Paris peut-il couler ?

Paris peut-il couler ?

La mise en place d'un cinquième ouvrage pour protéger Paris

Historique du projet

10 avril 2014 | Commentaires fermés

Le projet d’aménagement de la Bassée au fil des décennies

Le calme relatif du fleuve suivant la crue centennale historique de 1910, conduit à un oubli du risque d’inondation en Île-de-France, d’autant que l’on se sent invulnérable et protégé par les quatre ouvrages hydrauliques, assurant une protection que l’on croît infaillible contre ce risque. Pourtant, Pascal POPELIN confie à ses lecteurs: « pour essentiels qu’ils soient en cas de crue centennale, nos quatre géants ne constituent pas une protection absolue, loin s’en faut ». Le risque reste malgré tout bien réel et très tôt, les Grands lacs de Seine envisagent donc la construction d’un cinquième ouvrage, projet d’envergure soumis à étude dès les années 90 et dont on ne commence à entrevoir la phase de réalisation qu’aujourd’hui. La frise suivante reprend de manière succincte les différentes étapes de l’élaboration du projet de son origine à ce jour.

frise chronologique projet

Premiers pas…

Le projet d’aménagement de la Bassée est un projet d’envergure, dont l’idée remonte aux années 90.  Entre 1992 et 1998, les Grands lacs de Seine réalisent avec l’appui technique et financier de partenaires nationaux et régionaux, une évaluation des dommages que causerait une crue de type 1910 dans le bassin de la Seine, et ce en tenant compte de la physionomie moderne de l’agglomération parisienne.

Plusieurs études techniques visent alors à établir la localisation optimale d’un cinquième ouvrage de protection contre le risque d’inondation. Son avancement prend la forme de phases de concertation et d’étude successives, dans le but de parvenir à un projet économiquement viable et efficace au regard de la protection contre le risque d’inondation dans le bassin parisien.

Soumission à débat public

L’un des moments clefs de l’évolution du projet est le débat public auquel il est soumis par la Commission Nationale du Débat Public de novembre 2011 à février 2012. Le projet y est étudié conjointement avec le projet mise à grand gabarit de la liaison fluviale entre Bray-sur-Seine et Nogent-sur-Seine, porté par Voies Navigables de France (VnF).

«Le débat public offre à chacun l’occasion de s’exprimer et de s’informer sur le projet mis au débat, avant même que sa mise en œuvre soit décidée par le maître d’ouvrage. Ce débat est organisé et animé par un tiers neutre, la Commission particulière du débat public (Cpdp – émanation de la Commission nationale du débat public ou Cndp). L’objectif de la Commission est de permettre l’expression des questions et avis sur le projet soumis au débat (quel que soit le niveau d’expertise des émetteurs de ces questions, leur statut etc.), et de garantir les bonnes conditions d’information du public.» (LEGRAND, Patrick (directeur de publication). Crue Seine-Bassée, Débat public, Projet d’aménagement de la Bassée, Compte-rendu du débat [en ligne]. Commission Nationale du Débat Public, Paris. 30/03/2012. Disponible sur : http://www.debatpublic-crueseinebassee.org/DOCS/CR_ET_BILAN/COMPTE_RENDU_23032012_WEB.PDF (Consulté le 28/12/2013). – cf Bilan Bibliographique)

A l’époque, le projet proposé par l’EPTB Seine Grands Lacs au débat public poursuit le double objectif de réduire l’impact des crues de la Seine sur la région Île-de-France et de restaurer écologiquement la zone humide de la Bassée. Il consiste pour cela en l’aménagement de dix casiers-réservoirs endigués vers lesquels seraient acheminées les eaux excédentaires de la Seine en cas de crue.

