non au contraire, non ce n’est pas les plus touchés. Ils ont un système de protection qui est calé sur la crue 1910 donc ils sont moins touchés. En 1910, c’était l’apocalypse à Paris, mais depuis, on a fait des travaux en fait. Mais par contre, une ville comme Alfortville, elle est très très vulnérable par rapport au risque inondation. C’est une ville qui est basse, qui est moyennement protégée, qui serait inondée sur 95% de son territoire.

Ce n’est pas arrivé encore qu’elle soit inondée à 95 % ?

Ben, je ne sais pas. Je pense qu’en 1910, elle a dû être inondée à 95% de son territoire mais ce n’était pas urbanisé comme ça l’est maintenant. C’était pas du tout la même urbanisation que maintenant.

De toute façon, il y a un marché ? Vous devez avoir, ne serait-ce qu’un maitre d’œuvre ?

Oui, mais le maitre d’œuvre, il sera rémunéré dans le cadre de la première phase d’étude, pour la conception du projet, mais ce n’est pas ça qui coute le plus cher. Et marché, ça ne veut pas dire financement, c’est la procédure qui vous permet d’attribuer et de faire la conception de l’aménagement. Pour ça il vous faut le financement. D’abord il faut avoir les sous pour pouvoir lancer un marché. Donc on a les sous, enfin on va les avoir normalement, pour toute la phase d’étude. Par contre, il faudra refaire un tour de table des financeurs fin 2016 pour financer les travaux. Il n’y a pas encore de garantie, mais on est confiant. Là, on va quand même aller jusqu’à l’enquête publique, avec notre convention donc c’est quand même bien établi. On n’est plus dans la simple faisabilité.