Paris peut-il couler ?

Paris peut-il couler ?

La mise en place d'un cinquième ouvrage pour protéger Paris

Une vocation environnementale incertaine

3 avril 2014 | Commentaires fermés

Une vocation environnementale incertaine

Avant la fin du XIXème siècle et l’aménagement de la Seine la rendant plus navigable, la Bassée était une zone d’expansion de crue qui subissait régulièrement des inondations naturelles. Aujourd’hui, cette zone n’est plus inondable et le projet de l’EPTB Seine Grands Lacs s’inscrit officiellement dans une démarche écologique de restauration de la zone humide  de la plaine alluviale de la Bassée. S’il semble se dégager un relatif consensus sur ce point, le débat public auquel est soumis le projet révèle des divergences entre certains acteurs expliquant les nombreuses crispations autour de sa dimension environnementale. En effet, au-delà des désaccords de fond qui étaient prévisibles entre le maître d’ouvrage et les associations naturalistes, il se dégage des concertations l’idée que ce dernier n’ait pas tout à fait pris la mesure que revêtait cette question aux yeux des acteurs locaux, ni investi les moyens nécessaires afin de proposer des mesures satisfaisantes dans le sens d’une restauration écologique efficace. Une fois cette négligence environnementale mise en évidence, comment une nouvelle étape de concertation et de négociation peut-elle déboucher sur une évolution constructive de la controverse et à terme, sur une prise de décision ?

Vocation environnementale. Cartographie des acteurs Une vocation environnementale incertaine. Cartographie des acteurs

EPTB Seine Grands Lacs

Lors de la présentation du projet d’aménagement de la zone de la Bassée au cours du débat public, l’EPTB Seine Grands Lacs fait de sa dimension écologique l’un de ses deux piliers, au même titre que la  protection de la région Île-de-France contre le risque d’inondation. Au cours de la réunion thématique sur les questions environnementales tenue dans le cadre du débat public, son directeur des services légitime d’ailleurs cet aspect en se rangeant du côté d’engagements politiques plus globaux.

« Nous avons en France une politique majeure de restauration des zones humides qui s’inscrit dans des engagements européens que beaucoup de personnes dans la salle connaissent, […] pas uniquement pour respecter des textes mais parce que préserver, restaurer et gérer des zones humides est fondamental dans la gestion équilibrée de la ressource en eau. » (cf. Commission particulière du débat public Crue Seine Bassée. Verbatim de la réunion thématique « Enjeux Environnementaux » du 19 janvier 2012 à Gouaix [en ligne]. 19/01/2012. Disponible sur : www.debatpublic-crueseinebassee.org/DOCS/VERBATIMS_SYNTHESES/GOUAIX/BASSEE190112GOUAIX_VERBATIM.PDF (Consulté le 24/04/2014).)

L’idée d’une restauration de la zone humide de la plaine alluviale de la Bassée est d’ailleurs accueillie positivement par différents acteurs naturalistes de la controverse…

« Il y a tous les aspects positifs que l’on peut voir en disant « ils vont remettre de l’eau dans une zone qui n’est plus inondée et ça va peut–être permettre à certaines espèces de retrouver leur habitat d’origine dans les secteurs où ils mettront de l’eau régulièrement » et dans cette volonté de vocation écologique, ce n’est pas inintéressant. » (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)

…même si ceux-ci ne se privent pas de demeurer critiques quant aux propositions du maître d’ouvrage, comme il était raisonnable de le prévoir.

« Que dire aussi du projet visant à créer des zones de stockage de crues. Réinonder la Bassée aval est une idée alléchante pour l’écologie mais le faire à grand frais et à l’aide de pompes et de digues, n’apparaît pas la meilleure solution. » (cf. ANVL (Association des Naturalistes de la Vallée du Loing et du massif de Fontainebleau). Site de l’ANVL [en ligne]. Disponible sur http://www.anvl.fr/ (Consulté le 28/12/2013).)

Une des critiques les plus acerbes est d’ailleurs exprimée par l’AGRENABA qui estime qui si la dynamique alluviale est aujourd’hui à ce point perturbée et la zone de la Bassée en besoin de restauration, c’est en premier lieu à cause des quatre ouvrages fluviaux gérés par l’EPTB Seine Grands Lacs.

