On parle de parcelle agroforestière, ou agroforêt, lorsque le paysan exploite des palmiers au sein de la forêt primaire, en opposition avec les plantations qui sont souvent des monocultures. A l’origine, les arbres ainsi exploités avaient poussé naturellement. Aujourd’hui, il s’agit davantage de mixer des plantations de palmier avec d’autres cultures, ou de planter des palmiers à proximité des villages. L’agroforêt se définit donc par son extension spatiale limitée et la variété des espèces végétales présentes.
Permettent-elles la conservation de la biodiversité ?
Cette pratique présente l’avantage immédiat de rapprocher les plantations de la forêt primaire, considérée comme un idéal de biodiversité. « Results of several recent studies suggest that such systems contribute to biodiversity conservation by providing habitat to a number of forest species outside protected areas » (Les résultats de plusieurs études menées récemment suggèrent que de tels systèmes contribuent à la conservation de la biodiversité, en garantissant un habitat à bon nombre d’espèces forestières, au-delà des zones protégées), soutiennent des chercheurs du Oxford Long-term Ecology Laboratory. [1] Le point-clef se situe au niveau de la qualité de la biodiversité. Il existe un consensus parmi les chercheurs occidentaux : les espèces présentes sont différentes. « Although high in richness and similarity, agroforestry systems are arguably impoverished in endemic and specialist forest species, which are often exclusively found in oldgrowth forest. » (Malgré leur proximité avec la biodiversité des forêts et leur richesse, les systèmes agroforestiers sont remarquablement pauvres en espèces endémiques et typiquement forestières, que l’on ne trouve souvent qu’exclusivement dans les vieilles forêts primaires). [1]
Sont-elles économiquement viables ? Et sont-elles adaptées au palmier ?
Les agroforêts sont un élément de l’économie locale du palmier. La production d’huile est en effet souvent couplée à la production de vin de palme, à la récolte des feuilles ou à la coupe des troncs pour obtenir des matériaux de construction. L’échelle est familiale, les producteurs n’ont souvent pas de réelle vocation commerciale sur ses produits-là (au sens de commerce industriel). Il ne s’agit donc pas d’une réelle source de revenus. L’argent est essentiellement gagné via l’huile de palme. Or cultiver des palmiers au sein de la forêt n’est pas simple et la récolte, plus difficile, coûte davantage à l’exploitant. S’engage alors une logique de gain : l’exploitant élimine les espèces les moins rentables pour se concentrer sur le palmier. Au bout du compte, la parcelle ne mérite plus son nom d’agroforêt et ressemble à s’y méprendre à une monoculture, révèlent les agronomes A. Rival* et P. Levang*. [2] De plus, le problème du palmier est sa taille : une vingtaine de mètre lorsqu’il est mature. Il fait donc de l’ombre aux espèces à son pied, ce qui les empêche de croître. Les agronomes, qui se sont penchés sur la question, travaillent à proposer des associations d’arbres possibles et économiquement rentables. Avec des parcelles ainsi plantées, la tentation de basculer vers une monoculture ne présenterait alors plus.
En savoir plus sur les autres pistes d’amélioration : l’intensification écologique ou la diminution des coûts de certification.
*Alain Rival : Agronome, correspondant pour la filière « Palmier à huile » au sein du CIRAD (Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement).
*Patrice Levang : Agronome et économiste, directeur de recherche à l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement).
[1] BHAGWAT S. A. et WILLIS K. J., Agroforestry as a Solution to the Oil Palm Debate (2008)
[2] RIVAL A. et LEVANG P., La Palme des Controverses – Palmier à huile et enjeux de développement (2013)