«L’ouvrage représenterait une surface de stockage des eaux de 2 300 hectares pour un volume stockable maximum de 55 millions de mètres cubes. La Bassée n’étant plus inondable gravitairement, même pour des crues d’importance majeure, ces espaces endigués seraient remplis par pompage avec un débit maximum de 230 m³ par seconde, la vidange serait gravitaire, une fois que le débit de la Seine aurait diminué. Le niveau moyen de remplissage serait de l’ordre de 2,5 mètres dans les espaces endigués.»(LEGRAND, Patrick (directeur de publication). Crue Seine-Bassée, Débat public, Projet d’aménagement de la Bassée, Compte-rendu du débat [en ligne]. Commission Nationale du Débat Public, Paris. 30/03/2012. Disponible sur : http://www.debatpublic-crueseinebassee.org/DOCS/CR_ET_BILAN/COMPTE_RENDU_23032012_WEB.PDF (Consulté le 28/12/2013). – cf Bilan Bibliographique)

Le prix total du projet est alors estimé à 495 millions d’euros hors taxes, pour un coût de fonctionnement annuel moyen de 4,5 millions d’euros (sans prise en compte de l’amortissement).

carte_bassee_casiers

>Source:THEPOT Régis (directeur de publication). Site Internet de l’EPTB Seine Grands Lacs [en ligne]. Disponible sur http://www.seinegrandslacs.fr/eptb-seine-grands-lacs/evolution-des-grands-lacs-de-seine (Consulté le 30/12/2013).

Parmi les conclusions du débat public ayant fait évoluer le projet, on retiendra la décision de renoncer à l’aménagement de dix casiers réservoirs pour se concentrer sur la mise en place d’un unique casier-pilote. La question délicate du financement, est notamment à l’origine du ralentissement du projet avant que celui-ci ne soit soumis à débat public.

Ensuite, il est décidé à l’issue du débat public d’intégrer le projet à un Programme d’action de prévention du risque inondations (PAPI), afin de l’insérer parmi d’autres mesures, y compris non structurelles, contribuant à la gestion du risque d’inondation. Ce PAPI s’organise en deux phases distinctes. La première (2014-2016) verra le début des premières actions ainsi que la rédaction d’une convention de financement. La seconde (2016-2019) aura lieu après une révision de mi-parcours qui permettra d’intégrer certains changements. On prévoit notamment de mettre à contribution des conseils généraux supplémentaires (Yvelines, Val d’Oise).

Concertation et négociations

La phase de concertation au sujet du choix, parmi les 10 casiers présentés au débat public, de celui qui sera retenu comme casier-pilote, a débuté le 7 novembre 2014 avec une réunion publique à Bray-sur-Seine. Pour l’instant, deux casiers ont déjà été écartés pour leur faible rapport volume de stockage / longueur de digue, mais également du fait de leur localisation en zone tourbeuse.

«Il y a deux casiers qui ont été supprimés (1 et 6). Ces deux  casiers présentent un rapport efficacité  coût plus faible que les autres, c’est-à-dire qu’en clair ils sont trop chers à construire par rapport à leur efficacité. Parce qu’ils présentent des linéaires de digues assez importants par rapport au volume de stockage qu’ils peuvent offrir. En plus, on est sur des problématiques environnementales qui sont très spécifiques, que l’on ne trouve pas sur les autres casiers, avec des zones tourbeuses qui sont vraiment patrimoniales mais qui supporteraient très mal une inondation. Donc qui perdraient complètement leurs caractéristiques spécifiques de zones tourbeuses.» (cf. Entretien avec Amélie ASTRUC)

Selon le casier sélectionné, le volume stocké se situera entre 8 et 10 millions de mètres cubes et devrait permettre un abaissement des niveaux d’inondation de 5 à 10 cm en cas d’événement de crue majeure de type 1982. Le coût du projet tel qu’il est envisagé aujourd’hui s’élève donc à 100 millions d’euros.

Le casier-pilote permettra ainsi de tester la technologie avant d’envisager à nouveau l’aménagement d’autres casiers dans la zone de la Bassée. Pour autant, il n’en demeure pas moins un projet conséquent aux multiples impacts sur l’environnement, ce que tiennent à souligner de nombreux acteurs.

«Le terme petit étant quand même tout à fait limité puisque le casier pilote c’est quand même 1/5 du projet. Ce n’est pas un petit casier. Ils n’ont pas choisi le casier qu’ils allaient garder mais ils ont des tailles critiques qui nous ont été présentées, et cela représente 1/5 du projet. Ce n’est pas une paille et puis ce sont des aménagements qui une fois présents, sont définitifs.» (cf. Entretien avec Christophe PARISOT)

 En ce qui concerne le lancement des travaux à proprement parler, celui-ci est prévu à l’horizon 2020, suivi d’une période d’expérimentation de cinq ans, avant que l’éventuelle décision d’ajouter d’autres casiers au casier pilote initial ne puisse-t-être prise vers 2030.