« […] on est conscients que ça, c’est un fonctionnement qui n’existe plus aujourd’hui parce qu’il y a les lacs, les grands lacs-réservoirs. Mais malgré tout si il pouvait y avoir un retour des inondations, des crues, pour nous c’est tout bénéfique. » (cf. Entretien avec l’AGRENABA)

Ainsi, si les acteurs semblent donc s’accorder sur la nécessité d’intervenir pour préserver le patrimoine écologique de la Bassée, c’est paradoxalement au niveau de la dimension environnementale du projet que cristallisent de nombreuses tensions et points de désaccords. Ceux-ci découlent-ils de divergences de positions quant aux mesures efficaces à prendre pour atteindre cet objectif commun ? Sont-ils le fruit d’un manque de concertation sur ces questions qui font pourtant l’objet d’un vif intérêt de la part d’acteurs locaux variés ? Ou traduisent-ils, au-delà du consensus apparent, une dissymétrie de l’importance accordée par chacun à ces questions et des moyens alloués pour parvenir à une solution tant réaliste que constructive ?

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Le débat public auquel est soumis le projet d’aménagement de la Bassée à la requête de la CNDP est l’occasion de réunir tous les acteurs impliqués pour aborder collectivement le projet dans toutes ses dimensions. Il ressort donc des multiples réunions l’importance accordée par chacun de ces acteurs aux différentes thématiques inhérentes au projet.

Verbatim de la réunion publique thématique « Enjeux environnementaux » du 19 janvier 2014 à Gouaix…

Or plusieurs témoignages convergent dans le sens d’un surprenant retard du maître d’ouvrage quant aux questions d’ordre environnemental. Celui-ci aurait d’une part mal apprécié l’importance de ce volet aux yeux de la population et autres acteurs locaux…

«Cependant au début du débat public, ils se sont fait surprendre, en pensant que l’aspect écologique ne serait pas un problème puisqu’ils pensaient que ce serait un projet bien vu d’autant plus qu’ils proposaient des solutions d’inondations écologiques. » (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)
«Au début, ils y croyaient dur comme fer en pensant que tous les écologues allaient applaudir. Ils avaient l’expérience des grands lacs où tout le monde va voir les oiseaux qui sont là-bas.» (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)

… et d’autre part fait montre d’une connaissance approximative des véritables enjeux environnementaux au niveau local.

« Un certain nombre de questions environnementales se sont révélées aux yeux des représentants de l’EPTB Seine Grands Lacs au cours du débat public. Pourtant, un des objectifs du projet d’aménagement de la Bassée est de restaurer le milieu. En tout état de cause, le projet était peu construit sur le plan écologique mais le maître d’ouvrage a approfondi son examen de cette thématique en cours de débat. » (LEGRAND, Patrick (directeur de publication). Crue Seine-Bassée, Débat public, Projet d’aménagement de la Bassée, Compte-rendu du débat [en ligne]. Commission Nationale du Débat Public, Paris. 30/03/2012. Disponible sur : http://www.debatpublic-crueseinebassee.org/DOCS/CR_ET_BILAN/COMPTE_RENDU_23032012_WEB.PDF (Consulté le 28/12/2013). – cf. Bilan Bibliographique)

Cette sous-estimation de l’importance de la dimension environnementale du projet semble trahir une dépréciation générale de l’écologie en tant que critère fondamental de la part du maître d’ouvrage. Christophe PARISOT déplore ainsi l’absence d’étude scientifique permettant d’envisager tant quantitativement que qualitativement et en connaissance de causes, l’impact de l’ouvrage sur l’environnement.

«Après, aussi tout dépend des moyens qu’ils vont se donner pour faire des véritables études scientifiques. Ils parlent de tester la technique, pour voir si le système marche, la technique du Shadock où on pompe l’eau pour la mettre dans les casiers mais aujourd’hui pour faire un suivi écologique, il faudrait qu’il y ait des laboratoires de recherches sélectionnés pour travailler dessus et je n’en entends pas parler pour le moment.» 
« C’est un projet sur lequel on joue beaucoup à l’apprenti sorcier en partant beaucoup du principe, les bureaux d’étude en écologie étant les premiers à le dire, « Les espèces vont s’adapter, ils vont grimper, ils vont se sauver, et ça va aller ».» (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)

Il semble alors que la question écologique ait été reléguée au second plan dans l’élaboration du projet précédant le débat public. Cependant, d’autres acteurs pourtant acquis à la cause écologique tels que Julien SCHWARTZ n’incriminent pas l’EPTB Seine Grands Lacs pour l’absence, lors du débat public, d’étude écologique approfondie. Celui-ci prend en compte la procédure dans laquelle s’inscrit le projet. Ces études devront certes être réalisées, mais elles n’étaient pas à exiger lors du débat public.

