Dans de nombreux articles scientifiques ou de presse, ou encore des documents produits par les ONG, on trouve l’allusion plus ou moins masquée à la corruption en Indonésie, corruption qui favorise l’obtention de droit de défrichement, notamment sur des zones de forêt primaire. Des chercheurs européens parlent ainsi d’ambiguïtés dans la gérance des terres et de corruption (« ambiguities in the land tenure system and corruption ») [1], quand l’ONG Les Amis de la Terre* signale ouvertement que tout le secteur est gangrené par de courants dessous-de-table : « If and when they are detected, illegal practises present the authorities with a choice of either accepting the situation or entering lengthy and uncertain legal proceedings in a generally corrupt legal arena. It is no secret in Indonesia that the first option is commonly chosen and that bribery is also common. » (Lorsque et si elles sont détectées, les pratiques illégales placent les autorités face à un choix : soit accepter la situation, soit entrer dans de longues et incertaines procédures légales dans une atmosphère légale globalement corrompue. Ce n’est pas un secret qu’en Indonésie c’est la première option qui est communément choisie et que les pots-de-vin sont aussi banals) [2].
On peut lire dans le rapport Cruel Oil publié par le CSPI* (Center for Science of Public Interest) : «Indonesia’s plantation and forestry sectors are infested with corruption, collusion, and nepotism, according to the Indonesian government’s own official investigations » (Les secteurs de la plantation et de la gérance de la forêt en Indonésie sont infestés par la corruption, la collusion, et le népotisme, selon les propres enquêtes officielles du gouvernement indonésien) [3]. Le gouvernement lui-même est donc au courant de ce climat de corruption, qui daterait de l’époque du général Suharto*, selon l’article Palming Off publié sur le site du journal The Economist : « Another fundamental difficulty is that forestry management in Indonesia has long been riddled with corruption, having become part of the machinery of crony capitalism under the long Suharto dictatorship. » (Une autre difficulté fondamentale est que la gérance de la forêt en Indonésie a longtemps été truffée de corruption, puisqu’elle a fait partie de la machine du capitalisme népotique sous le long règne dictatorial de Suharto) [4].
*Les Amis de la Terre – Friends of the Earth : ONG environnementaliste cherchant à réparer les dégâts causés par l’homme sur la nature et promouvant en particulier la participation de la société civile dans la prise de décision autour de la gestion des ressources naturelles.
*CSPI – Center for Science in the Public Interest (Centre pour la Science d’Intérêt Public) : organisme américain, de fonds essentiellement privé, qui vise à produire des études scientifiques objectives, principalement dans les domaines de la santé et de l’environnement.
*Général Suharto : il accède au pouvoir indonésien en 1966, contraignant le président Soekarno à lui transmettre le pouvoir. Il instaure un régime répressif envers les communistes. Il démissionne en 1998, suite à une période de crise économique.
[1] FITZHERBERT E. B. et al., How will palm oil affect biodiversity (2008)
[2] WAKKER E. (Les Amis de la Terre), Greasy Palms (2005)
[3] BROWN E. et JACOBSON M. F., Cruel Oil : How Palm Oil Harms Health, Rainforest & Wildlife (2005)
[4] THE ECONOMIST, Indonesia’s Forest and REDD : Palming off (2012)