- Boycott
Solution simple et radicale, cette solution est notamment soutenue par des ONG telles que Terre Sacrée*. L’avantage indéniable de cette initiative est que cela diminue la consommation d’huile de palme, et donc la production. Ainsi suivant le niveau de boycott mis en place, il est possible de réguler le marché.
Toutefois cette méthode est critiquée. Le WWF* souligne que l’abandon pur et simple de l’industrie de l’huile de palme n’est pas la réponse à apporter au problème car cela ne permet aucun changement dans son mode d’exploitation : « WWF believes that a boycott of palm oil is not the right response. Abandoning the palm oil industry will never help it to change » [1]. Les industriels se tourneront vers de nouveaux marchés moins regardants de leurs pratiques et auront alors toute liberté. De plus, renoncer à l’huile de palme signifie avoir recours à des substituants, or l’emploi d’autres huiles végétales soulève de nouvelles questions : ces huiles sont « souvent OGM, et pas forcément plus écologiquement ou socialement acceptables, compte tenu de leur plus faible rendement à l’hectare et de l’utilisation intensive de pesticides nécessaire à leur exploitation. », dénoncent les agronomes A. Rival* et P. Levang* [2]. Partant du constat que le marché ne se fermera pas sous l’effet d’un boycott mais sera simplement déplacé géographiquement, le WWF, membre de la RPSO*, s’inquiète de l’impact d’un boycott sur les producteurs et remet l’accent sur la nécessité de rendre l’élaéiculture durable : « Finding substitutes for oil palm also means preventing some of the world’s poorest and most disadvantaged small farmers from earning a living from what could be a sustainable crop. » (Trouver des substituants à l’huile de palme signifie également priver certains des petits exploitants parmi les plus pauvres et plus défavorisés du monde du moyen de gagner leur vie à partir de ce qui pourrait être une culture durable). Les chercheurs soulignent de plus que les propriétés nutritionnelles du substituant ne seront pas forcément meilleures [3].
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- Taxe d’importation
Certains gouvernements ont mis en place une procédure de taxation sur le produit. Suivant les fluctuations de cette taxe, il est alors possible d’avoir un contrôle sur la production d’huile de palme. Des projets de taxe ont été élaborés, comme par exemple en France avec la « taxe Nutella » proposée par Y. Daudigny en 2012, ou encore au Danemark avec la « Fat tax ». Dans les deux cas, ces projets furent très contestés. Des nutritionnistes tels que J-M. Lecerf ont ainsi qualifié d’injuste, voire de « taxe coloniale » la taxe proposée en France et accusé de provoquer des inégalités sur le marché. Les nutritionnistes comparaient notamment l’huile de palme au beurre, plus dangereux pour la santé, et pourtant non taxé. Cette vague de protestation mena à l’abandon de ces projets, qui n’eurent finalement pour effet que de relancer la controverse.
En savoir plus sur l’avis des nutritionnistes.
- La Mention « huile de palme »
A ce jour, l’huile de palme est présente dans de très nombreuses denrées alimentaires industrielles qu’on retrouve notamment dans les pays du Nord. Selon le WWF, 50% des produits d’un supermarché en contiennent. Toutefois, la majeure partie d’entre eux n’indiquent pas clairement la présence de cet ingrédient. A la place on peut souvent lire la mention « huile/graisse/matière grasse végétale ». Cette mention présente un avantage budgétaire pour les industriels, car elle permet d’englober les différentes matières grasses d’origine végétale existantes. Dans un dossier à propos de l’huile de palme [4], O. Morin, responsable de communication scientifique et technique à l’ITERG*, explique que son intégration dans les produits alimentaires dépend des fluctuations des échanges avec les producteurs. Des ajustements temporaires peuvent alors être effectués sans modifier l’étiquetage. Selon le Docteur J-M. Lecerf, pour le consommateur, cette imprécision sur la présence d’huile de palme peut être interprétée comme un camouflage de la part des industriels, ce qui alimente le débat : s’ils cachent sa présence, c’est que l’huile de palme ne doit pas être si bonne que ça… En France, une loi visant à exposer clairement la présence d’huile de palme est récemment passée (04/12/13), mais là encore la décision est controversée. Pour l’agronome A. Rival, chercheur délégué du CIRAD*, cette nouvelle législation va permettre au marché de l’huile de palme de gagner en transparence, et ainsi inciter le consommateur à ne plus se méfier. Cependant le Docteur J-M. Lecerf, nutritionniste, redoute l’effet opposé : que cette transparence facilite au contraire le refus de consommer, car un a priori négatif est déjà véhiculé parmi les consommateurs.
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- La Mention « sans huile de palme »
Alors qu’il est question de plus de transparence sur la présence d’huile de palme dans les produits, la mention « sans huile de palme » est de plus en plus présente sur ceux qui n’en contiennent pas. Des marques comme Findus, ou des enseignes comme Carrefour, proposent des produits ostensiblement estampillés « sans huile de palme ». Certains journalistes dénoncent un vaste mouvement de greenwashing : « terrorisées à l’idée d’un boycott de leurs produits, quelques entreprises se sont empressées d’annoncer, à grand renfort de publicité, qu’elles renonçaient à utiliser l’huile de palme. Un « non-sens » pour les experts qui récusent un à un les arguments marketing des industriels surfant sur la vague du « garanti sans huile de palme ». » [5]. D’autant plus que selon le CIRAD, 60 % des produits qui portent cette mention ne contiennent aucune huile végétale dès le départ. Enfin, nutritionnistes et experts du CIRAD s’accordent pour dire que ce type de mention risque de décrédibiliser l’huile de palme aux yeux des consommateurs, puisque l’expression « sans » connote l’idée de risque auprès du produit absent. Ils regrettent que la controverse soit alimentée en défaveur de l’huile de palme.
En savoir plus sur les enjeux de marché liés à l’huile de palme.
*Terre Sacrée : association environnementaliste diffusant de l’information dans le but d’alerter les gens sur l’état de la planète.
*WWF – World Wild Fund (Fonds Mondial pour la Nature) : ONG environnementaliste œuvrant pour la protection des espèces en danger, la préservation des ressources naturelles et des écosystèmes, ainsi que la promotion d’une transition énergétique respectueuse de l’environnement.
*Alain Rival : Agronome, correspondant pour la filière « Palmier à huile » au sein du CIRAD (Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement).
*Patrice Levang : Agronome et économiste, directeur de recherche à l’IRD (Institut de Recherche pour le Développement).
*RSPO – Roundtable on Sustainable Palm Oil (Table ronde pour une huile de palme durable ) : organisme réunissant des ONG, des producteurs, des investisseurs et des consommateurs d’huile de palme. Ils cherchent à améliorer la filière et à la rendre durable, notamment grâce au label CSPO.
*ITERG – Institut des Corps Gras : organisme privé sous contrat avec l’état, participant à la production et l’innovation dans le domaine des corps gras.
*CIRAD – Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement : Centre de recherche français, sous double tutelle des ministères de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche et des Affaires Etrangères. Le CIRAD produit des solutions (agronomiques, sociales…) pour le développement des pays du Sud.
[1] WWF, Palm Oil Buyers Scorecard – Measuring the progress of palm oil buyers (2013)
[2] RIVAL A. et LEVANG P., La Palme des Controverses – Palmier à huile et enjeux de développement (2013)
[3] MORIN O., Approche fonctionnelle de l’emploi de l’huile de palme (2013)
[4] MORIN O., Approche fonctionnelle de l’emploi de l’huile de palme (2013)
[5] HECKETSWEILER C. (L’Expansion), Les vertus retrouvées de l’huile de palme (2010)