« Moi je suis pas aussi critique que Christophe Parisot, mais simplement du fait que par rapport à un projet d’aménagement comme ça, il y a différentes étapes. Là on sort du débat public et moi on m’a fait comprendre, les gens de Seine Grands Lacs m’ont fait comprendre que c’était pas… qu’on était dans le stade des pré-études et que les études d’impacts allaient venir plus tard. C’est pour ça que pour le moment je me contente des études qui sont faites […] »
« […] si  au moment des études d’impact le projet se précise, il y a eu enquête d’utilité publique et finalement par exemple on part sur le fait que le premier casier se fasse, il faudrait pas qu’à ce moment-là ils nous disent, « voilà on a fait les études d’impact, on vous les a présentées… » C’est sûr que là on sera pas d’accord du tout, il faudra, en termes d’études d’impact, qu’il y ait vraiment des études beaucoup plus poussées que ce qui a été fait jusqu’à maintenant. » (cf. Entretien à l’AGRENABA)

C’est cette même conclusion qui est dégagée par la CNDP des réunions s’étant tenues dans le cadre du débat public.

« Seules des études plus poussées permettront d’apporter une réponse définitive sur ce point. » (LEGRAND, Patrick (directeur de publication). Crue Seine-Bassée, Débat public, Projet d’aménagement de la Bassée, Compte-rendu du débat [en ligne]. Commission Nationale du Débat Public, Paris. 30/03/2012. Disponible sur : http://www.debatpublic-crueseinebassee.org/DOCS/CR_ET_BILAN/COMPTE_RENDU_23032012_WEB.PDF (Consulté le 28/12/2013). – cf. Bilan Bibliographique)

Seine et Marne Environnement assure alors que la dimension écologique du projet, au départ mise en avant par le maître d’ouvrage comme pilier, est devenue secondaire. Son objectif semble n’être plus de restaurer la zone humide de la Bassée mais simplement de limiter l’impact négatif de l’ouvrage sur l’environnement.

« ce n’est pas un programme de restauration de la Bassée. Ce qui est programmé, c’est ce qu’on pourrait appeler du moins pire. » (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)

Selon Violaine MESLIER, la vocation environnementale du projet ne serait même qu’un simple argument de communication pour le faire mieux accepter auprès des acteurs territoriaux.

« Le véritable objectif c’est effectivement de réduire les inondations sur Paris. Point. Après ce qui se passe sur le territoire c’est plus pour cacher. C’est de la com’. Clairement. » (cf. Entretien à l’AGRENABA)

Le débat public apparaît donc comme une concertation, certes constructive, mais ayant mis à mal la crédibilité du maître d’ouvrage en matière de propositions environnementales. Les constats établis par les différents acteurs mis à contribution et dont fait état la CNDP dans le compte rendu du débat public, ont en effet contribué à l’instauration d’un climat de défiance vis-à-vis du maître d’ouvrage.

Tout d’abord, certaines associations naturalistes telles que Seine et Marne Environnement contestent la véritable vocation environnementale du projet, qui selon eux, consiste en un aménagement strictement hydraulique.

« On n’est pas sur quelque chose de restauration d’une zone humide avec un fonctionnement le plus naturel possible de façon à ce que ça marche le plus possible. On a un grand bassin, on le remplit d’eau et on le vidange. On est sur quelque chose de purement hydraulique. » (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)

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Au lendemain du débat public s’est ouverte une nouvelle page du projet. Celle-ci s’organise en de nombreuses réunions, prenant en compte les conclusions du débat public et mettant à contribution de nombreux acteurs, consultés plus assidûment sur les questions environnementales. Cette nouvelle étape est louée par le maître d’ouvrage…

« Et on a eu énormément de questions de la part des locaux sur l’impact du projet – impact sur tout, sur les usages, sur les habitats, sur faune-flore, sur la nappe souterraine, aussi bien en qualitatif qu’en quantitatif. » (cf. Entretien avec Amélie ASTRUC)

… comme par les acteurs impliqués.

