Une culture au « business model » souvent en défaveur des petits producteurs

Dans de nombreux cas de figures, il apparaît que ce sont les interlocuteurs privilégiés des compagnies qui vont s’enrichir le plus [1] : d’une part, leur rôle de décideur les rend plus susceptibles à être la cible d’arrangements tandis que, d’autre part, en raison de la politique globale des compagnies, toutes les transactions avec les villageois en rapport avec ces mêmes compagnies passent par les mains de ces interlocuteurs privilégiés.

 

Enfin, quels que soient les profits que peuvent générer une petite plantation, il faut garder à l’esprit qu’un investissement est nécessaire pour planter les palmiers, tandis qu’aucune source de revenue n’est disponible avant l’arrivée à maturité des palmiers, c’est-à-dire avant trois années aux moins. Ce détail, souvent oublié, conduit généralement à un endettement massif des petits producteurs, et les rend sensibles à un rachat bradé de leur plantation, montrent les agronomes A. Rival* et P. Levang* [2] :

« Le palmier à huile n’atteignant sa maturité qu’au bout de 7 ans, les producteurs qui se sont endettés pour acheter des parcelles ne parviennent pas à rembourser leurs crédits. Ils sont alors obligés de vendre à perte à des transmigrants attirés par les plantations. Les seconds s’enrichissent, les premiers, devenus manœuvres pour la compagnie, conservent une certaine rancœur parfois source de tensions – les cadres des compagnies ont de bonnes conditions de travail, un bon salaire, car le personnel qualifié est rare. Il n’en est pas de même pour les sous-traitants et les manœuvres ».

 

Des études fournies par la sociologue S. Barral montrent que les sources de richesse ne se trouvent que sur le front de défrichement, et que dans les zones situées à l’arrière du front, caractérisées par une saturation du marché foncier et du marché du travail, on assiste de nouveau à une paupérisation des populations [3].

 

Pour en savoir plus sur les conditions de vie de travailleurs.

 

Pour en savoir plus  sur le développement local induit par les plantations.

 

 

*Alain Rival : Agronome, correspondant pour la filière « Palmier à huile » au sein du CIRAD (Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement).

*Patrice Levang : Agronome et économiste, directeur de recherche à l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement).

 

[1] A forest of evidence : third-party certification and multiple forms of proof – a case study of oil palm certification in Indonesia

[2] RIVAL A. et LEVANG P., La Palme des Controverses – Palmier à huile et enjeux de développement (2013)

[3] BARRAL S., Plantations de palmier à huile en Indonésie et déprolétarisation (2012)