« Comme les années précédentes, la réserve porte la plus grande attention aux projets d’aménagements de la Seine (Bassins réservoirs et Mise à grand gabarit) et participe activement à l’ensemble des réunions organisées afin de défendre au mieux les intérêts de la réserve naturelle. » (AGRENABA. Rapport d’activité 2013 de la Réserve Naturelle La Bassée. 31 pages. Disponible sur : http://www.reserve-labassee.fr/documents/download/rapport-d-activite-2013-2 (Consulté le 23/04/2014).)
« […] le comité du débat public là, qui a organisé le débat public, je sais pas si ça les a vraiment forcés à se comporter comme ça, mais c’est vrai qu’ils font les choses, comme tu dis, très bien. Ils essaient d’être le plus transparents possible, ils font participer au maximum les acteurs du territoire avec ces ateliers. Je trouve ça c’est très bien. Y a des dizaines années, ça se passait pas comme ça. » (cf. Entretien à l’AGRENABA)

De nombreux aspects concrets de la question générale de l’impact environnemental d’un cinquième ouvrage de protection contre le risque d’inondation y sont évoqués, et chacun est libre d’y exprimer son avis pour faire évoluer les propositions du maître d’ouvrage.

Tout d’abord émergent des interrogations quant à une éventuelle contamination des nappes. En effet, l’eau acheminée artificiellement vers le casier-réservoir va s’infiltrer dans le sol qu’elle est susceptible de contaminer, ainsi que les nappes phréatiques. La contamination des sols et des eaux de la région dans le cadre de tels projets est évoquée dans un article rédigé par des ingénieurs de l’Institut national de la Recherche Agronomique (INRA).

« Les menaces affectant l’intégrité des milieux aquatiques ont une double origine : d’une part, la modification des propriétés physiques et chimiques de l’eau suite aux différents usages (industriels, agricoles et domestiques) et, d’autre part, les systèmes de régulation des flux d’eau mis en place pour faciliter la navigation ou pour assurer la protection contre les inondations. » (KATERJI, Nader ; HOFLACK, Paul. Les pressions anthropiques et leurs impacts sur les situations qualitatives et quantitatives de l’eau dans le Bassin versant de la Seine. Le courrier de l’environnement de l’INRA. n°51. Février 2004. Pages 75-87. Disponible sur : http://www7.inra.fr/lecourrier/assets/C51Hoflack.pdf (Consulté le 31/01/2014). – cf. Bilan Bibliographique)

En ce qui concerne le projet d’aménagement en question, l’Agence de l’Eau Seine Normandie possède un certain nombre de réserves stratégiques d’eau pour l’agglomération parisienne dans la zone de la Bassée. Ces réserves seraient alors situées en dessous de certains casiers envisagés par l’EPTB Seine Grands Lacs. Elles pourraient donc potentiellement être polluées par l’apport d’une eau à la composition chimique différente.

nappes phréatiques AESN

Source: EPTB Seine Grands Lacs. Diaporama du Maitre d’Ouvrage lors de la réunion thématique « Enjeux Environnementaux » du 19 janvier 2012 à Gouaix [en ligne]. 19/01/2012. 23 slides. Disponible sur : www.debatpublic-crueseinebassee.org/DOCS/DIAPORAMAS/DIAPORAMA_MO_GOUAIX_19012012.PDF (Consulté le 24/04/2014).

« Si on fait venir dans les casiers de l’eau de la rivière, on va modifier la qualité de l’eau des nappes phréatiques, ces dernières étant considérées depuis très longtemps comme des réserves stratégiques pour l’agglomération parisienne. » (cf. Entretien avec Michel POULIN)

D’après certains scientifiques, une pollution de ces réserves serait alors catastrophique, privant l’agglomération parisienne d’une précieuse réserve d’eau potable.

 « C’est une réserve particulière. Ce n’est pas un grand réservoir. Quand on prélève dans une nappe alluviale ce n’est pas la même chose que lorsqu’on prélève dans un grand aquifère. Une nappe alluviale, c’est un aquifère qui a un temps de renouvellement assez rapide mais qui est très productif. Actuellement ces nappes phréatiques de la Bassée sont de bonne qualité. L’Agence de l’eau depuis les années 60 a repéré ces nappes phréatiques et a classé certains secteurs afin de pouvoir implanter des puits pour alimenter l’agglomération parisienne grâce à des tuyaux déjà présents. » (cf. Entretien avec Michel POULIN)

Cependant, ce conflit opposant deux entités publiques n’est pas virulent. En effet, l’Agence de l’Eau Seine Normandie participe au financement du projet d’aménagement de la Bassée par l’EPTB Seine Grands Lacs. Il semble donc qu’il soit possible de prendre en compte les menaces de contamination ou de pollution environnementales, lorsque celles-ci émergent des phases d’étude, afin de proposer une alternative constructive satisfaisante.

Un second point d’inquiétude exprimé par les associations environnementales porte sur les menaces de la faune locale. La biodiversité est-elle menacée par un dispositif motorisé acheminant des eaux de composition différente et en quantité colossale vers la zone de la Bassée ? En effet, Seine et Marne Environnement redoute que de nombreuses espèces aquatiques ne soient mises à mal par le dispositif de pompage. C’est donc pour eux un véritable danger pour les réserves de poissons de la région.

« Après on a le problème des pompes, il y a beaucoup de questions sur qu’est-ce qui passe dans une pompe. Un poisson va-t-il sortir indemne de son passage dans une pompe ? Est-ce que tout ce qui va passer dans la pompe va ressortir vivant ? On ne sait pas du tout. » (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)

 »Conclusion

Ainsi donc, il se dégage de cette analyse que, suite aux dysfonctionnements mis en exergue lors du débat public, une phase de concertation et de négociation se soit ouverte, étant plus en phase avec les attentes des acteurs et les objectifs du maître d’ouvrage. Pour autant il est primordial de rappeler au lecteur que cette évolution de la controverse ne signifie pas l’aboutissement à un consensus général sur les questions environnementales soulevées. Un consensus ne doit en effet pas nécessairement être atteint pour que la concertation et la négociation aient porté leurs fruits.

« S’il ne faut pas confondre le déroulement d’une controverse avec la purge de toutes les oppositions, il n’en reste pas moins que ce processus réduit les questions faisant problème et circonscrit les positions de la plupart des acteurs. » (cf. LASCOUMES, Pierre. Chapitre 7 : De l’utilité des controverses socio-techniques. Journal International de Bioéthique. 2002/2, volume 13. Pages 68-79. Disponible sur 10.3917/jib.132.0068 (Consulté le 15/04/2014). ISBN : 274720393X)

Des désaccords demeurent effectivement entre les acteurs.

En voici un exemple :

Si l’une des premières conséquences du débat public est d’avoir réduit l’ampleur du projet de dix casiers-réservoirs à un unique casier-pilote, ce notamment pour se livrer à une phase d’étude de l’équipement en fonctionnement, les associations naturalistes insistent sur le fait que l’impact environnemental n’en demeure pas moins un sujet de préoccupation de premier plan à ne pas négliger. Entre autres, Seine et Marne Environnement n’accepte pas le fait qu’on réalise une expérience à l’aveugle quitte à générer des changements irréversibles sur le milieu.

«Ce n’est pas un petit casier. Ils n’ont pas choisi le casier qu’ils allaient garder mais ils ont des tailles critiques qui nous ont été présentées, et cela représente 1/5 du projet. Ce n’est pas une paille et puis ce sont des aménagements qui une fois présents, sont définitifs.» (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)

En effet, si Seine et Marne Environnement participe à l’élaboration des mesures écologiques envisagées par l’organisme public, elle n’adhère pas encore à la forme que revêt le projet à l’heure actuelle.

«Donc, nous, on participe à l’accompagnement de ces mesures environnementales puisque ces mesures sont nécessaires et doivent être le plus fonctionnelles possibles mais ce n’est pas pour autant qu’on est convaincu de la façon dont l’ouvrage est fait.» (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)
 

Ainsi, le débat public auquel a été soumis le projet d’aménagement de la zone de la Bassée à la demande de la CNDP aura permis, outre de mettre en évidence des désaccords plus ou moins attendus sur le fond de la question environnementale, de mettre en lumière des divergences de positionnement et de rapport à cet aspect du projet. Il a donc débouché, à travers la prise de conscience de cette dissymétrie, sur une nouvelle phase de concertation prenant acte de ces éléments pour qu’ait lieu une véritable négociation des acteurs et une évolution positive de la controverse. Ce contexte semble donc propice à une prise de décision constructive, malgré un degré d’incertitude indéniablement élevé quant à la dimension environnementale du projet.